C'est par de grandes déclarations, des engagements affichés, mais aussi par un soutien financier aux démocraties naissantes en deçà des espérances que s'est achevé le sommet du G8 sur l'intitulé «Nouveau monde, nouvelles idées». Deauville De notre envoyée spéciale Révolutions arabes, crises régionales et développement en Afrique, rôle des gouvernements dans l'essor d'internet, enseignements de la catastrophe de Fukushima, ont constitué l'essentiel de l'ordre du jour du sommet du G8 (le 37e depuis sa création) qui a réuni à Deauville jeudi et vendredi vingt-quatre délégations, dont dix-huit chefs d'Etat parmi lesquels le président Bouteflika qui a pris part aux échanges du G8 élargi à l'Afrique. Le choix d'un nouveau directeur général du Fonds monétaire international à la place de Dominique Strauss-Kahn s'est aussi invité à ce sommet annuel du G8. Une déclaration finale se voulant consensuelle, et dont la rédaction s'est efforcée de gommer les divergences, notamment entre les Occidentaux et les Russes sur le traitement de la question libyenne, a été adoptée à l'issue de ce 37e sommet du G8 depuis sa création. Une déclaration du G8 sur les printemps arabes et une autre déclaration G8 Afrique ont également été adoptées. Ainsi les régimes syrien et libyen doivent arrêter d'employer la force contre leur peuple et prendre en compte ses aspirations, souligne pour l'essentiel la déclaration finale, et appelle le régime syrien à «cesser l'usage de la force et l'intimidation contre le peuple syrien et engager un dialogue ainsi que les réformes fondamentales». Concernant la Libye, les dirigeants du G8 demandent «l'arrêt immédiat de l'usage de la force par le régime de Gueddafi», et se disent prêts à soutenir «une solution politique qui reflète la volonté du peuple». Jeudi soir en marge du sommet des chefs d'Etat ou de gouvernement, «des demandes ont été exprimées pour que la Russie assume un rôle de médiateur dans le but de régler la situation en Libye», a affirmé à la presse la porte-parole de Dmitri Medvedev, Natalia Timakova. Ces demandes ont été formulées lors de rencontres bilatérales entre le président russe et ses homologues français Nicolas Sarkozy, américain Barack Obama et le Premier ministre britannique David Cameron, selon la porte-parole russe. «Quand nous disons que M. El Gueddafi doit partir c'est qu'il doit quitter le pouvoir et plus tôt il le fera, et plus le choix sera grand pour lui. Plus tard il le fera et plus les destinations se réduisent. Nous ne disons pas qu'El Gueddafi doit être exilé, ce n'est pas notre problème, nous disons qu'un homme qui a employé l'artillerie, l'aviation pour tirer sur une foule innocente, désarmée après 41 ans de dictature ne peut pas rester en place. Les Nations unies nous ont donné mandat de protéger une population, c'est ce que nous faisons. Qu'ElGueddafi quitte le pouvoir et après, toute discussion sera possible», a souligné le président Sarkozy, jeudi, dans une conférence de presse de présentation des travaux de la première journée du G8. Dans une seconde conférence de presse de clôture du sommet du G8, hier après-midi, le président Sarkozy a réitéré qu'El Gueddafi n'avait pas d'autre choix. Et de préciser que la déclaration finale a été adoptée à l'unanimité, y compris par la Russie. Au sujet de la Syrie «certains d'entre vous disent pourquoi deux poids deux,; mesures, il ne s'agit pas d'interventions dans tous les sens, d'abord il faut l'autorisation du Conseil de sécurité et clairement la question du renforcement des sanctions à l'endroit des dirigeants syriens se pose, la violence qui est utilisée à l'endroit des manifestants est inacceptable», a dit en conférence de presse Nicolas Sarkozy. Il a répété hier que la déclaration finale à ce sujet est sans aucune ambiguïté. 20 milliards de dollars pour aider la transition en Tunisie et en égypte Les chefs d'Etat et de gouvernement du G8 affirment leur volonté de «renouveler leur engagement à soutenir les réformes démocratiques à travers le monde et à répondre aux aspirations pour la liberté et l'emploi, en particulier des femmes et de la jeunesse». «La démocratie demeure le meilleur chemin vers la paix, la stabilité, la prospérité, une croissance partagée et le développement», affirment-ils.Et avec la Tunisie et l'Egypte, qui ont «engagé des transitions démocratiques» conformément aux aspirations de leurs peuples, le G8 compte lancer un «partenariat durable», indique la déclaration finale. Les Banques multilatérales de développement sont prêtes à mobiliser plus de 20 milliards de dollars, dont 3,5 milliards d'euros provenant de la BEI au profit de l'Egypte et de la Tunisie d'ici 2013, indique un communiqué de l'Elysée. «Les membres du G8 accompagneront aussi la Tunisie et l'Egypte.» Et de préciser que l'action de la France passe par deux canaux : celui des institutions européennes qui mobiliseront, au-delà de l'action de la BEI, plus d'1 milliard d'euros en leur faveur d'ici 2013 et celui de l'Agence française de Développement qui apportera près de 1,1 milliard d'euros de prêts à conditions avantageuses sur cette même période pour soutenir la transition démocratique dans ces deux pays. «Cette aide directe de la France à la Tunisie et à l'Egypte, de respectivement 425 millions d'euros et de 650 millions d'euros, sera ciblée sur la reprise économique et la création des conditions d'une croissance plus équitable, la formation professionnelle et l'accès à l'emploi». «Cet effort exceptionnel» comprend, «au-delà d'un soutien budgétaire immédiat, un renforcement des dispositifs de garantie en faveur des PME, et le développement de projets d'infrastructures-clés pour améliorer les conditions de vie dans les zones déshéritées». Cette aide reste toutefois en deçà de ce qu'espéraient les deux pays destinataires. Le Caire réclamait entre 10 et 12 milliards de dollars d'ici mi-2012 et Tunis 25 milliards de dollars sur cinq ans. Les dirigeants du G8 ont appelé Israéliens et Palestiniens à des «discussions substantielles sans délai» pour parvenir à «un accord-cadre» pour une paix durable. «Nous sommes convaincus que les changements historiques en cours dans la région rendent pas moins, mais encore plus importante la résolution du conflit israélo-palestinien par la négociation», écrivent les leaders des pays riches dans la déclaration commune. «Nous appelons les deux parties à engager sans délai de substantielles discussions dans le but de conclure un accord-cadre sur toutes les questions liées au statut final» deux parties, indique le texte. Le président Sarkozy a, tout en l'approuvant, estimé la déclaration de Barack Obama de revenir aux frontières de 1967 comme «extrêmement courageuse». Les huit puissances membres du G8 ont souligné le rôle des gouvernements dans un «essor équilibré» d'Internet, aux côtés des utilisateurs et du secteur privé. «A Deauville en 2011, pour la première fois au niveau des dirigeants […], nous nous sommes mis d'accord sur un certain nombre de principes, dont la liberté, le respect de la vie privée et de la propriété intellectuelle […], la cyber-sécurité et la protection contre le crime, qui sont essentielles à un internet fort et florissant». Concernant le volet nucléaire civil, le président Sarkozy a, dans sa conférence de presse de jeudi, déclaré que «nombreux sont ceux qui pensent qu'il n'y a pas d'alternative au nucléaire, même si tous nous sommes convaincus de la nécessité de développer les énergies alternatives. Tous nous souhaitons nous doter d'une réglementation de très haut niveau sur la sûreté nucléaire qui s'applique à tous les pays qui sont dotés de nucléaire civil. Nous avons tous dans l'idée que c'est la meilleure façon d'éviter que les centrales nucléaires civiles puissent être construites sur des normes de sécurité maximum». E t de préciser hier que l'Iran, qui continue à renforcer son dispositif nucléaire à des fins non civiles, doit s'attendre à des sanctions plus lourdes.