Les labours illicites reprennent dans les périmètres mis en défens à Aïn Deheb (40 000 ha), en dépit de leur interdiction par le wali de Tiaret en octobre 2009. Des labours sont observés également sur les terres archs (tribales), où le pacage obéit à des règles ancestrales et très consensuelles. Les régions les plus touchées sont Noufikha, Sidi Abderrahmane, Chehima et Naïma. Cette année encore, elles ont été soumises à un défrichage intensif. En 2010, la direction de l'agriculture de Tiaret a recensé plus de 1000 ha de terres steppiques labourées, dont la moitié à Aïn Deheb. Quel lien entre la multiplication des labours illicites et la reprise des conflits tribaux dans cette région où se côtoient «difficilement» près de 2500 éleveurs ? Jeudi 26 mai, à une dizaine de kilomètres au sud de Aïn Deheb. Ici, c'est un petit monde à part, où ramasseurs de «terfas» (truffes) et éleveurs se disputent les faveurs d'un territoire dominé principalement par l'alfa et le «chih» (l'armoise blanche). Sur le chemin de Hadouana, les périmètres mis en défens portent encore les stigmates de labours récents, tandis que de nombreuses pistes sont pratiquement défoncées sur des dizaines de kilomètres. Le bornage des zones de parcours reste, lui, aléatoire. «Le couvert végétal connaît une dégradation permanente en raison des labours anarchiques qu'effectuent des éleveurs de la tribu de Chaouia, déplore Nabil Meradji, membre d'une association écologique locale. Dans quelques années, cela risque d'empirer si l'Etat ne fait rien.» Le défrichement et les labours illicites découlent, selon lui, du passage d'un mode d'élevage transhumant à un élevage fixe basé sur la complémentation de l'alimentation des cheptels. «Les pratiques du pastoralisme ont profondément changé depuis quelques années», constate Kadari Saâd, ramasseur de terfas (truffes) et, occasionnellement, chauffeur de taxi clandestin. Nos interlocuteurs tiennent pour responsable le maire de Aïn Deheb, membre influent de la tribu des Chaouia, de ce désastre écologique.