Le Bastion 23 (Palais des raïs) à Alger abrite depuis le 30 novembre dernier une exposition de peinture de l'artiste-peintre Ramdane Kacer. Elle s'étendra jusqu'au 7 janvier 2006. 46 œuvres sont présentées au public à cette occasion. Elles ont pour point commun la mise en valeur de l'épouvantail et l'utilisation des formes géométriques, ainsi que les motifs qu'on retrouve dans la tapisserie, la poterie et les bijoux berbères. Dans la majorité des tableaux, l'artiste-peintre a utilisé beaucoup de couleurs, des couleurs chatoyantes qui expriment le mouvement et cette quête inassouvie de l'irrationnel humain. D'autant que l'ensemble des tableaux met en relief la tragédie des années 1990 qui ont chambardé l'Algérie. L'épouvantail est utilisé d'une manière surréaliste, à entendre l'artiste-peintre rencontré sur les lieux. Et pour qui ce gourdin, couvert de haillons implanté dans les jardins et potagers pour effrayer les oiseaux, symbolise la protection. « C'était en 1999. J'ai ouvert une fenêtre de notre maison et j'ai vu un épouvantail dans le potager d'un voisin. Ce qui m'a inspiré ces tableaux. Je l'utilise pour interpréter la réalité quotidienne, notamment la tragédie algérienne des années 1990, les inondations qui ont frappé Bab El Oued et le séisme ayant secoué le centre du pays. Il symbolise pour moi la protection », explique l'artiste-peintre. C'est ce qui se reflète à titre d'exemple dans Le père de la mariée. On y relève le père qui couvre sa fille d'un burnous. La couleur rouge domine surtout dans Blessure, interprétant la violence. Elle côtoie le jaune, signe de la chaleur. Cela reflète un pays paradisiaque où la vie est un enfer. Elle y est subie faute de mieux plus que vécue et appréciée. Le noir et le rouge se côtoient dans Mise à mort du taureau. Cela dit, l'artiste-peintre n'a pas cédé au fatalisme. Le soleil revient traduit, avec l'utilisation de beaucoup de couleurs d'une manière à ce qu'elles expriment de par leur contraste, la gaieté et la joie de vivre, un clin d'œil pour l'espoir. Un lumignon de cette envie de vivre en dépit de cette logique de Méphitophélès qui transforme tout éden en nécropole. Ainsi, la peinture de Ramdan Kacer constitue, au-delà de sa dimension tragique, l'empan d'un havre arraché à la patrie de la mort.