Le site du défunt Bois des Pins où doit s'ériger une énigmatique structure est quadrillé depuis quelques jours par un détachement de policiers, au grand dam des riverains qui se sont soulevés et dont certains d'entre eux doivent passer devant le juge. Le promoteur de ce projet est inconnu à ce jour. A qui profite cet acte inqualifiable ? Du jamais vu en Algérie depuis l'indépendance. Des dizaines de policiers protègent un chantier. Cela se passe au Bois des Pins, à Hydra. Est-ce le site d'une future centrale nucléaire pour qu'il y ait un tel déploiement ? Est-ce le site d'une construction à caractère hautement stratégique pour la sécurité nationale ? Tout a commencé il y a environ deux semaines ; des engins de travaux publics se sont mis à détruire une forêt, en violation de toute logique et de la loi. Les riverains, médusés, se sont révoltés. Ils ont manifesté pour empêcher la destruction de ce lieu que tous les Algérois connaissent sous le nom de Bois des Pins. A leur grande surprise, des cars de policiers arrivent et déversent leur flot d'agents de l'ordre. Les riverains sont systématiquement matraqués et certains d'entre eux arrêtés. Les habitants ne comprennent pas un tel déploiement et une telle violence alors qu'ils ont eu une réaction citoyenne pour protéger l'environnement et une des rares forêts de la capitale. Depuis, les policiers se sont carrément installés sur les lieux. Ils ont même occupé une école et sont prêts à intervenir à n'importe quel moment. Ils étaient présents hier encore. Les riverains les regardaient avec tristesse. En contresens, les bulldozers poursuivaient leur œuvre destructrice. La forêt du Bois des Pins a été rasée. Il ne reste que quelques troncs d'arbres qui gisent au milieu du chantier. Un groupe de riverains accompagnés de moudjahidate, se sont présentés à la rédaction pour dénoncer ce fait du prince. Selon eux, la forêt va être remplacée par un parking et un centre commercial, maquette à l'appui. En relation avec cette affaire, les moudjahidate Djamila Bouhired, Fattouma Ouzegane, Louisa Ighilahriz, Zoulikha Bekaddour, Malika, Wahiba et Louisa Ouzarène ont adressé à la presse une déclaration dans laquelle elles disent refuser de baisser la garde face à des charognards prêts à s'entretuer pour réquisitionner un pouvoir qu'ils ne veulent pas partager. «Révoltés par l'impéritie qui règne à tous les niveaux du système où les ‘parachutés' grassement rétribués distribuent des miettes aux policiers chargés de les protéger. Isolés dans leur bunker, ils ignorent tout de la réalité sociopolitique du pays qu'ils gouvernent avec un fallacieux projet de société qui n'est pas celui dont ont rêvé les meilleur(e)s d'entre nous. (…) Ce n'est pas un hasard si les «damnés de la terre» que nous sommes redevenu(e)s se soulèvent et se révoltent pour réclamer leur part de ‘bien-être' disponible mais confisqué par un régime sourd et muet. Toujours aveugle face aux tensions sociales qui génèrent des violences durement réprimées, dans un contexte de plus en plus hostile et répressif, par des forces policières instrumentalisées. Un vent de liberté et d'espoir souffle enfin et réchauffe le cœur refroidi de la planète. L'Algérie n'est pas la Tunisie, l'Egypte, la Libye ou la Syrie. Elle a réussi, au prix du sacrifice des meilleurs de ses enfants, une grande et magnifique guerre de Libération nationale, récupérée, hélas, par les résistants de la dernière heure. Malgré les séquelles d'une guerre fratricide, notre peuple résiste et lutte contre le démembrement de ses biens délabrés et la ‘course à la rapine'. Toujours vigilant et méfiant, il n'a jamais cru, et aujourd'hui encore moins, aux discours et aux promesses de tous les habitués du sérail préférant les honneurs à l'honneur ! La République, que nous voulions démocratique et populaire, est bafouée par des hommes et des femmes sans foi ni loi ! Notre jeunesse est saine et courageuse. Fière et combative, elle est le ferment qui peut raviver le combat initié par ses aîné(e)s. Evitons l'explosion de rage qui pourrait être fatale au pays qui a affronté suffisamment d'épreuves ! La sagesse des véritables démocrates et la douleur inquiétante d'un peuple qui crie sa souffrance doivent être écoutées et surtout entendues avec beaucoup d'attention et d'intérêt. Le pouvoir en place doit, sans attendre, se remettre en question et jouer honnêtement la carte de l'apaisement. L'Algérie, grande par sa valeureuse histoire, ne mérite pas d'être à nouveau malmenée par ses propres enfants. Le siège policier de la cité Bois des Pins, à Hydra, nous a ramenés en 1957, moment où les parachutistes du général Massu ont investi immeubles et appartements d'Alger durant la glorieuse Bataille d'Alger, conclut la déclaration.» Mais qui se cache derrière le ou les acquéreurs de ce que l'on peut appeler désormais l'ex-Bois des Pins ? De toute évidence, ce n'est pas pour les beaux yeux d'un ministre ou d'un général qu'on procède à la mobilisation d'un impressionnant dispositif policier afin de défendre un chantier privé. Il faut peut-être aller plus haut pour trouver la réponse. Il y a déjà une piste : depuis une dizaine d'années, c'est la loi du plus fort qui règne, c'est la justice de nuit, c'est l'Etat de non-droit qui s'est installé. Une source proche de l'APC de Hydra s'est contentée de nous dire que la destruction de la forêt a été entreprise sans l'ouverture d'une enquête de commodo et incommodo et sans l'accord des autorités communales et de la direction des forêts.