Traditionnellement, Béchar n'est pas une région à élevage intensif de cheptels. La wilaya dépend en la matière des régions des Hauts-Plateaux. A moins d'une semaine de la fête de l'Aïd El Adha, le prix du mouton aux marchés aux bestiaux atteint un seuil dépassant tout entendement. Une simple virée dans ces marchés suffit pour se faire une idée sur l'insupportable saignée qui attend le père de famille simple salarié. Pour l'instant, des visiteurs, des curieux et quelques acheteurs prospectent les marchés en attendant l'arrivée massive des maquignons qui vont pouvoir déverser leurs cheptels dans la wilaya, mais ils ne se font guère des illusions sur la flambée des prix, malgré la légère baisse du tarif sur la viande fraîche ovine enregistrée sur les étals des bouchers en 2005 par rapport à l'année 2004. Il faut dire que la hausse excessive du prix du mouton cette année dissuade tout acheteur au revenu même aisé. A titre d'exemple, un bélier pesant entre 30 kg et 35 kg vaut 28 000 DA, alors que si l'on tient compte du prix de la viande chez le boucher l'animal ne devrait pas dépasser les 18 000 DA. Néanmoins, ici la logique du profit l'emporte sur toute autre considération. Dans le Sud, la fête du sacrifice rituel en cette occasion ne perd pas pour autant de son éclat, car la pression qui s'exerce aussi bien par l'environnement que par les enfants sur le père de famille est tellement forte que celui-ci est acculé à contracter un endettement pour s'acquitter de cette obligation traditionnelle. Cependant, la déception des pères de famille est immense. Sur cette flambée des prix, les avis sont partagés sur l'origine du prix inabordable du mouton et que certains imputent à la forte demande exprimée à l'occasion de l'Aïd El Adha. Pour d'autres, au contraire, il ne s'agit ni plus ni moins que d'un circuit contrôlé par des maquignons et autres intermédiaires « sans foi ni loi » profitant de la désorganisation qui a toujours caractérisé ce marché pour imposer des prix exorbitants aux fins d'enrichissement. Aussi, les quelques maquignons interrogés à ce sujet se défendent d'être à l'origine de cette situation qu'ils justifient par la cherté et la rareté des aliments de bétail et la sécheresse sévissant dans les régions pastorales à élevage intensif. Enfin, d'autres personnes plus réalistes dont les avis se situent dans la logique du contexte économique affirment haut et fort que les pouvoirs publics ne jouent pas pleinement le rôle régulateur dans ces marchés aux bestiaux, non pas par l'importation de l'étranger de moutons, palliatif qui a démontré ses limites, mais en intervenant directement au niveau des zones pastorales pour instaurer l'équilibre entre l'offre et la demande. Selon ces personnes, pour que l'intervention des pouvoirs publics puisse donner des résultats tangibles, elle devrait se matérialiser par une assistance accrue aux vrais éleveurs et par un contrôle sur les crédits alloués au secteur. Face à la saignée récurrente, l'on s'interroge précisément sur la destination des sommes colossales débloquées au profit des éleveurs, alors que le citoyen constate avec amertume d'année en année que la viande, aliment de base, devient de plus en plus chère et l'acquisition d'un bélier à l'occasion de la fête de l'Aïd El Adha est devenue quasi impossible.