Revenons ensemble sur les feuillets de l'agenda 2011 de l'entreprise avec ce que son environnement réglementaire et de pratiques d'affaires a apporté. Dans quelques jours, l'an 2011 sera rangé sur les étagères de nos archives : chacun en retiendra ce qui l'aura le plus marqué entre le ‘printemps arabe', la catastrophe de Fukushima, la crise de la dette dans la zone euro et, pour notre pays, le mécontentement spontané du début d'année, suite à certaines augmentations de prix non maîtrisées. La gestion du quotidien, au fil des années, reste orientée par son lien étroit avec l'économie et les pratiques commerciales. Le quotidien du gestionnaire d'entreprise est forcément marqué de ce que les législations et réglementations apportent en contraintes et en solutions. Entre autres contraintes, il faut tenir compte du décalage incontournable entre l'application d'une décision, son assimilation par l'entreprise, sa mise en œuvre et dans certains cas sa déviation. L'an 2011 sera finalement resté dans le sillon des orientations marquées en 2009 sur la question de l'investissement, y compris en matière de marchés publics, sur le parcours de 2010 pour la nouvelle loi comptable et sur une série de décrets exécutifs porteurs d'une grande réforme de la profession comptable. La LF 2011 et émeutes de janvier En matière fiscale, la loi de finances pour 2011 serait restée anodine, si les augmentations de prix du début de l'année n'avaient pas amené l'institutionnel a réagir au plus vite. A l'origine la LF 2011 a été conçue pour apporter plus d'affinement à d'anciennes dispositions, pour mieux orienter l'acte d'investissement, telle la disposition sur le réinvestissement des bénéfices dans l'entreprise individuelle, pour le bénéfice de l'abattement de 30% pour la détermination du revenu à prendre dans les bases de l'Impôt sur revenu global (IRG.) En matière de TVA, la LF a mis en place l'auto-liquidation de cette taxe pour les assujettis établis hors d'Algérie, visant particulièrement les prestations immatérielles faisant du client, établi en Algérie, le redevable réel avec l'obligation de liquidation de la TVA. On retiendra également, pour les modalités de déclaration et de paiement de la TVA, l'obligation prévue pour fournir les états fournisseurs et états clients sur support informatique. Dans la pratique, cela aurait dû conduire à fournir, à l'appui des déclarations mensuelles - modèle G50 - un support informatique, détaillant les données liées aux récupérations de TVA sur achats et les TVA collectées sur chiffre d'affaires. Ceux qui ont souhaité se conformer à la loi ont vite réalisé que les recettes des impôts n'étaient pas prêtes à recevoir les supports informatiques. En matière d'exonération, la LF 2011 a consacré une exonération permanente pour les revenus issus des activités portant sur le lait cru destiné à la consommation en l'état, tant au titre de l'Impôt sur le revenu global que de l'Impôt sur les Bénéfices des Sociétés, tant le besoin de stimuler la production de lait cru est crucial. A peine publiée, la LF 2011 s'est avérée incomplète, car rattrapée par les émeutes de janvier 2011, en réaction à l'augmentation des prix du sucre et de l'huile, au point de s'interroger sur l'absence d'études d'impact à engager en leur temps. L'institutionnel aura vite réagi, pour décider lors d'un Conseil interministériel de début janvier 2011, des exonérations temporaires et exceptionnelles de droits des Douanes et de Taxe sur la valeur ajoutée (TVA), sur le sucre brut et sur les huiles alimentaires et pour demander aux producteurs et aux distributeurs d'en répercuter en urgence les effets sur les prix de vente aux consommateurs. La LFC 2011 a repris ces dispositions pour les besoins de formalisation législative. Pratiques commerciales aménagées Les pratiques commerciales ont également été aménagées puisque pour répondre aux griefs collatéraux faits sur l'augmentation des prix, décision a été prise de geler l'obligation de paiement par chèque des factures de montant supérieur à 500 000 dinars. La volonté politique de consentement du chèque, comme moyen de paiement, reste donc gênée par l'économie informelle. Pour ce qui concerne le paiement des importations, la LFC 2011 a aménagé l'obligation du recours unique au paiement par crédit documentaire, en permettant aux entreprises productrices de biens et services de payer les importations d'équipements, d'intrants et autres produits utilisés pour la production ainsi que les produits stratégiques à caractère d'urgence par remise documentaire. Le seuil pour les paiements par transfert livre a été relevé à quatre millions de dinars pour les entreprises de production au titre de leurs importations d'intrants, de pièces de rechange et d'équipements nouveaux. De toute évidence, l'acte d'importation en vue de la simple revente en l'état n'a pas été encouragé, car les importations destinées à la vente en l'état continuent à être payées obligatoirement au moyen du seul crédit documentaire. Pour être mieux encadrées, les activités de revente en l'état sont désormais soumises à un suivi régulier. C'est l'objectif de l'arrêté du 13 juin 2011, du ministère du commerce, qui fixe la durée de validité des extraits du registre du commerce, à deux années, pour les assujettis qui exercent des activités d'importation de matières premières, produits et marchandises destinés à la revente en l'état ainsi que le commerce de détail exercé par les commerçants étrangers, qu'ils soient personnes physiques ou morales. Cette durée renouvelable prend effet à compter de la date de l'inscription au registre du commerce. Les personnes commerçantes réalisant ce type d'activités feraient bien de noter la date limite du 29 décembre 2011. En effet six mois auront couru, depuis la publication de l'arrêté en date du 29 juin 2011, les commerçants disposant d'un délai de six mois, à compter de la date de publication au Journal officiel de cet arrêté, pour se conformer à ses dispositions. Compromis entre l'investissement étranger et les marchés publics Le décret présidentiel du 1er mars 2011 a modifié et complété le décret présidentiel n° 10-236 du 7 octobre 2010, sur la réglementation des marchés publics, en précisant que certains projets de soumissionnaires étrangers peuvent être exemptés de la condition d'investissement.Le code des marchés publics dans sa version du 7 octobre 2010 était formulé avec la volonté de recourir au maximum aux entreprises algériennes pour que celles-ci participent davantage à la réalisation des programmes d'investissements publics.D'un autre côté, l'engagement d'investissement imposé aux soumissionnaires étrangers restait sans suite, le transfert de savoir-faire restant au centre de cette problématique. La révision de la réglementation des marchés publics, formulée en 2011, laisse désormais à l'autorité de l'institution nationale de souveraineté de l'Etat, de l'institution nationale autonome ou du ministre concerné, la prérogative de décider la désignation des projets devant donner lieu à l'engagement d'investir et la nature de l'investissement. Pour faciliter les partenariats, l'article 24 du décret présidentiel du 6 mars 2011 précise que le dossier d'appel d'offres doit contenir une liste non limitative d'entreprises de droit algérien et majoritairement détenues par des résidents nationaux, susceptibles de concrétiser une opération de partenariat avec le soumissionnaire étranger. L'effet combiné des dispositions de LFC 2009, des différentes publications sur la réglementation des marchés publics et des comportements d'entreprises étrangères, dans un environnement de crise financière internationale, ont conduit à un recul certain de l'Investissement direct à l'étranger, pour l'Algérie. Il est clair que les investisseurs étrangers ont moins regardé du côté de la destination Algérie. Dans certains secteurs, il y a même eu du désinvestissement, particulièrement dans les activités déployées par les PME qui ne peuvent pas se permettre de supporter autant de perturbations environnementales. Même dans le secteur pétrolier, principal pourvoyeur de ressources du pays, le ralentissement de l'investissement étranger, causé par des facteurs de crise internationale, n'a pas trouvé de levier de relance favorable à l'Algérie, au croisement des lois, ancienne (86-14) et nouvelle (05-07.)Il faut admettre que chacun préservant ses rangs, notre pays n'aura pas accordé le meilleur ‘cocon' à ses partenaires, gestion de crise oblige. Les compromis ne sont pas toujours faciles à trouver. Réforme de la profession comptable Pour terminer, rappelons que l'an 2011 a le mérite d'avoir réalisé la réforme de la profession comptable. La loi 10-01 du 29 juin 2010 avait déjà donné le ton en dotant le Conseil national de la comptabilité d'une mission de supervision des professions comptables, en plus de sa mission fondamentale de normalisation. Une série de décrets exécutifs ont été publiés en 2011 pour consacrer à chaque corps professionnel , son organisation et ses obligations, pour apporter un cadre structurant en matière de formation, d'accès à la profession, de normes d'exercice, d'arbitrage, de contrôle qualité et de déontologie. L'an 2011 a été également le premier chantier de l'application de la nouvelle loi comptable, le Système comptable financier (SCF), car bien qu'entrée en vigueur au 1er janvier 2010, cette nouvelle loi n'a été au centre des clôtures comptables de l'exercice 2010, que dans les premiers mois de 2011. Autant les cadres comptables que les dirigeants d'entreprises se sont ‘pris la tête' dans le calendrier du début de l'année 2011 à faire face aux véritables difficultés d'application de cette nouvelle loi. L'administration fiscale a finalement bien vu en prévoyant le report de délai des déclarations annuelles, pour l'exercice 2010, au 30 juin 2011. Dans la foulée, le Centre National du Registre du Commerce a lui-même permis un calendrier plus reculé pour la publication des comptes annuels. Cette flexibilité a permis à beaucoup d'entreprises de mieux cerner cette première application du SCF qui reste un chantier permanent, puisque la normalisation est un exercice continu. La continuité étant inéluctable, même si mise aux archives, l'année 2011 doit être un tremplin de réussite pour la nouvelle année. Gardons de cet agenda le meilleur et réussissons tous ensemble une belle année 2012.