La France vient de déposer officiellement auprès du comité des sanctions du Conseil de sécurité de l'ONU une liste contenant les noms de trois responsables ivoiriens qu'elle souhaite voir sanctionnés. Cette démarche est appuyée par le Royaume-Uni, le Danemark et la Slovaquie. Le document vise Charles Blé Goudé, le dirigeant des « jeunes patriotes » fidèles au président ivoirien, Laurent Gbagbo, le « maréchal » Eugène Djué, l'un des chefs de ces « patriotes », et Fofié Kouakou, un commandant des Forces nouvelles basé à Korhogo, dans le Nord contrôlé par les rebelles. « Je ne me laisserai pas intimider par des sanctions (dont les auteurs) assumeront les conséquences », a récemment déclaré Charles Blé Goudé. « Je ne suis pas sûr que mes sympathisants soient prêts à accepter cette provocation de trop. » Comme Eugène Djué et Fofié Kouakou, Charles Blé Goudé figurait sur une liste secrète de 95 Ivoiriens accusés, fin 2004, de crimes par une mission du Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'homme. Si la requête est approuvée par l'instance onusienne, les trois personnalités ivoiriennes seront automatiquement frappées, dès mardi, d'une interdiction de voyager à l'étranger et du gel de leurs avoirs, prévus par la résolution 1572 du 15 novembre 2004. Charles Blé Goudé et Eugène Djué sont accusés d'être les instigateurs des manifestations violentes qui ont visé l'Organisation des Nations unies en Côte d'Ivoire (Onuci) entre le 16 et le 20 janvier. La liste déposée leur impute aussi des violations des droits de l'homme et des appels à la violence. Ils auraient par ailleurs fait obstacle au processus de paix, à l'action de l'ONU et à la liberté de circulation des forces onusiennes et françaises. Fofié Kouakou est pour sa part accusé de violations des droits de l'homme et du recrutement de mercenaires et d'enfants-soldats. Le secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, a prévenu que « des violences massives pourraient être déclenchées à Abidjan et dans d'autres régions de Côte d'Ivoire », avant de rappeler au président Gbagbo et à son chef d'état-major, le général Mangou, « leur responsabilité personnelle dans la prévention des violences, y compris des attaques dirigées contre le personnel et les installations des Nations unies dans le pays, ainsi que des violences ethniques ». Kofi Annan a consulté vendredi le Conseil de sécurité pour procéder au transfert temporaire de troupes de la mission des Nations unies au Liberia (Minul) à l'opération de maintien de la paix en Côte d'Ivoire (Onuci) en vue de renforcer la sécurité du personnel sur le terrain, ont rapporté samedi des agences de presse. « Les pays qui fournissent des effectifs de police et des contingents à la Minul ont donné leur accord de principe à ce redéploiement temporaire et le gouvernement ivoirien en a été avisé », ajoute le secrétaire général. De violentes manifestations menées par des partisans du président Gbagbo entre le 15 et le 19 janvier dernier avaient visé principalement les installations de la mission des Nations unies en Côte d'Ivoire (Onuci) et paralysé pendant quatre jours Abidjan, la capitale économique ivoirienne. L'ONU a renforcé la protection de ses installations, en regroupant ses casques bleus autour de quelques bases mieux défendues, et en évacuant près d'un tiers de ses quelque 1200 personnels civils, ceux jugés « non essentiels ».Tout laisse entendre que le face-à-face peut laisser place à un nouveau bras de fer.