A Alger-Centre, un directeur d'un établissement scolaire à la retraite vit avec la peur d'une expulsion. Les expulsions ne s'arrêtent pas malgré le grand froid. «Depuis janvier dernier, une dizaine de familles ont été expulsées et plusieurs autres sont menacées de se retrouver dans la rue. La trêve hivernale, prévue dans la réglementation, n'est plus respectée. Commandités par le procureur de la République, des huissiers de justice ont notifié, ces derniers jours, des décisions d'expulsion», constate Salmi Hakim, président du comité SOS familles expulsées, hébergé par la Ligue algérienne de défense des droits de l'homme (LADDH) qui se fait fort de collecter les dossiers des familles. Pour le président du comité, la situation est catastrophique ces derniers jours. «Pas plus tard que la semaine dernière, nous avons reçu un expulsé de Dély Ibrahim. La personne habite chez des héritiers. Si la demande des propriétaires est légitime, la situation du concerné est intenable, elle nécessite une décision ferme pour surseoir aux jugements de la justice. Des occupants de logements d'héritiers, de l'OPGI ou des logements de fonction ont été destinataires de décisions appliquées sans tenir compte de cette situation exceptionnelle que traversent les villes du centre et de l'est du pays», relève Salmi. A Alger-Centre, un directeur d'un établissement scolaire à la retraite vit avec la peur d'une expulsion. «L'huissier s'est présenté chez moi le 30 janvier, il m'a affirmé qu'il a envoyé plusieurs notifications. Ce n'est pas vrai. J'occupe le logement du CEM Yahia Benaiche à Alger-Centre, où j'étais directeur de 1998 à 2008. Je n'ai pas où aller. Je n'ai pas pu me procurer un appartement où finir mes jours. J'ai été aussi père de sept enfants et père pédagogique de dizaines de milliers d'élèves», relève Abdelkrim Haddam dans un courrier adressé au président de la République, et dont El Watan détient une copie. Agé de 64 ans, Haddam s'indigne de l'indifférence des autorités : «Le Conseil d'Etat a rejeté mon recours notifié il y a cinq jours seulement. Maintenant que tous les recours internes disponibles ont été utilisés et épuisés, il ne me reste plus qu'à saisir la Commission des droits de l'homme, et en ultime recours le président de la République pour redresser cette dérive de la justice», relève le concerné qui vit avec la hantise de se retrouver dans la rue en ces jours de grand froid. Le comité SOS familles expulsées continue de recevoir plusieurs demandes de prise en charge. «Nous recevons constamment des dossiers de familles expulsées oubliées par les pouvoirs publics. Nous avons collecté à ce jour 750 dossiers au niveau national. La part de la wilaya d'Alger est importante avec pas moins de 380 demandes», relève le président du comité. Les autorités ont été approchées. «En 2011, nous avons adressé des requêtes pour 478 cas. Nous n'avons reçu que 3 réponses évasives. Les autorités approchées ne s'engagent en rien», relève Salmi. Le président de SOS expulsion assure que les expulsés souffrent grandement en ces jours de grand froid. «Les expulsés ont reçu des SMS des autorités pour les inciter à voter. Mais ceux qui ont pris la décision ne veulent même pas nous répondre. En plus, une famille expulsée ne peut pas voter, puisqu'elle ne dispose pas d'un certificat de résidence», s'indigne-t-il.