Moscou continue, contre vents et marées, à tenter de sauver son poulain Al Assad. La Russie a annoncé lundi qu'elle étudiait la proposition de la Ligue arabe de déployer une force de maintien de la paix en Syrie en coopération avec l'ONU, mais souhaite plus de précisions sur ce projet. Le chef de la diplomatie, Sergueï Lavrov, a précisé qu'un arrêt des violences entre forces gouvernementales et rebelles armés constitue un préalable à l'envoi d'une force de maintien de la paix. «Nous étudions cette initiative et attendons que nos amis des pays arabes clarifient certains points», a-t-il dit, estimant que ce sera chose faite «dans les jours à venir». «Pour déployer une force de maintien de la paix, il faut l'autorisation de la partie qui la reçoit, tout d'abord. Deuxièmement, pour envoyer une mission de maintien de la paix, comme on l'appelle dans le jargon de l'ONU, il faut qu'il y ait une paix à maintenir», a jugé M. Lavrov. La Russie, principal soutien, avec la Chine, de Bachar Al Assad, a refusé de se ranger aux côtés des Occidentaux pour condamner le régime. Les deux pays avaient, rappelle-t-on, utilisé début février leur droit de veto au Conseil de sécurité de l'ONU pour bloquer le vote d'une résolution condamnant la répression sanglante exercée par le régime de Bachar Al Assad en Syrie. Preuve que Moscou et Pékin sont encore sur la même longueur d'onde : le plus haut responsable de la diplomatie chinoise, Dai Bingguo, a défendu la position de non-ingérence de la Chine dans les affaires syriennes lors d'un entretien avec la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton, a rapporté hier l'agence Chine nouvelle. M. Dai, qui a le rang de conseiller d'Etat (équivalent à un ministre d'Etat), a déclaré au téléphone à Mme Clinton que les violences en Syrie étaient «pour l'essentiel une affaire interne» et que la Chine soutenait les efforts de la Ligue arabe pour résoudre le conflit par des moyens «politiques», a indiqué Chine nouvelle. L'Allemagne et l'Italie aux côtés de la Ligue arabe Le dirigeant chinois a ajouté que cette position, différente de celle de la Ligue arabe dont Pékin avait jusque-là soutenu les actions en Syrie, était «objective et équitable» et relevait d'une «attitude responsable». Côté européen, le ministre français des Affaires étrangères, Alain Juppé, a mis en garde la Ligue arabe contre l'idée d'envoyer des Casques bleus : «Nous pensons qu'aujourd'hui toute intervention à caractère militaire extérieure ne ferait qu'aggraver la situation, d'autant qu'il n'y aura pas de décision du Conseil de sécurité, qui est la seule instance à même d'autoriser une intervention militaire.» «Je ne crois pas qu'avoir des bottes occidentales sur le terrain, quelle qu'en soit la forme, y compris une force de maintien de la paix, soit une voie à suivre en Syrie», a souligné de son côté le ministre britannique des Affaires étrangères, William Hague. «Mais bien sûr, si un tel concept pouvait être rendu viable, nous le soutiendrions de toutes les manières habituelles», a-t-il ajouté, en insistant sur la nécessité d'un «cessez-le-feu crédible». Son de cloche différent en Allemagne et en Italie où les chancelleries appuient l'idée de la Ligue arabe. «Aux yeux du ministère (allemand des Affaires étrangères), la proposition d'une mission conjointe de la Ligue arabe et des Nations unies doit aussi rapidement que possible être soumise au Conseil de sécurité», a estimé son porte-parole, Andreas Peschke. Il y a urgence à «faire cesser en Syrie toute forme de violence et dans ce but» Rome soutient «la proposition de l'envoi dans ce pays» d'une force de maintien de la paix «pour vérifier sur le terrain l'application d'un cessez-le-feu», a déclaré dans un communiqué le ministère italien des Affaires étrangères. Le chef du Conseil national syrien (CNS), principale coalition de l'opposition, a déclaré sur la chaîne de télévision qatarie Al Jazeera voir dans ces décisions «les premiers pas» vers la chute du régime. Sur le terrain, la situation est toujours chaotique. Les bombardements à Homs ont repris hier de plus belle. Des obus de l'armée seraient tombés sur des quartiers résidentiels. Les habitants manquent toujours de nourriture, de soins et de médicaments. Selon la haut-commissaire des Nations unies aux droits de l'homme, près de 300 personnes ont trouvé la mort dans cette ville ces dix derniers jours. «Selon des informations crédibles, l'armée syrienne a bombardé des quartiers de Homs densément peuplés au cours de ce qui apparaît comme une attaque sans discernement contre des zones civiles», a indiqué Navi Pillay.