Le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov a refusé, hier, au lendemain d'une visite à Damas, d'évoquer le départ du pouvoir du président syrien Bachar al-Assad et il a critiqué le rappel d'ambassadeurs arabes et occidentaux de Syrie, une mesure sans logique. M. Lavrov n'a pas voulu répondre à un journaliste qui demandait s'il avait évoqué avec le président Assad l'éventualité de son départ du pouvoir pour résoudre le conflit dans son pays, estimant que toute solution à la crise syrienne devait être décidée par les Syriens eux-mêmes. Toute conclusion du dialogue national doit être le résultat d'un accord entre les Syriens eux-mêmes, acceptable par tous les Syriens, a-t-il ajouté. Nous soutenons toute initiative visant à créer les conditions pour un dialogue entre les Syriens, a souligné M. Lavrov, et c'est ce que doit faire la communauté internationale, que ce soit le monde arabe, l'Europe, les Etats-Unis et d'autres régions du monde.Essayer de déterminer à l'avance le résultat du dialogue national n'est pas l'affaire de la communauté internationale, a souligné le ministre russe. M. Lavrov a estimé aussi que la communauté internationale devait convaincre les parties de se mettre à la table de négociations, affirmant que M. Assad lui avait confirmé être prêt à des pourparlers. Nous comptons sur ceux qui ont une influence sur l'opposition pour l'encourager à commencer un tel dialogue, a encore jugé M. Lavrov. Il a ensuite critiqué la décision de plusieurs pays arabes et Occidentaux de rappeler leurs ambassadeurs à Damas, estimant que cela ne favorisait pas la mise en œuvre de l'initiative de la Ligue arabe pour une solution au conflit syrien. Nous ne comprenons pas cette logique de même que la décision précipitée de geler l'activité de la mission d'observateurs de la Ligue arabe en Syrie, a déclaré le ministre. Je ne pense pas que le rappel d'ambassadeurs crée des conditions favorables pour la mise en œuvre de l'initiative de la Ligue arabe, a-t-il ajouté. Les Etats-Unis ont fermé lundi leur ambassade à Damas pour raisons de sécurité. La Belgique, le Royaume-Uni, l'Espagne, la France, l'Italie et les Pays-Bas ont annoncé le rappel de leurs ambassadeurs pour consultations. Les monarchies du Golfe ont expulsé les ambassadeurs de Syrie de leurs pays et décidé de rappeler les leurs de Damas, pour dénoncer un massacre collectif. Sergueï Lavrov, qui s'est rendu en Syrie, avant-hier, pour y rencontrer Bachar al-Assad, avait déclaré avoir eu une rencontre très utile avec le président syrien, qui a promis de faire cesser les violences d'où qu'elles viennent. Cette visite intervient après le veto de la Russie et de la Chine samedi à l'ONU à un projet de résolution du Conseil de sécurité présenté par les Occidentaux et par des pays arabes condamnant la répression en Syrie. Ce double veto sino-russe a soulevé l'indignation des Occidentaux et de plusieurs pays arabes et a été qualifié de permis de tuer par l'opposition. Assad promet à la Russie de faire cesser les violences Le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, a déclaré avoir eu une rencontre très utile à Damas avec le président syrien, Bachar al-Assad, qui lui a promis de faire cesser les violences d'où qu'elles viennent. Nous avons eu une rencontre très utile. Le président syrien nous a notamment assuré qu'il s'était entièrement engagé à faire cesser les violences d'où qu'elles viennent, a déclaré M. Lavrov, cité par les agences de presse russes, à l'issue des entretiens. Il est clair que les efforts pour faire cesser les violences doivent être accompagnés d'un dialogue entre toutes les forces politiques, a poursuivi le chef de la diplomatie russe. Aujourd'hui, le président syrien a confirmé sa bonne volonté de contribuer à ce processus, a-t-il ajouté. La Russie s'est pour sa part dite prête à continuer à chercher une solution au conflit syrien en se basant sur l'initiative de la Ligue arabe dont le dernier projet prévoit notamment le transfert des pouvoirs du président Assad à son vice-président. Nous avons confirmé notre bonne volonté de contribuer à une sortie de crise sur la base de l'initiative proposée par la Ligue arabe, a déclaré M. Lavrov. Le ministre n'a pas fait de commentaires sur l'avenir du président syrien, alors que plusieurs experts russes avaient estimé à la veille de la visite que le départ d'Assad serait à l'ordre du jour des entretiens. La semaine dernière, M. Lavrov a déclaré dans une interview à la télévision australienne que la Russie n'était pas un allié du président syrien. Nous ne sommes pas un ami, nous ne sommes pas un allié du président Assad. Nous n'avons jamais dit que le maintien au pouvoir du président Assad est la solution à la crise, avait-il souligné. Avant-hier, M. Lavrov a par ailleurs dit que la Russie maintiendrait des contacts avec des opposants syriens, tout en laissant entendre que les Occidentaux étaient mieux placés pour cette mission. C'est ceux qui ont plus d'influence sur l'opposition et qui doivent travailler avec eux, a-t-il dit. Selon M. Lavrov, le président Assad a confirmé qu'il était prêt à envoyer une délégation officielle syrienne à une rencontre intersyrienne à Moscou. Réagissant à l'offre russe, l'opposition syrienne avait exclu fin décembre toute négociation avec le régime syrien avant le départ du président Assad. M. Assad a par ailleurs affirmé au ministre russe que la Syrie voulait que la mission de la Ligue arabe continue de travailler dans le pays et qu'elle soit élargie. La Syrie informe la Ligue arabe qu'elle a intérêt à ce que la mission de la Ligue continue son travail et soit élargie, a souligné M. Lavrov. La Ligue arabe a suspendu la semaine dernière sa mission d'observation en Syrie en dénonçant une recrudescence des violences. Une réunion au niveau ministériel est prévue le 11 février pour examiner les suites éventuelles de cette mission d'observation, qui était destinée à surveiller l'application d'un plan de sortie de crise prévoyant en premier lieu la fin des violences. Les Etats-Unis sceptiques envers les promesses d'Assad à la Russie Les Etats-Unis ont fait part de leur scepticisme envers les promesses faites par le président syrien Bachar al-Assad au ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov et appelé Damas à mettre immédiatement fin à la violence. Lors d'un point de presse, la porte-parole du département d'Etat américain Victoria Nuland a critiqué les nouvelles promesses de réformes démocratiques faites par le président syrien trois jours après le veto sino-russe à une condamnation de la répression en Syrie par les Nations unies. Vous comprendrez que la communauté internationale dans son ensemble soit plutôt sceptique quand on voit qu'au lieu de s'occuper de mettre fin à la violence, Assad ressasse les mêmes propositions qu'il a faites depuis des mois et des mois et des mois, a déclaré Mme Nuland. Le chef de la diplomatie russe a déclaré que M. Assad annoncerait bientôt le calendrier d'un référendum sur une nouvelle constitution. Cette idée a tout l'air d'une nouvelle promesse de la part du régime Assad consistant à agiter un bout de papier à propos d'une élection qu'il peut entièrement contrôler, a estimé la porte-parole américaine. On ne voit pas très bien comment cela pourrait nous rapprocher d'un dialogue national, a-t-elle dit. La Turquie veut organiser une conférence internationale sur la Syrie La Turquie œuvre à organiser dans les plus brefs délais une conférence internationale avec les acteurs régionaux et internationaux sur la crise syrienne, a déclaré, hier, son ministre des Affaires étrangères, Ahmet Davutoglu. Nous sommes déterminés à constituer un forum à base élargie pour une entente internationale avec les pays qui sont préoccupés par la situation en Syrie, pays voisin de la Turquie, a-t-il dit. M. Davutoglu a indiqué que cette conférence pourrait se tenir en Turquie ou dans un autre pays, mais devait certainement se dérouler dans la région et dans les plus brefs délais. La Turquie mène une diplomatie active pour mettre en oeuvre une nouvelle feuille de route pour la Syrie, a dit le ministre. Le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, s'est entretenu, hier, avec le président russe Dmitri Medvedev, après le veto russe et chinois, samedi, à une résolution de l'ONU condamnant le régime de Bachar al-Assad. M. Davutoglu doit de son côté quitter Ankara dans l'après-midi pour se rendre en visite de travail aux Etats-Unis, allié traditionnel de la Turquie, afin d'évoquer le dossier syrien avec Washington. Des dizaines de morts à Homs dans des bombardements Plusieurs dizaines de civils ont été tués, hier, par des tirs des forces de sécurité à Homs, haut lieu de la contestation dans le centre de la Syrie et cible d'un assaut sans précédent depuis cinq jours, a indiqué l'Observatoire syrien des droits de l'Homme. Des miliciens du régime ont en outre tué trois familles entières dans la nuit, a précisé l'OSDH, établissant le bilan total à 50 morts. Nous nous attendons à ce que le bilan soit revu à la hausse (...) étant donné que de nombreuses victimes sont toujours ensevelies sous les décombres, a déclaré Rami Abdel Rahmane, chef de cette organisation basée en Grande-Bretagne. Depuis l'aube les bombardements ont été extrêmement intenses et ils utilisent des roquettes et des (obus de) mortier, a indiqué Omar Chaker, un militant de Homs joint depuis Beyrouth sur un téléphone satellitaire. Selon lui, les bombardements, apparemment destinés à préparer le terrain à un assaut terrestre, visent surtout le quartier de Baba Amr, où certaines zones sont entièrement rasées. L'électricité et les communications sont coupées, rapportent l'OSDH et M. Chaker. Ce dernier a précisé que la nourriture se fait rare et que les militants manquent de matériel médical pour mettre sur pied un hôpital de campagne. Les forces armées ont détruit toutes les infrastructures, bombardé les réservoirs d'eau et les poteaux électriques, dit-il, estimant à 40% la proportion des bâtiments touchés dans ce quartier. Les forces de sécurité ont tiré des balles et des obus, détruisant de nombreux bâtiments dont une maison où une fillette est décédée, selon l'OSDH, ajoutant que les quartiers de Khaldiyé, Karm al-Zeïtoune, Wadi Iran et Bayada sont aussi visés. L'OSDH a fait état de plusieurs centaines de morts ces derniers jours à Homs où les forces du régime ont lancé une violente offensive dans la nuit de vendredi à samedi visant à réprimer la contestation. De nouveaux heurts ont également eu lieu dans la province d'Idleb (nord-ouest), faisant un mort et quatre blessés. Par ailleurs, 18 soldats de l'armée régulière syrienne ont fait défection dans la province de Deraa, berceau du soulèvement populaire contre le régime du président Bachar al-Assad qui a débuté mi-mars 2011.