Les membres de la Commission nationale de surveillance des élections gèlent leurs activités pendant trois jours renouvelables. Ils estiment ne pas disposer des moyens nécessaires pour effectuer leur mission et considèrent que l'Etat méprise cette commission du fait qu'il n'est pas représenté en son sein. Le ministère de l'Intérieur dément, dans un communiqué, ces accusations. La Commission nationale de surveillance des élections (CNSEL) proteste et dénonce un manque de respect à l'égard de ses membres, qui sont des représentants des partis politiques. Ces derniers ont décidé, à la majorité, de geler leur activité pendant trois jours, renouvelables si les pouvoirs publics ne répondent pas à leurs doléances. «Nous ne revendiquons pas de l'argent, mais nous exigeons un peu de respect envers une commission chargée de suivre toutes les étapes du processus électoral», déclare Mohamed Seddiki, président de la CNSEL. Selon lui, la commission est moins biens lotie que celle des magistrats et ne dispose même pas des moyens les plus élémentaires pour faire son travail. M. Seddiki remet ainsi en cause les déclarations faites en grande pompe par le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, Daho Ould Kablia, lors de l'installation de cette commission. Ce ministre, rappelons-le, avait insisté «sur les moyens logistiques importants mis à la disposition de la CNSEL». Selon lui, «les membres de la Commission ne seront, certes, pas rémunérés, comme c'était le cas auparavant, mais ils travailleront dans un environnement et dans des conditions très appropriés et l'Etat mettra à leur disposition tous les moyens nécessaires». Mais il n'en est rien, semble-t-il. Le président de la CNSEL affirme ne pas comprendre ce double langage des pouvoirs publics ni leur désengagement envers une commission où, pour la première fois, l'Etat n'est pas représenté et qui est de surcroît présidée par un parti n'ayant aucune affinité avec le pouvoir. «Pour l'heure, l'Etat ne nous a rien donné ! Nous n'avons ni micro-ordinateur ni internet. On nous a donné un véhicule digne de la ferraille», explique le président de la Commission. D'aucuns estiment que le désintérêt de l'Etat à l'encontre de cette Commission trouve son origine dans le fait qu'il n'est pas représenté en son sein. Si les membres de la Commission se réjouissent de son indépendance totale, ils déplorent en parallèle le comportement des autorités : «Lorsque la Commission était présidée par une personnalité neutre, elle avait pour appellation : Commission nationale indépendante de surveillance des élections. Aujourd'hui, le pouvoir a supprimé le mot indépendant. Nous sommes aussi forcés de croire que l'Etat favorise la commission des magistrats au détriment de celle des partis politiques», regrette encore Mohamed Seddiki, qui se dit persuadé qu'il s'agit là d'une première commission libre et indépendante. Sans le dire explicitement, les membres de la CNSEL n'ont également pas apprécié la suppression des indemnités alors que quand l'Etat siégeait dans cette commission, ses membres avaient droit à une rémunération. «Nous ne pouvons pas enquêter à Tindouf» Pour prouver l'insuffisance des moyens de la commission, notre interlocuteur cite l'affaire de l'inscription tardive de plus de 30 000 militaires sur les listes électorales à Tindouf : «Nous avons voulu nous rendre à Tindouf pour nous pencher sur cette affaire, mais faute de moyens nous avons décidé, pour le moment, de surseoir à cette initiative. Et si le pouvoir ne s'engage pas à revoir sa stratégie envers la CSNEL, nous seront obligés d'opter pour d'autres formes de protestation.» Et d'ajouter : «En tant que fils de moudjahid, je voue un grand respect à l'armée. Nous ne sommes pas contre les militaires. Ce sont de simples citoyens qui ont le droit de voter, mais nous sommes contre la procédure adoptée. Trouvez-vous normal que certaines listes électorales dans plusieurs wilayas du pays Tindouf, Blida, Jijel… ont été rouvertes pour permettre l'inscription de militaires ?» Selon lui, ces militaires devraient être radiés de la liste électorale où ils résident du moment qu'ils sont inscrits sur une autre liste, dans une autre wilaya, et ce, comme le stipule la loi. «Ces militaires n'ont pas respecté cette démarche. Le communiqué du ministère de l'Intérieur et les assurances du Premier ministre ne nous ont pas convaincus. Les lois sont claires et elles n'ont pas été respectées», lance-t-il. «Cette procédure n'est pas légale pour plusieurs raisons. La wilaya de Tindouf compte 45 000 habitants, cela signifie que le nombre d'électeurs ne doit, en aucun cas, dépasser les 22 000 personnes. Or, du jour au lendemain, cette wilaya se retrouvera avec près de 60 000 électeurs. Ce n'est pas logique», tranche Mohamed Seddiki.