Le P/APC de Souidania n'est pas du genre disert : en quelques phrases, il nous résume, en présence de la secrétaire générale et du responsable des services techniques, les problèmes les plus épineux que rencontrent ses concitoyens. A commencer par le chômage qui touche une proportion importante d'une population estimée à plus de 18 000 âmes. Dans cette commune rurale du Sahel, l'essentielle de l'activité est représentée par l'agriculture, l'arboriculture fruitière et le vignoble, deux spéculations qui occupent d'importantes superficies. Certes, des terres du domaine public ont changé de main, d'autres de vocation, se transformant en résidences secondaires ou en véritables petits ranchs privés, et des lotissements ont pris forme dans les exploitations agricoles individuelles ou collectives. Beaucoup de constructions illicites, également, y sont érigées. Toutefois, ces agressions n'ont pas contrarié l'activité de base - le travail de la terre - car les terroirs de Souidania comptent parmi les plus riches de l'ouest algérois. Ils produisent en toutes saisons d'excellents fruits et légumes. On explique cependant que, face à l'accroissement de la population et de ses besoins, la création d'une zone d'activité est inévitable. Le maire, M. Djouadi, estime que la clé des problèmes sociaux réside dans cette réalisation qui va drainer à la fois des ressources pour la commune et des emplois pour la main-d'œuvre inoccupée. Selon le maire, dans cette future zone ne seront tolérées que les activités ayant un lien avec l'agriculture afin de préserver la vocation de la commune et éviter l'expérience désastreuse d'autres communes rurales qui ont été envahies par le béton. L'absence d'activités autres que tertiaires pousse nombre d'adultes - et de jeunes adolescents - à se faire embaucher dans les pénibles travaux du bâtiment, soit sur place, soit à Staouéli, Zéralda, Douéra et Alger. Pour le travail, on n'hésite pas à faire de longs déplacements, malgré les contraintes liées au transport interurbain. Souidania, pourtant desservie par un réseau routier assez dense et relativement en bon état, est en fait enclavée, pour la simple raison qu'il n'existe pas de liaison directe avec les principales localités qui l'entourent, Alger en premier lieu. Il faut transiter par Bouchaoui et Chéraga ou Douéra pour s'y rendre quand, bien entendu, des transporteurs assurent régulièrement leur service. Sinon, il faut recourir aux taxis clandestins... Cette insuffisance en moyens de transport a contraint la commune à s'occuper elle-même du transport scolaire, en particulier pour les lycéens qui sont scolarisés à Douéra, Staouéli et Chéraga. Et la dissémination des hameaux n'aide pas au ramassage. « Bientôt, nous n'aurons plus ce genre de problème, car l'année scolaire prochaine, le premier lycée de Souidania ouvrira ses portes », exulte le P/'APC qui explique que, la construction de cette infrastructure éducative a été l'une des principales revendications de la population depuis au moins deux décennies. L'autre préoccupation concerne le problème du logement social. Des centaines de demandes ne sont pas satisfaites, de grosses difficultés contrarient le démarrage des projets d'habitat et, en prime, Souidania est choisie pour abriter les programmes de logements initiés par les autres communes d'Alger. On nous précise que sur les 50 logements sociaux réalisés en 1997 par l'OPGI, 9 seulement ont profité à des gens de Souidania. « Normal donc que les habitants d'ici désespèrent à obtenir un logement », nous confie un planton de la mairie. Pourtant, de visu, on peut constater l'impressionnant nombre de chantiers de construction de logements à l'intérieur du village et à ses abords immédiats. Au café « où l'on sert le meilleur breuvage de tout l'Algérois », des citoyens confient qu'il y a « beaucoup d'étrangers », des gens d'Alger principalement, qui se sont installés à Souidania, d'abord pour son site agréable et le calme ambiant, ensuite pour le prix correct des terrains. Cette migration a toutefois provoqué l'envolée des prix des lots à bâtir et une spéculation foncière qui se développe en sourdine. Du côté des autorités locales, on explique que cette situation n'est pas propre à Souidania, qui reste, malgré tout, encore préservée des gros scandales qui ont éclaboussé les communes voisines. A cause de l'isolement mais aussi et surtout du caractère agricole de la région, on ne note pas de bouleversements qui laissent à penser que les spéculateurs, la mafia du foncier en premier, aient déjà jeté leurs rets sur la ville. « Nous n'en sommes pas encore là », note un élu qui précise que la commune fait plutôt face à une autre mafia, celle des pollueurs qui déversent quantités de gravats et immondices de toute sorte, le long des chemins isolés de la région.