Pour la commémoration du 56e anniversaire de la mort de Henri Maillot, il manquait quelques-uns des compagnons du chahid tombé au champ d'honneur le 5 juin 1956, comme Mustapha Sadoune, ou encore Georges Acompora, décédé en février dernier dans l'anonymat. Des moudjahidine, des moudjahidate et de nombreux citoyens se sont rassemblés hier au cimetière d'El Madania pour un hommage aux martyrs Henri Maillot et Maurice Laban, militants du Parti communiste algériens, morts les armes à la main aux côtés de leurs compagnons d'origine musulmane. D'ailleurs, le chahid a tenu à préciser, dans une lettre de 1956 qu'il a adressée à la presse parisienne pour justifier son acte de désertion de l'armée française avec un camion chargé d'armes, que s'il n'était pas d'origine musulmane, il n'était pas moins algérien d'origine européenne et que sa place était aux côtés de ceux qui ont engagé le combat libérateur. Des armes dont l'Armée de libération nationale avait tant besoin et que les Combattants de la liberté (CDL), créés à l'initiative du PCA, lui apporteront avec l'opération dirigée par «l'officier félon», comme l'avait qualifié la presse colonialiste. Une opération audacieuse qui vaudra une reconnaissance à titre posthume par l'ALN. Hier, parmi l'assistance, on pouvait relever la présence discrète des généraux Nezzar, Senhadji et Touati, ainsi que celle du président du Conseil économique et social (CNES) Mohamed Seghir Babès aux côtés de représentants de la Wilaya 4 de l'Armée de libération nationale et des représentants de l'organisation des moudjahidine, ainsi que la représentante de l'association d'amitié France El Djazaïr, Mme Odile Djébaïli. Parmi les moments forts de la cérémonie, il y a eu sans conteste la lecture de la lettre d'Henri Maillot et le témoignage émouvant de la moudjahida Mériem Belmihoub-Zerdani, qui a été à l'époque détenue à la prison de Serkadji, ex-Barberousse, à Alger, avec d'autres militantes de la cause nationale, comme Annie Steiner. C'est avec émotion qu'elle raconte comment les femmes prisonnières accompagnaient les condamnés à mort qui marchaient vers la guillotine, entonnant des chants patriotiques afin que la population de La Casbah qui faisait face à la prison sache que les meilleurs des enfant d'El Djazaïr venaient de faire don de leur vie pour une Algérie libre, comme lors de l'exécution, le 11 février 1957, de Fernand Iveton, un autre Algérien d'origine européenne, Mohamed Lakhnèche et Mohamed Ouanoughi. Un jour que les habitants de La Casbah d'Alger ne sont pas près d'oublier, puisque l'administration coloniale a décidé de l'exécution de trois militants de la cause nationale. Tous les intervenants ont insisté pour que la lettre de Maillot soit largement diffusée et pourquoi pas intégrée aux programmes d'enseignement dans les lycées notamment. Une manière comme une autre de fustiger cet ostracisme de l'histoire officielle à l'égard de ces militants algériens d'origine européenne et leur action. Faut-il rappeler que jusqu'à présent, aucun lieu de mémoire ne porte le nom ni du chahid Maillot ni de celui d'Iveton ou de Maurice Laban. Il semblerait que l'APC d'El Madania, après avoir proposé de baptiser le cimetière chrétien du nom de Maillot, ce qui aurait signifié une seconde mort du chahid, par contre, elle semble hésiter à donner son nom à la cité le Confort, comme l'ont proposé la famille, les moudjahine et des citoyens de la commune pour des raisons obscures. Il convient toutefois de signaler que jusqu'à présent, toutes ces initiatives sont restées vaines, en dépit de la bonne volonté de ces citoyens qui souhaiteraient tant pouvoir continuer leur travail de sauvegarde de la mémoire de la guerre de Libération nationale dans le cadre d'une association que l'on s'obstine, du côté officiel, à ignorer.