La gauche l'a emporté, dimanche, comme prévu. Les transformations du paysage politique laissent cependant prévoir des lendemains qui déchantent. Dans le Sud, l'exemple du Vaucluse est un avertissement. Lyon De notre correspondant A droite, on observait avec attention ce qui allait se passer dans le sud de la France au second tour des élections législatives. L'orage extrémiste était une donnée importante des résultats à analyser. Comme prévu, là où les premiers maires du Front national (FN) avaient été élus en 1995, dans le Vaucluse, les premiers députés de ce mouvement sont élus députés en 2012. Signe du destin, c'est à Orange, ville d'art et de culture avec son éblouissant festival lyrique estival, que Jacques Bompard, ancien bras droit de Jean-Marie Le Pen (fondateur du FN) est élu, très largement, puisqu'il bat son challenger socialiste par 58% contre 41%. Sorti du FN, et étant passé par divers mouvements (comme l'ex-Mouvement pour la France de Philippe de Villers), il avait créé il y a trois ans la Ligue du Sud, sur le modèle de la Ligue du Nord italienne. Pour cette élection décisive pour lui, il avait réussi à fédérer autour de lui des cadres UMP, dont son suppléant, maire de la plus grosse commune autour d'Orange. Cette victoire prouve sans doute que les voix de l'UMP se sont largement fédérées autour de lui. En effet, au premier tour, l'autre candidat d'extrême droite, sous l'étiquette FN, avait fait 20%, autant que Bompard. On ne peut donc arriver à presque 60% si on ajoute une bonne partie des 20% qu'avait recueillis la candidate UMP battue au premier tour. Cette explication pour dire que cette élection démontre la possibilité de la porosité des suffrages entre la droite et l'extrême droite. Ce à quoi on ne voulait pas croire jusque-là et qui ira en s'accroissant lors des prochaines échéances. Les deux autres candidats, FN, ceux-là, sont également largement élus. Marion Maréchal-Le Pen, petite-fille du fondateur du mouvement, l'emporte à Carpentras. Une des zones les plus sinistrées de France, où en plus l'immigration est forte. C'est là, dans les années 1990, que la profanation du cimetière juif avait été attribuée sans preuve au Front national. Le président du parti d'extrême droite, Jean-Marie Le Pen, avait alors tout fait pour investir ce territoire, grignotant régulièrement des points, jusqu'à que sa petite-fille décroche la timbale, mettant hors jeu le candidat UMP en place depuis 1986. Dans le Gard voisin, département qui avait le plus voté pour Marine Le Pen à la présidentielle, l'avocat Gilbert Collard est élu sous l'étiquette FN. Par contre la présidente, Marine Le Pen, est battue par le socialiste Kemel dans le Nord. Au premier tour, elle pensait avoir quartier libre après avoir réussi à éliminer l'ex-candidat à la présidentielle Jean-Luc Mélenchon. Hier la présidente du FN avait en tête de normaliser un peu plus encore son parti, pour en faire un mouvement acceptable, à droite de la droite. La crise est toujours là A l'UMP, c'est à Marseille que la plus grosse surprise intervient avec la défaite de Renaud Muselier (UMP), président de l'organisation de Marseille 2013, capitale européenne de la culture. La ministre socialiste Carlotti l'a battu. Ce qui faisait dire hier à l'ancien ministre Xavier Bertrand qu'il fallait «retrouver le P de Populaire dans le sigle de l'UM ». Ce sera là le challenge, en évitant de sombrer dans le populisme qui fait les choux gras de l'extrémisme du FN dans lequel 20% des électeurs français se sont retrouvés depuis le début en mai de cette séquence électorale. L'extrémisme fleurit sur la crise sociale et économique que le vote n'a pas chassé. L'euro, le chômage, le déclassement social, les craintes liées au dérèglement de la mondialisation, la gestion de l'immigration, les pays en dette, autant de réalités toujours présentes. La gauche socialiste devra prouver que la confiance accordée dans les suffrages l'est à juste raison. Le journal le Monde titrait hier après-midi en gras «Les pleins pouvoirs pour François Hollande». Aujourd'hui omnipotente puisqu'elle dirige l'Assemblée nationale, le Sénat, la quasi-totalité des régions, plus de la moitié des départements, les grandes villes, la gauche ne doit pas décevoir. Sinon l'union de toutes les droites fera des ravages aux prochains rendez-vous électoraux, sans aucun jugement moral sur l'extrême droite qui l'empêcherait. Ce sera le retour du bâton. Les électeurs pourront dire qu'ils avaient lancé plusieurs avertissements en 2012.