Didier Lockwood revient à Constantine 28 ans plus tard. Samedi soir, au théâtre régional de la ville des Ponts, le violoniste français a animé un grand concert, invité par le Festival internationale du Dimajazz. Soutenu par trois musiciens à la réputation établie, l'Ivoirien Paco Sery à la batterie, le Mauricien Linley Marthe à la basse, et le Français Jean-Marie Ecay à la guitare. Didier Lockwood a presque arraché les entrailles de son violon. Son expression musicale était intense, vraie et évolutive. «Ce soir, vous allez écouter Bach comme s'il avait pris des verres de whisky ou fumé des choses !» , a-t-il lancé au public en improvisant un morceau. «Un morceau complètement désaxé», nous a-t-il avoué plus tard en coulisses. Selon lui, le compositeur allemand, Jean Sébastien Bach, est une référence pour tous les musiciens du jazz. Le violoniste français fait également des compositions pour la musique classique. Les mouettes a été son premier concerto pour orchestre symphonique. Il a également composé un concerto pour violon pour le violoniste russe, Maxim Venguerov. Journal d'un usager de l'espace est un opéra jazz imaginé par le même Didier Lockwood. Il a eu à accompagner de grands noms, tels que le pianiste américain Dave Brubeck, et le violoniste français Stephane Grappelli. Il a partagé la scène aussi avec d'autres célébrités, comme Mike Stern, Dave Liebman et David Kikoski. A Constantine, Dider Lockwood a interprété Timing twin, un titre dédié à ses jumelles de 26 ans. En solo, il a joué Globe Trotter, une de ses dernières compositions. Sans s'arrêter de jouer, le musicien a quitté la scène, est descendu en salle et monté au premier, puis au deuxième balcons du théâtre régional. «J'aime bien casser la barrière entre la scène et le public», a-t-il dit après le concert. Le violoniste, qui a enchaîné plus de 3500 concerts à travers le monde et produit 34 albums, a repris en donnant une âme bluesy à In a sentimental mood de Duke Ellington. «Ce morceau n'a jamais été joué de cette manière», a-t-il reconnu après le spectacle. Il n'a pas caché son émerveillement pour l'accueil qui lui a été réservé par les Dimajazziens. «Un public sympathique, chaud et connaisseur. Il est bien plus connaisseur qu'en France ou ailleurs. Les Algériens sont des musiciens !», nous a-t-il dit. Il a confié que Paco Sery, Linley Marthe à la basse et Jean-Marie Ecay font partie désormais du nouveau DLG, Didier Lockwood group pour jouer le jazz-rock. «Dans le jazz rock, on avait de la difficulté à mettre de l'émotion. C'est une musique très technique. Aujourd'hui, on garde la même énergie, mais avec une dynamique émotionnelle», a-t-il expliqué. En France, Didier Lockwood a ouvert un centre de perfectionnement en musiques improvisées, destiné aux jeunes musiciens solistes. «Le ministre de la Culture m'a demandé de travailler sur la nouvelle pédagogie musicale qui intègre les musiques de tradition orale. L'improvisation permet à chaque musicien de s'autonomiser et de ne pas être prisonnier de la partition», a-t-il souligné. Il a regretté la baisse des amateurs de jazz, devenu «musique élitiste». «C'est pour cela que je reviens à une forme plus rock. Il faut s'éloigner des complications. Il faut aller vers des choses nouvelles sans couper le lien avec le public. Cela arrive lorsque la forme dépasse le fond. La musique sert à communiquer avec les gens», a plaidé le violoniste français. «Je travaille actuellement sur un film, Les violons du monde. Je vais rencontrer, à travers le monde, tous les violonistes de toutes les traditions, indienne, arabo-andalouse, maghrébine, tzigane, russe, irlandaise, japonaise, américaine...», a-t-il annoncé.