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"faites le bon choix aux prochaines élections !"
Yadh Ben Achour. Ancien doyen de la faculté des sciences juridiques de Tunis
Publié dans El Watan le 24 - 08 - 2012

Yadh Ben Achour, opposant notoire à Ben Ali à la tête de la haute instance de la réalisation des objectifs de la révolution, de la réforme politique et de la transition démocratique, a bien voulu répondre à nos questions. ???
-Plus de 18 mois après la révolution du 14 janvier, quelle évaluation faites-vous de l'état des lieux par rapport aux objectifs qu'elle s'est assignés, notamment la rédaction de la Constitution ? Le rapporteur général, Habib Khedher, vient d'annoncer qu'elle ne sera prête qu'en avril 2013…
La Constituante, pour l'ensemble de l'opinion, a été instituée pour rédiger une nouvelle Constitution républicaine. Mais l'objectif principal était, en quelques mois, de mettre sur pied une Constitution démocratique, assurant à la fois le pluralisme politique et le respect des droits de l'homme. Le rôle de la Constituante devait essentiellement s'arrêter à la rédaction de la Constitution et non pas se transformer en Parlement. Dans le projet de «petite Constitution» élaboré par le Comité d'experts de la haute instance de la révolution, l'expression «pouvoir législatif» n'a même pas été évoquée. La Constitution provisoire préparée par l'Assemblée nationale constituante (ANC), au contraire, a transformé celle-ci en Assemblée législative.
Tous nos problèmes politiques actuels, notamment les changements perpétuels et peu sérieux des échéances électorales, viennent de ce péché originel. Nous avons fait confiance aux actuels gouvernants pour qu'ils respectent l'ensemble de leurs engagements et en particulier le caractère civil de l'Etat et le mandat maximum d'une année fixé par la Déclaration sur le processus transitoire du 15 septembre 2011. Mais grisés par leur succès électoral, ils engagent l'Assemblée nationale constituante dans des fonctions périphériques qui leur prennent énormément de temps, lancent des propositions qui vont à l'encontre de «l'Etat civil», se fient à des «experts» inexpérimentés et orgueilleux qui n'ont pas de formation valable en droit public, désignent un gouvernement qui n'a rien de provisoire et s'octroient des salaires impériaux. Aujourd'hui, cela provoque une crise de confiance. L'Assemblée constituante et l'Exécutif ne sont plus crédibles aux yeux des Tunisiens.
-Certains considèrent que le parti Ennahda cherche un référendum plutôt qu'un consensus sur les questions fondamentales de la Constitution. Qu'en pensez-vous ?
Je ne sais pas si le parti Ennahda cherche réellement, à défaut de consensus, à aller vers le référendum. C'est une option que je n'ai jamais conseillée et contre laquelle j'ai averti un certain nombre de responsables politiques, en particulier le secrétaire général de ce parti, juste avant qu'il ne soit nommé au poste de chef du gouvernement. Tout d'abord, l'opération, en elle-même, est difficile à organiser. Et en cas de vote négatif contre le projet de texte proposé au référendum, que se passera-t-il ? Nous ne pourrons revenir vers la même Assemblée constituante, celle-ci devra partir, car elle aura épuisé sa compétence et n'aura plus aucune habilitation pour reprendre les travaux relatifs à l'élaboration de la Constitution. Que devrait-on faire alors ? Revenir vers la haute instance de réalisation des objectifs de la révolution ? Un nouveau gouvernement provisoire ? Je ne sais pas si on a vraiment conscience des dangers de cette solution référendaire.
-Pour ce qui est des élections, comment expliquez-vous les réticences de la troïka gouvernante par rapport à la formation d'une instance supérieure d'élections ? Suspectez-vous chez la troïka un désir de retour sur l'indépendance du processus électoral ?
Je ne crois pas qu'il y ait vraiment une volonté de revenir sur l'indépendance du processus électoral. C'est pire. Il s'agit, encore une fois, de fautes politiques, de problèmes de gestion de l'Etat et de rigueur des politiques publiques. Que de fois des décisions d'une importance fondamentale ont été annoncées, avant d'être revues et corrigées, puis retirées, pour être reprises sous d'autres formes. Prenez l'exemple de la date des futures élections ou encore celle de la rédaction de la Constitution : tour à tour, le chef du gouvernement, puis le président de la République, puis le président de l'Assemblée, puis le rapporteur général qui, entre parenthèses, n'a aucun droit de parler au nom de l'Assemblée, nous ont annoncé la chose et son contraire pour, de nouveau, rectifier le tir, nous annoncer d'autres échéances. Pour les élections, nous avons eu droit à mars 2013, puis juin 2012, puis fin 2013. Dans quelque temps, on nous annoncera autre chose.
Par ailleurs, les dossiers relatifs au développement et à la justice sociale attendent toujours. Les gens ont donc l'impression que les politiciens au pouvoir se moquent d'eux. Les derniers événements de Sidi Bouzid en sont un témoignage. Bientôt les responsables actuels seront détestés et n'auront plus droit au respect. C'est la pire des choses pour un gouvernement. Il n'existe pas de coordination du travail de l'Etat. Des dizaines de conseillers entourent un Président, courageux et franc, mais dépouillé cependant de tout pouvoir et constituent le gouvernement de Carthage. L'ancien Premier ministère à La Casbah grouille de conseillers, la plupart avec rang de ministres ou secrétaires d'Etat, des gens inutiles qui, au lieu de le faciliter, compliquent le travail gouvernemental. Quelle différence de style (et de coût !) avec celui de l'ancien Premier ministre, Béji Caïed Essebsi. Trois présidents, deux gouvernements et demi, en quelque sorte. On ne peut gouverner sérieusement avec une «troïka» pareille. Cela est bon pour une phase transitoire, de très courte durée.
En fait, le gouvernement de la troïka, dominé par Ennahda, est extrêmement décevant. Jusque-là, il n'a brillé que par sa passivité et la création artificielle de problèmes, comme celui de la charia ou de revirement, par rapport au message de la révolution, comme en matière de liberté d'expression. Regardez, par exemple, comment la gestion de l'affaire des munaqabat de l'université de la Manouba ou celle de la ibdiliyya ont été menées. Regardez ce cinéma de la Zeitouna et de son ubuesque imam Laabidi. Tout cela dénote une incapacité de gouverner et l'absence de véritables hommes d'Etat. Nous avons des responsables qui n'ont fait jusque-là que provoquer de l'agitation dans la société, rien de plus. On bouge énormément, mais on n'avance pas.
-Pour ce qui est de l'instance des élections, il y a un grand différend au sein de la classe politique sur l'origine de ses membres. Pensez-vous qu'il vaudrait mieux qu'ils soient représentatifs de corporations déterminées, comme les magistrats et les avocats, ou qu'ils soient ouverts à toutes les ONG de la société civile ?
Il est impossible d'ouvrir les propositions de candidature à toutes les ONG de la société civile. On n'en finirait pas. Il faudrait inventer un processus collectif qui engage à la fois les trois présidents, en tant que tels, peut-être certaines ONG d'envergure nationale, et l'Assemblée nationale constituante qui procédera à l'élection finale de l'instance électorale. Notre comité d'experts a élaboré un projet en ce sens.
-Si l'on parle maintenant de politique générale, quelle évaluation faites-vous de l'action gouvernementale et comment répliquez-vous à son accusation de l'opposition de freiner les programmes gouvernementaux ?
Il est vrai que le gouvernement actuel ainsi que le parti majoritaire sont victimes d'un certain harcèlement de la presse, des réseaux sociaux, des syndicats et des partis de l'opposition. On peut le déplorer. Mais ils l'ont cherché et n'ont qu'à s'en prendre à eux-mêmes.
-Nous avons fait une révolution pour avoir la liberté et voilà que le débat s'institue autour du sacré avec des projets de lois pénales liberticides punissant le crime d'atteinte au sacré. Adieu la liberté ! Retour au système intellectuel carcéral avec des condamnations à 7 ans de prison pour de jeunes caricaturistes. A-t-on idée de l'énormité de la contradiction ?
Les gouvernants actuels n'ont pas su tenir les rênes de l'Etat, gérer convenablement les affaires. On ne leur fait plus confiance, pour une raison très simple : au lieu de proposer des réformes concrètes politiques et surtout sociales et économiques et de les mettre en application d'une manière ferme, ils n'ont fait que se donner en spectacle, aussi bien à l'intérieur de l'Assemblée constituante que dans les relations entre les composantes de l'Exécutif, comme à propos de l'affaire Baghdadi, de la soi-disant motion de censure, du soi-disant recours à l'article 20 de la Constitution provisoire ou de la controverse improductive autour du gouverneur de la Banque centrale. Ils n'ont su, par ailleurs, qu'organiser des palabres interminables à coups de colloques, de rencontres, de symposiums et de je ne sais quel autre espace de bavardage.
L'étude et la consultation sont une excellente chose, mais c'est pour aller vers des décisions et non pas pour tourner en rond et sans fin. Réfléchissez à ces paradoxes et maladresses de gestion de la justice transitoire : comme par hasard, les victimes des exactions de la dictature vont être indemnisées, pendant que les tortionnaires de Ben Ali courent toujours et que certains responsables de l'ancien régime ne sont ni jugés ni libérés, après plus de 18 mois de détention, ce qui constitue un déni de justice. Ce n'est pas une réussite !
-Quatre différends fondamentaux opposent les constituants de la troïka et de l'opposition : le régime politique, les libertés, l'indépendance de la magistrature et les droits de la femme. Quel est votre avis là-dessus ?
Il ne s'agit pas, au fond des choses, de différends fondamentaux entre la troïka et l'opposition. Cet état des lieux est apparent et provisoire. Il finira par disparaître et se disloquer, au fil du temps. La troïka est une alliance tactique qui n'a pour seul effet que de rendre possible l'institution d'un gouvernement majoritaire. C'est du pur opportunisme politique. La véritable opposition qui dessinera le futur politique de la Tunisie est entre, d'un côté, un parti à référence religieuse qui, quoi qu'il en dise et comme il le prouve hélas de temps à autre, n'abandonnera pas vraiment ses tendances théocratiques et, d'un autre côté, des partis et une opinion sécularisée qui veulent régler le problème de ce monde en fonction des circonstances qui lui sont propres et non pas à partir d'un certain point de vue sur l'au-delà.
-Quelle proposition ou appel faites-vous aux constituants et aux Tunisiens en cette phase de transition ?
Aux constituants, rien de particulier, sauf de finir au plus vite et de s'en aller.Au parti majoritaire de renoncer à ses vieux démons, de construire l'avenir sur un véritable consensus, de revenir à l'esprit du 18 octobre 2005 et d'écarter ses vieilles croûtes. De toute manière, le parti majoritaire actuel va vers une scission incontournable, à plus ou moins long terme. Ce parti comprend des éléments brillants sur lesquels nous pouvons compter, des croyants modernes et intelligents, de véritables hommes d'Etat, en qui nous pouvons faire confiance, ceux qui ont participé à l'élaboration de la plateforme du 18 octobre 2005. En revanche, il comprend également des éléments dits «salafistes» sortis des ténèbres de la préhistoire politique. Ces tendances ne peuvent pas cohabiter, à terme. Le parti Ennahda connaîtra le sort du Refah Partisi turc et ce sera d'ailleurs une excellente chose pour la Tunisie.
A tous les partis de l'opposition, je dis : «Unissez-vous !»
Au peuple tunisien, je dis : «Faites le bon choix aux prochaines élections !», si jamais elles ont lieu !


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