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Le «Consensus d'Alger» et l'actuel débat économique
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Publié dans El Watan le 17 - 09 - 2012

Récemment, une controverse a été enclenchée et a permis à de nombreuses personnalités et institutions de s'exprimer sur la situation économique et les propositions émises par les uns et les autres. De brillants professeurs algériens des meilleures universités canadiennes, le FCE et d'éminents économistes nationaux y ont participé. On peut percevoir une immense satisfaction lorsque des Algériens échangent poliment leurs points de vue. Mais le débat n'a pas toujours été respectueux d'autrui. Rien ne sert de se coller des étiquettes. Dire à un économiste algérien qu'il est un néo-libéral pro-américain, adepte du transfert du modèle US pour l'Algérie est une insulte pour qui connaît la culture, la sensibilité des algériens et le sens du mot «Nif».
Nous allons montrer qu'aucun économiste algérien n'est dans cette catégorie. A mon sens, il faudrait recadrer le débat pour qu'il puisse être plus fructueux dans le futur. Nous allons analyser brièvement l'histoire des idées économiques en Algérie. Le lecteur découvrira avec stupéfaction que les acteurs du débat sont d'accord à 90% entre eux mais préfèrent focaliser sur les différences.
Un bref rappel historique
Durant les années soixante-dix, la vaste majorité des économistes était d'obédience marxiste. Normal ! Le système de formation, les choix politiques du gouvernement, l'expansion du monde socialiste, les statistiques économiques prodiguées par ces pays (pour la plupart tronquées), l'arsenal des outils théoriques très attrayants ; tout concourait vers l'adoption par un très grand nombre du modèle dominant. Mais c'était une période d'intolérance, surtout vis-à-vis d'une minorité qui prônait l'économie de marché (dont je faisais partie). Ces derniers étaient traités de tous les noms : contre- révolutionnaires, alliés de la bourgeoisie compradore, pro-impérialiste, etc. Un débat serein n'était pas possible vu les positions tranchées des uns et des autres. Ce schéma a survécu en s'assouplissant jusqu'à la chute du mur de Berlin et le débat sur les réformes économiques en Algérie.
Le clivage s'est atténué, mais un autre débat surgissait sur le schéma à adopter. Les ex-économistes de gauche préconisaient une «économie de marché public» ; c'est-à-dire les entreprises d'Etat devaient être le moteur principal de la croissance. Il faut alors leur affecter plus de ressources. Les ex-économistes «de marché» préconisaient un développement tiré par un secteur privé dominant. Les deux acceptent, durant la phase de transition, que l'Etat puisse fixer des orientations stratégiques, disposer d'entreprises publiques imposantes et de services publics. Ils étaient aussi d'accord sur la politique sociale, la participation de tous (syndicats, patronat, citoyens), la formation, la santé et les transferts sociaux qui devraient être disponibles pour tous et de bonne qualité. Ils étaient d'accord sur tout sauf sur le périmètre du secteur public. Les adeptes de l'économie de marché voient mal l'Etat gérer des entreprises d'agroalimentaire, de tourisme, etc.
Le PAS et le FMI n'ont pu trancher sur la question. Le gouvernement jouait sur cette différence avec beaucoup de maladresses. Lorsque les énormes ressources injectées dans le secteur public n'avaient pas empêché la désindustrialisation et la faillite de nombreuses entreprises, un nouveau consensus algérien émergeait vers le début de l'an 2000. Il y a beaucoup à dire sur le pourquoi de cet échec. En 20 ans, l'industrie est passée de 18% du PIB à 6% malgré l'injection d'énormes ressources (les chiffres varient de 60 à 120 milliards de dollars). Après de nombreux débats entre économistes algériens, la différence s'est rétrécie et nous pouvons parler d'accord minimal entre économistes algériens que nous appellerons «Consensus d'Alger» parce qu'il est à cent mille lieues du consensus de «Washington» ; même si le gouvernement est resté en décalage par rapport à ces développements.
Le «consensus d'Alger»
Après maints débats et les expériences nationales et internationales vécues, les économistes et la vaste majorité des analystes algériens sont arrivés au consensus suivant :
1. Le schéma le plus prometteur, celui qui se rapproche le plus de notre culture et de nos valeurs demeure le modèle de la social-démocratie. Cependant, il faut réaliser les adaptations culturelles et sociologiques nécessaires.
2. Nous avons besoin d'un Etat intègre, fort, stratège, régulateur et qui se concerte avec toutes les parties prenantes (syndicat, patronat, ONG, citoyens).
3. La stratégie conçue par l'Etat en concertation doit être empreinte d'une connotation sociale : l'éducation, la santé, un minimum de couverture sociale, l'environnement, le bien-être pour tous, la justice et le respect des droits de l'homme se situent au cœur du consensus.
4. On ne doit pas faire de distinction entre entreprise privée et publique : elles seront soutenues et on appuie les plus performantes. Probablement, nous irons vers le schéma social-démocrate : une économie à dominante privée mais bien encadré par un Etat intègre, visionnaire et stratège. Cependant, les entreprises publiques stratégiques (Sonatrach, Sonelgaz, Air Algerie, SNTF, etc. doivent demeurer à 100% publiques).
5. Il faut promouvoir au sein des entreprises et des institutions publiques un management participatif, qui mobilise les cerveaux de tous (cadres, travailleurs, syndicat, experts).
6. L'intégration et l'ouverture à l'économie mondiale doivent être progressives, orientées de sorte à canaliser les IDE là où il y a apport technologique et managérial. Le développement se fera surtout par les entreprises algériennes, en priorité dans les secteurs d'activités dans lesquels nous disposons d'avantages compétitifs internationaux et ceux qui permettent le développement du marché national.
7. Nous devons mobiliser avant tout notre diaspora : les chefs d'entreprise, les chercheurs et toute personne susceptible de contribuer à plein temps ou à temps partiel pour relever le défi de la modernisation économique.
8. Décentralisation : nous devons permettre aux algériens de régler les problèmes locaux et régionaux à leur niveau, après les avoir qualifiés. L'excès de centralisation pénalise le pays, aboutit à des règles coûteuses et inopérantes.
9. Les politiques macroéconomiques de pure rigueur ne conviennent pas à notre pays, nous avons au contraire besoin de financer l'éducation, la santé, la croissance, l'environnement et opérer un rattrapage économique rapide.
10. Il faut créer une économie performante hors-hydrocarbure appuyée sur un système d'éducation moderne, des institutions fortes et efficaces, un management performant, populariser les TIC et encourager les partenariats qui concourent à ces objectifs.
Ce qui reste à approfondir
Après l'an 2000, les débats tournaient surtout sur deux points : le mode opératoire et comment greffer certaines dispositions religieuses (banques islamiques) sur ce schéma. J'ai rarement vu ces dernières années un économiste algérien qui développe des idées en-dehors de ce «modèle». Le fait que le gouvernement agit selon une tout autre manière n'enlève rien au mérite des économistes algériens d'avoir développé un consensus de plus de dix ans sur la manière de dire et de faire. Certes, on peut trouver exceptionnellement et accessoirement un économiste algérien qui veut encore réaliser la dictature du prolétariat ou un schéma libéral à la Hayek et Friedman, mais ce serait vraiment des exceptions très rares. De temps en temps, un analyste préconise une bonne pratique inspirée d'un pays : la décentralisation des APC aux USA, la nomination des managers publics en Chine, le management de la qualité chez Toyota, la cogestion en Allemagne. Mais la personne en question serait en général loin d'être pro-américain ou pro-chinois.
Chaque pays a ses caractéristiques et les généralisations trop abusives sont en général néfastes. Aux USA, il y a peu d'Etat, en Algérie trop d'Etat, en Suède et Allemagne le juste milieu. Par ailleurs, il y a beaucoup de travaux sur la relation entre la culture locale et les systèmes économico-politiques (Rieger). Le modèle anglo-saxon conviendrait peut-être plus à une culture plus individualiste, plus réceptive au risque. Une culture de partage et de minimum de prise de risque s'accommoderait plus d'un système social-démocrate. Nous sommes loin d'avoir une culture cohérente avec le système anglo-saxon. Nos économistes l'ont compris. Le récent débat qui paraît utile à la surface nous ramène trente ans en arrière où le fossé entre économistes socialistes et adeptes d'économie de marché était énorme. Nous avons quand même fait d'immenses progrès dont il convient de sauvegarder les acquis. Il n'y a pas de courant pro-américain ou d'adeptes de la dictature du prolétariat. Ce sont des pures inventions (version hommes de paille) de personnes coupées des réalités et des débats nationaux.
Les pratiques et les analyses du gouvernement sont une chose ; les idées des économistes indépendants en sont une autre. J'ai l'impression que tout le monde est presque d'accord, mais on continue à accuser autrui d'être un intégriste. Par ailleurs, la vaste majorité des institutions et des ONG continuent d'appuyer le «consensus d'Alger». Lorsque le FCE ou le syndicat formule des recommandations (les 50 propositions du FCE), c'est une plateforme de négociations. Par exemple, lorsque le FCE avance la proposition de laisser l'entreprise disposer de 100% de ses recettes d'exportations, en réalité il en espère 50% tout au plus, mais il brandit cette proposition comme outil de négociation pour la prochaine tripartite. S'il en proposait 50%, l'Etat va lui en octroyer 30% tout au plus. En résumé, les analystes algériens ont beaucoup progressé dans leurs réflexions.
Le «Consensus d'Alger» est accepté par la vaste majorité des économistes et des institutions. Le gouvernement demeure décalé par rapport à ces principes. Alors, me semble-t-il, ce débat venu et imposé d'ailleurs est en retard de trois décennies. Nous sommes au stade de discussion des modalités d'application : comment structurer l'Etat ? quel type de réformes éducatives sont nécessaires ? quels ordonnancements choisir, etc ? Les généralités sont tranchées. On sait que le gouvernement est en décalage sur ces questions par rapport à la société. Mais les analystes ont produit un remarquable travail et un consensus que nul n'a le droit de nier ou de se l'approprier à lui seul. Personne n'a le monopole de l'équité sociale, de la défense de l'environnement, de la promotion de la santé, de l'éducation, du transport, du bien-être pour tous, de la protection de l'environnement et de la participation de tous : c'est un patrimoine culturel de la vaste majorité des algériens. Nul n'a le droit de se l'approprier à lui tout seul.


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