Les autorités françaises se sont montrées peu prolixes sur cette dernière action d'éclat. Kidal était jusque-là le fief d'Ançar Eddine, dirigé par l'ex-rebelle touareg Iyad Ag Ghaly qui a fini par s'allier au début du mois à Al Qaîda au Maghreb islamique (AQMI) et au Mouvement pour le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao). Mais depuis une dizaine de jours, la ville est contrôlée par des éléments du Mouvement national pour la libération de l'Azawad (MNLA) et ceux du Mouvement islamique de l'Azawad (MIA), un groupe dissident d'Ançar Eddine. Le MIA a assuré rejeter le terrorisme et prôner une «solution pacifique» à la crise.Dans toutes les villes reconquises, les soldats français ont toujours pris soin d'apparaître aux côtés de militaires maliens, à qui ils laissent le soin de patrouiller les rues. Mais à Kidal, le MIA et le MNLA ont affirmé leur vive hostilité à la présence de soldats maliens, craignant des exactions contre les communautés arabe et touareg. Et c'est sans doute la raison pour laquelle les militaires français y sont allés seuls. Et, cette fois, plutôt que d'utiliser la force, ils ont préféré privilégier le dialogue. L'«approche» semble avoir été un succès puisque celle-ci se soldera par des rencontres avec des membres du MNLA, le secrétaire général du MIA, Algabass Ag Intalla, et des notables locaux. En revanche, les choses se sont passées, mardi, différemment à Tombouctou où, affirment des sources locales, a été décrétée ouverte la chasse aux «Arabes» et aux «Touareg». Une guerre sans bilan et sans images Quid justement du bilan de la guerre ? Depuis le déclenchement des hostilités le 11 janvier, aucune statistique se rapportant au nombre de tués, de blessés ou encore de prisonniers n'a pu être obtenue de source indépendante. Les armées française et malienne verrouillent en outre plusieurs accès dans le pays, compliquant la possibilité de constat sur le terrain. «Nous comptons le nombre de pick-up détruits et nous multiplions par le nombre de combattants qui s'y trouvaient probablement pour avoir une estimation à peu près crédible», a expliqué le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, au quotidien français le Parisien dans son édition de mardi, sans toutefois préciser cette évaluation. Interrogé, le ministère français de la Défense s'est aussi refusé à toute précision. Avant la guerre, les éléments des groupes armés alliés à AQMI dans le nord du Mali étaient estimés à plusieurs milliers d'hommes. Selon des informations parcellaires recueillies par la presse française, quelques centaines d'entre eux auraient déjà été tués dans des combats ou bombardements au lendemain du début des hostilités. Au-delà de la problématique liée au bilan de la guerre et maintenant que le gros des villes du Nord-Mali a été libéré, l'armée française (et celle des pays de la région) – qui n'a pas eu à trop souffrir jusque-là – sera véritablement jugée sur sa capacité à traquer et à porter le coup de grâce aux groupes terroristes qui ont occupé l'Azawad durant près d'une année. A ce propos, des sources sécuritaires maliennes soutiennent que les principaux responsables des groupes répertoriés comme terroristes, parmi lesquels Iyad Ag Ghali et Abou Zeïd, un des émirs d'AQMI au Sahel, se sont réfugiés dans le massif des Ifoghas, montagnes au nord de Kidal. Une zone que l'armée française s'apprête, dit-on d'ailleurs, à bombarder. Le Mali étant désormais hors de danger, les Etats-Unis ont rappelé à la France que la crise malienne devait aussi se régler politiquement, notamment via des élections. Le message semble avoir été bien entendu puisque les députés maliens, se projetant justement dans l'après-guerre, ont voté mardi la mise en place d'une «feuille de route», prévoyant des discussions avec certains groupes armés dans le cadre de la «réconciliation nationale». Le président malien Dioncounda Traoré a, de son côté, déclaré espérer des élections avant le 31 juillet. Le tout, maintenant, est de savoir si Bamako souhaite vraiment une solution durable au problème récurent de l'Azawad. Car, dans le cas contraire, il est à parier que le Mali se retrouvera encore dans 5 ans avec une nouvelle rébellion sur les bras.