Akal Didammen, (La terre et le sang), est la nouvelle pièce du Théâtre régional de Tizi Ouzou mise en scène par Omar Fetmouche, d'après l'œuvre de Mouloud Feraoun. Elle a été présentée mercredi soir au Théâtre régional de Batna, à la faveur du 5e Festival national du théâtre amazigh qui se déroule jusqu'au 18 décembre. Le dramaturge est resté en grande partie fidèle au roman paru en 1953. Ainsi est narrée l'histoire de Amar (Malek Fellag) qui revient de France à Ighil Nezman, son village natal en Kabylie, avec Marie (Hacid Kamilia) dans ses bagages. Marie est la fille de son oncle Rabah, mort dans des conditions ambigües dans les mines de France. Amar engage une liaison avec sa cousine Chabha (Kahina Ounnar), épouse de Slimane (Massinissa Benaliouane). Chabha n'arrive pas à enfanter. Hmama (Farida Saber) et les autres mégères du village colportent les nouvelles de «l'amour interdit» et se moquent de la stérilité de Slimane. Dans son roman, Mouloud Feraoun a voulu mettre en avant le poids des traditions dans la société kabyle, l'importance d'avoir des héritiers. Le Tajmaât est également présent dans cette œuvre et sur scène. Autant que le recours à la zaouia et au cheikh prêcheur de bonnes paroles (il est supposé guérir le mal de la stérilité). Omar Fetmouche a appuyé la scène de la zaouia par le chant rituel porté par les chœurs et le bendir. Manière probablement de folkloriser ces pratiques qui, pour les uns, relèvent du sacré, pour d'autres du charlatanisme. Le passage d'une scène à une autre est assuré par un chanteur-guitariste (Abdelkader Ararby). Il est également narrateur. Mais ses entrées et sorties sur scène ont alourdi la pièce. La narration aurait pu se faire autrement. Il est vrai que le recours au chant de voix vive donne une touche contemporaine à l'expression scénique, à condition de ne pas en abuser. La chorégraphie de Sarah Bouzar a ajouté une couleur très actuelle au spectacle. Ce n'est pas une mauvaise idée. Cela dit, la scénographie classique (représentation d'une maison dans un village kabyle) est restée quelque peu figée par rapport à une pièce à rebondissement dramatique. Le metteur en scène s'est appuyé sur les musiques de Bazou pour souligner l'évolution de la pièce (la rivalité entre Amer et Slimane se termine dans le sang). Il y a fatalement toujours un risque d'adapter une œuvre littéraire, écrite dans un contexte historique particulier, aux planches. Omar Fetmouche a pris ce risque. Cela relève du courage...