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Six pieds sous terre au CHU Mustapha Pacha
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Publié dans El Watan le 03 - 01 - 2014

Dans l'imaginaire populaire, ils ont les yeux et les mains plongés dans les entrailles d'un corps ouvert. Et pourtant, ces médecins que l'on croise le plus souvent dans les séries policières reçoivent aussi bien les morts que les vivants. En faisant la lumière sur les enquêtes judiciaires, les médecins légistes contribuent à un idéal de justice, parfois fragile en Algérie.
«L'homme allongé sur la photo a créé la mise en scène d'un meurtre pour masquer son suicide. Il a frappé à l'aide d'un marteau, un bâton positionné au niveau de la gâchette. On a ici tout le génie de la pensée humaine.» Reste à savoir pourquoi l'homme dont on ne distingue ni le visage enfoui sous un oreiller ni les éclats de sang éparpillés après l'impact, aurait simulé la scène d'un meurtre. Vêtu de sa blouse blanche, un petit sourire en biais, le professeur du service de médecine légale du CHU Mustapha, le professeur Rachid Belhadj, répond brièvement : «Il s'agit là du travail des enquêteurs.» En effet, c'est là que s'arrête l'histoire de la médecine légale, quand le rapport d'autopsie se retrouve entre les mains du procureur général et que la police reprend l'enquête. Si le secret médico-légal reste confiné à la morgue et suscite de loin la curiosité, la profession n'attire pas pour autant les étudiants. «Pour les étudiants, la médecine légale ne rapporte pas assez financièrement. Et elle se pratique difficilement dans les cabinets privés plus rémunérateurs», estime le professeur Madjid Bessaha, ravi que l'on s'intéresse à une profession «marginalisée». Son costume de directeur du programme des soins, de l'éthique et de la déontologie médicale au ministère de la Santé et ses cheveux grisonnants témoignent de ses 35 ans d'expérience. «Et dire que du haut de mes 50 ans, on me considère encore comme un jeune professeur, c'est une aberration. Des chefs atteignant l'âge de 80 ans refusent la transition générationnelle en retardant la validation d'une thèse sur plusieurs années, j'ai personnellement attendu dix ans !», affirme le professeur.
Carences
La médecine légale souffre des symptômes qui lui ressemblent. Et le manque de personnel en est un, avec des conséquences non négligeables pour les familles. «Pour devenir expert auprès des tribunaux, il faut cinq ans de pratique. Une femme qui avait 4 ans et 10 mois d'expérience a divisé la commission juridique à cause des carences de personnel chez les médecins légistes. Passé l'été, la candidate a finalement reçu notre avis favorable afin que si le ministère de la Justice lui donne ensuite l'agrément, elle puisse prêter serment auprès de la cour. Et c'est aussi en été que les médecins légistes prennent congé, que les autopsies s'accumulent et que les permis d'inhumation fournis par le parquet sont remis tardivement», explique une juge. «Les gens veulent enterrer rapidement leur proche pour le rendre au Divin, alors qu'une autopsie demande du temps, c'est un problème culturel», affirme le professeur Belhadj. La répartition inégalitaire des grands budgets hospitaliers de l'Etat discrimine en particulier le service de médecine légale. «Quand je me plains, la direction me dit d'attendre. J'ai parfois l'impression que cette situation est voulue», affirme le docteur H. sous le couvert de l'anonymat. «Les médecins ont, dans la loi, une obligation de moyens et non de résultats. Je signifie donc en réserve dans le rapport d'autopsie que je n'ai pas pu effectuer certains examens complémentaires faute de moyens. Le problème dans tout cela, c'est qu'on aboutit à des autopsies partielles qui peuvent fausser les enquêtes. Des innocents peuvent manquer de preuves, voire se retrouver en prison», affirme le docteur H. «Il y a aussi les cas de corruption, affirme le professeur Belhadj. On a eu le cas d'un médecin légiste qui a touché des pots-de-vin pour camoufler une possible affaire de meurtre. Quand la victime supposée est vivante, il arrive que le médecin lui accorde une incapacité totale de travail majorée à plus de 15 jours afin qu'en vertu de la loi, le coupable présumé se retrouve en prison.» «Le médecin légiste ne doit pas exercer seul non plus, car une erreur de diagnostic peut provoquer un drame familial», affirme de son côté le docteur H.
Violences
Le docteur H. affirme recevoir trois à quatre femmes battues par jour. «Le fait est que l'Algérie ne s'est intéressée que très récemment au problème de violence. A l'époque, j'avais choisi un sujet de thèse sur le thème de la femme battue. Le conseil scientifique ne m'a pas pris au sérieux et a refusé ma thèse», affirme-t-il. Les médecins légistes peuvent aussi rencontrer des obstacles en période de guerre. Les défenseurs des droits de l'homme ont, des années durant, dénoncé les pressions perpétrées par la caste militaire sur les médecins légistes pendant la décennie noire, en vue d'obtenir de faux certificats de décès par crise cardiaque pour enterrer secrètement les cadavres suppliciés. «Dans toutes les affaires politiques, il faut s'attendre à des pressions. Ces cas sont probables, mais on peut rarement les prouver», affirme le docteur H. «Nous avons mené des expertises lors des attentats de l'aéroport Houari Boumediène et de la Maison de la presse. On ne pouvait pas examiner tous les corps, mais on recensait néanmoins le nombre de morts et déterminait la cause des blessures causées par les déflagrations. Cependant, aucun cas de torture n'est arrivé chez nous.»
Disparus
Les corps des disparus sont nommés sous X et accompagnés d'une fiche d'identification détaillée, précisant les signes particuliers comme le henné et les tatouages. «On ne met jamais de X algérien, car il se peut que l'individu retrouvé soit un immigré. C'est peut-être pour cela que certaines personnes ne reviennent jamais aux mains de leur famille», affirme le professeur Bessaha. Il arrive parfois dans ces circonstances que les médecins fassent des rencontres surprenantes. «Lors des inondations de Bab El Oued, un homme a déclaré qu'une défunte était sa fille pour bénéficier des 700 000 DA de dédommagement. Cet homme avait sillonné le pays avec l'image du corps qu'il avait vu en suivant de près l'actualité. Au service d'identification, on lui a demandé si elle avait des signes particuliers, il nous en a donné dix. Lorsqu'on a exigé le livret de famille, il a répondu qu'il était en possession de sa femme, absente pour assister à un mariage. Comment une mère qui vient de perdre sa fille il y a quatre jours peut-elle aller à un mariage ?», raconte le professeur Belhadj. Interrogés sur la position sensible qu'ils occupent dans la société, les médecins légistes ont communément affirmé l'importance de leur rôle dans la pérennité des droits de l'homme en Algérie. «La médecine légale se développera sainement en Algérie avec le développement de la démocratie et des droits de l'homme», conclut le professeur Bessaha.


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