L'offensive terrestre de l'armée israélienne dans la bande de Ghaza, lancée depuis le 5 juillet dans le nord de ce territoire palestinien, dont le bilan provisoire est de 40 Palestiniens tués et plus de 200 autres blessés, semble bien loin d'être terminée. Des sources israéliennes ont indiqué que cette opération militaire peut s'étaler sur plusieurs mois. L'appel lancé aux réservistes confirme cette éventualité. Comme de coutume dans ce genre d'agression, les civils sont les principales victimes de la barbarie israélienne. Un véritable drame a été vécu par la population de la bande de Ghaza et celle du quartier Chedjaiya à l'est, samedi en fin d'après-midi, lorsqu'un engin explosif israélien est tombé à l'intérieur de la maison et a décimé la famille Hadjadj, dont la maman, sa petite fille de 6 ans et l'un de ses fils âgé de 22 ans ont été tués, alors que le père et trois autres enfants ont été gravement blessés. La vue des corps déchiquetés et calcinés des morts ainsi de ceux baignant dans le sang des blessés a suscité un émoi et une tristesse profonde parmi la population. Les Palestiniens ont dénombré 9 autres morts cette journée. Un a été retrouvé dans les champs de Beit Lahia au nord, trois sont des blessés de cette même région, ayant succombé à leurs blessures. La région de Beit Lahia, qui comporte la ville ainsi que de vastes terres agricoles et des petites localités telles El Aâtatra, Salatine et le village bedouin, a été le principal champ d'action de l'armée israélienne durant les premières 48 heures de l'invasion. Beaucoup de morts et de blessés, enregistrés lors de cette phase de l'agression israélienne, dont les séquelles sur la population, sont innombrables. La visite de cette région d'où les troupes israéliennes ont effectué un repli tactique samedi, puisqu'elles ont pris position dans les anciennes colonies, permet de mesurer l'ampleur des dégâts causés lors de cette meurtrière incursion, évalués à plusieurs dizaines de millions de dollars, enfonçant encore plus la bande de Ghaza dans sa crise économique. Des terres agricoles dévastées, des conduites d'eau potable et d'évacuation éventrées, des puits à creuser de nouveau, des centaines de maisons partiellement ou totalement démolies et surtout des histoires cauchemardesques vécues par des familles entières. Abou Ahmad El Aâtar, un homme âgé de 50 ans, père de 8 enfants, assis, ainsi que certains membres de sa famille, à l'intérieur de ce qui fut le jardin de sa maison, semblait éprouvé et fatigué nous a dit : « Ils ont dévasté la terre qui me faisait vivre ainsi que ma famille. Regardez les impacts des tirs sur les murs. Toutes les vitres ont été brisées. Le mur du jardin a été démoli par les bulldozers. Ils sont arrivés la nuit du 5 juillet et nous ont tous bloqués dans une des petites chambres du rez-de-chaussée, en nous injuriant et en nous menaçant par leurs armes. Nous sommes restés près de 48 heures sans nous laver. Ils ont tout saccagé à l'intérieur de la maison où certains d'entre eux ont pris position. Mais je suis plus chanceux que mon cousin qui est mon voisin ; lui, il a perdu son fils aîné lors d'un tir d'obus contre leur maison. Ma vie est à refaire, j'avais mis toutes mes économies dans la terre dont il ne reste rien. Ils ont détruit le puits, les conduites d'eau, les serres. Ce sont des punitions collectives, car toutes les terres de la région ont subi le même sort... » L'histoire de la famille El Aâtar se répète parmi des dizaines de famille de cette localité, située à moins d'un quart d'heure, en voiture, du centre de la ville de Ghaza, ce qui veut dire que toute la population de la ville et des périphéries a vécu cette atmosphère de guerre véritable. Les uns étaient directement ciblés, le reste, inquiet de voir l'invasion s'élargir à leurs localités, observait et entendait de loin les explosions des obus, des roquettes ou les tirs des mitrailleuses lourdes. Même le lexique des enfants palestiniens, les plus jeunes d'entre eux aussi a changé. Les mots avion, bombardement, explosions, mort dominent leurs discussions. Ahmad, un enfant de 5 ans qui vit en ville, donc indirectement affecté par ces événements, ne cesse à longueur de journée de poser des questions à ses parents sans recevoir de réponse qu'il peut concevoir, a fini par demander à son père de lui acheter une arme afin qu'il fasse exploser l'hélicoptère israélien qu'il voit sans cesse tirer et lancer des roquettes sur les gens. Le secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, a plaidé samedi pour la levée des restrictions sur les agences de l'ONU dans les territoires palestiniens, appelant les « deux » parties a « la plus grande retenue ». Enfin, il renouvelle son « appel aux parties concernées pour qu'elles exercent la plus grande retenue et respectent leurs obligations en vertu des lois humanitaires internationales ». Ainsi le secrétaire général de l'ONU met les deux parties sur un pied d'égalité dans leurs responsabilités du drame que vit la bande de Ghaza, une mascarade qui devrait cesser au plus tôt, car aucune comparaison n'est possible entre l'occupant et l'occupé.