Dans son œuvre inspirée des traces de son enfance, en Kabylie maritime, Salah Oudahar revient sur des faits qui interrogent la mémoire. Dans le cadre des activités du Festival de la chanson amazighe, Salah Oudahar donnera un récital poétique et musical, ce mardi, au théâtre régional de Béjaïa. Le poète déclamera ainsi, en compagnie du musicien Bazou, des vers dont la teneur est profondément puisée de la réalité du terrain, en remettant au goût du jour un aspect socioculturel consubstantiel avec l'histoire. Il s'agit, en effet, du récital intitulé Les témoins du temps, où Salah revient sur des faits qui interrogent la mémoire comme les ruines. L'œuvre de l'artiste est intimement inspirée des traces de son enfance dans sa commune natale, Iflissen, dans la daïra de Tigzirt, en Kabylie maritime. Il évoque aussi la guerre de Libération nationale, le passage des Phéniciens et des Romains dans sa région. D'ailleurs, beaucoup d'auteurs et journalistes ont salué notamment l'initiative de Salah Oudahar, qui a réussi à sauver un patrimoine voué inexorablement à l'oubli dans une région chargée d'histoire. Des textes accompagnés d'illustrations seront également exposés dans le même sillage à Béjaïa, afin que l'artiste puisse livrer au regard du visiteur des images pour décrire des temps lointains. «Par sa poésie qui tente de saisir l'insaisissable, qui essaie de nous dire l'indicible, Salah parvient à faire passer une émotion vraie d'un simple mur de pierres, d'un vague reste de maisons, d'une photographie usée par le temps. C'est la vérité de cette émotion qui est la vérité ultime de la ruine. Il n'y a pas de vraies ruines sans vrai cœur pour les faire battre ; sans vrai cœur pour les faire battre, il n'y a que des pierres stériles, empilées par le hasard. Cette leçon, il l'a retenue de son père qui était tailleur de pierres. Salah Oudahar, à une génération de distance, a retrouvé le geste ancestral qui donne leur sens aux choses : comme son père avant lui, d'un caillou posé là, il fait une œuvre pétrie d'humanité et de vérité. C'est en façonnant par le cœur la matière brute, minérale, que l'un et l'autre apportent leur pierre à l'édifice de l'humanité toute entière. L'un comme l'autre, mais chacun selon son art, construisent notre maison commune», écrit Y. Balangier, auteur. «De son histoire, des chemins qu'il a défrichés, des bifurcations qui l'ont détourné, des haltes qui l'ont accueilli, Salah Oudahar laisse entrevoir quelques bribes, quelques éclats. Il a décidé de ne pas écouter les rhéteurs, plutôt interroger les pierres, celles d'hier et d'aujourd'hui», note l'écrivain et journaliste Yahia Belaskri. Par ailleurs, notons que Salah Oudahar, diplômé de sciences po, est directeur artistique de l'association Strasbourg-Méditerranée où il coordonne des actions culturelles sur les thèmes de l'histoire et de la mémoire. Il sera, cette semaine, l'hôte du Festival de la chanson amazighe organisé par le comité des fêtes de la ville de Béjaïa qui active sous la coupe d'un musicologue, Malek Bouchbah en l'occurrence.