La nouvelle de l'hospitalisation du président cubain Fidel Castro pour « crise intestinale » a relancé dans les milieux de l'opposition au régime, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du pays, le débat sur l'après-castrisme. Les précautions de style dont le gouvernement cubain s'est entouré, insistant sur le caractère « provisoire » de l'éloignement du pouvoir de Fidel Castro, n'ont pas empêché les spéculations les plus folles de circuler. Certaines sources « bien inspirées » ont même donné le leader cubain pour mort. La santé du président cubain, qui a toujours constitué un secret d'Etat, une question de sécurité nationale pour le régime cubain, est scrupuleusement protégée. Aucune image du président cubain ne sera diffusée par la télévision unique cubaine depuis son hospitalisation. Du haut de ses 80 ans, qu'il fêtera le 13 août prochain, Castro, qui bat tous les records de longévité dans l'exercice sans partage du pouvoir avec près de 48 ans de règne ininterrompu, a toujours cultivé autour de sa personne le mythe de la légende. Son passé révolutionnaire le prédestinait tout jeune déjà à un destin national. Il n'avait que 26 ans lorsqu'il avait fait son premier grand coup de feu, en 1953, en s'attaquant avec un groupe de partisans « barbus » à la deuxième plus grande caserne du pays, la Moncada, avant de se lancer, quelques années plus tard, à l'assaut du pouvoir, en renversant le régime dictatorial de Batista. Castro a survécu à toutes les bourrasques qui ont traversé son siècle. Il a vu défiler une douzaine de présidents américains, survécu au plus long blocus des temps modernes, qui dure depuis 1962, au prix, il est vrai, de dures privations pour son pays et son peuple. Il fut témoin et directement ou indirectement acteur de certaines crises internationales majeures dont son pays fut le théâtre à l'épreuve de la guerre froide. Les événements et les hommes qui ont fait ou défait l'histoire passent, Fidel Castro reste. Au plan interne, il régna d'une main de fer, ne tolérant aucune opposition et aucune ouverture démocratique qui pourrait dévier la révolution de sa trajectoire. Homme de gauche, révolutionnaire convaincu, anticapitaliste et anti-impérialiste résolu, dirigeant influent des non-alignés, dont le pays s'apprête à abriter le prochain sommet en septembre prochain, le Comandante a toujours rêvé d'exporter la révolution socialiste cubaine dans son espace géographique naturel d'abord, dans les Etats d'Amérique latine, et ailleurs dans le monde. De nouveaux dirigeants se réclamant de la pensée politique de Fidel Castro — des néocastristes — arrivent au pouvoir un peu partout dans les Etats de la région, au Venezuela, au Mexique, en Bolivie. C'est dire que l'héritage castriste a encore de beaux jours devant lui. Cuba sans Castro ? Après avoir exporté sa révolution, Cuba pourrait, à son tour, s'ouvrir aux expériences « démocratiques » de ses voisins.