La tension est montée d'un cran en Libye avec le bombardement, par l'armée nationale, de la bande frontalière avec la Tunisie, à Ras Jedir, et des combats aux environs des ports pétroliers de Sedra et Ras Lanouf l Comment se justifie cette montée des périls ? Tunis De notre correspondant Alors que Bernardino Leone peine à réunir les belligérants libyens pour la conférence de Ghadamès 2, prévue initialement le 9 décembre mais reportée depuis, les ports pétroliers du triangle Sedra-Ras Lanouf-Briga sont au centre du conflit entre les combattants des deux bords. Une colonne militaire, en provenance de Misrata, a essayé de s'emparer de cette zone. Mais, l'intervention aérienne de l'armée a permis aux brigades de protection des établissements pétroliers de résister aux assauts des brigades, proches des islamistes de Fajr Libya. De même, le poste frontalier Ras Jedir, avec la Tunisie, est tombé, avant-hier après une semaine de combats, entre les mains de l'armée nationale libyenne, privant ainsi Fajr Libya de la quasi-totalité des issues vers l'étranger. En effet, les deux postes frontaliers, Dhehibet et Ras Jedir, passerelles vers la Tunisie, sont aux mains du gouvernement de Abdallah Thaneï, tout comme les postes frontaliers avec l'Egypte, le Soudan, le Tchad et le Niger. Les deux dernières frontières restent toutefois très perméables. La montée des périls dans le triangle pétrolier a, par ailleurs, poussé l'établissement national libyen du pétrole à déclarer la situation de force majeure, en prévision d'éventuels retards de livraison de brut libyen. Déjà, les ports de Sedra et Ras Lenouf tournent au strict minimum. La majorité du personnel a quitté les lieux de travail, en attendant que la situation sécuritaire se rétablisse. Et le dialogue national ? Selon le politologue Mansour Younes, professeur à la faculté de droit de Tripoli et ex-membre du Conseil national de transition, l'attaque du triangle pétrolier survient en ce moment parce que le camp de Misrata, qui soutient Fajr Libya, s'est senti en perte de vitesse à l'échelle locale et internationale. «Ce sont désormais le parlement de Tobrouk et le gouvernement de Abdallah Thaneï qui prennent le dessus dans le paysage politique et sur le terrain militaire, en dominant les passages frontaliers et le secteur stratégique de l'exportation du pétrole, en plus de la légitimité populaire, obtenue lors des élections du 25 juin dernier», poursuit-il. Forts des derniers succès de l'armée nationale sur le terrain, les parlementaires siégeant à Tobrouk ont établi des conditions pour prendre part aux pourparlers de Ghadamès, parrainés par l'envoyé spécial des Nations unies, Bernardino Leon. Le parlement de Tobrouk refuse de dialoguer avec ceux qui «privilégient la violence», ou «ne reconnaissent pas les résultats des urnes», comme cela a été dit dans un communiqué publié à la veille de la date initiale des pourparlers de Ghadamès 2. Lequel communiqué a été l'une des raisons du report sine die de la réunion. En effet, M. Leon avait prévu d'associer certaines personnalités proches de Fajr Libya. Mais, les parlementaires de Tobrouk ont refusé de siéger avec ceux qui contestent la légitimité du Parlement. Le report des pourparlers de Ghadamès 2 est donc en rapport avec le refus, par certaines parties invitées, de la présence autour de la table des négociations de certaines personnalités, qui contestent la légitimité du Parlement de Tobrouk et appellent à des élections législatives anticipées.Les avancées militaires de l'armée nationale sur le terrain confortent les élus du 25 juin dernier dans leurs exigences d'écarter les extrémistes du débat. Par ailleurs, ce désir de filtrer les participants aux pourparlers inter-libyens, avec l'exclusion des extrémistes, est également ressorti de la réunion algéro-espagnole, du week-end dernier, entre Abdelkader Messahel, ministre délégué chargé des Affaires maghrébines et africaines, et Ignacio Ybanes Rubioz, secrétaire d'Etat espagnol aux Affaires étrangères. Messahel a souligné, selon l'APS, «la convergence de vue de l'Algérie et de l'Espagne quant à la solution politique de la crise libyenne, qui doit passer par le dialogue politique associant toutes les parties libyennes concernées qui acceptent le dialogue, à l'exception des mouvements terroristes connus et répertoriés par l'ONU». Ghadamès 2 n'est, semble-t-il pas, pour demain.