La tension monte crescendo à la zone industrielle de Rouiba, à l'est d'Alger. Ce pôle industriel, qui abrite une centaine d'entreprises employant 22 000 travailleurs, constituait jadis la fierté de l'économie nationale. Aujourd'hui, il connaît une effervescence sans précédent en raison de «la volonté affichée par certains représentants du patronat de relancer la politique de privatisation des entreprises publiques». Une politique qui suscite colère et indignation parmi les travailleurs et les syndicalistes de toute la zone. «Si notre cri n'est pas entendu, nous n'hésiterons guère pour investir la rue. Et nous sommes prêts à paralyser toute la zone si nécessaire», a averti le secrétaire général de l'union locale de l'UGTA, Mokdad Messaoudi, hier à Rouiba. S'exprimant devant des dizaines de responsables syndicaux, l'orateur est revenu longuement sur les menaces qui pèsent sur l'outil de la production nationale en énumérant les contradictions existant entre le discours du gouvernement et la réalité du terrain. Les présents à la réunion semblaient en avoir gros sur le cœur. La plupart accusent le patron de l'UGTA et le gouvernement «d'avoir gardé un silence complice», estimant que «la rue est le seul moyen qui pourrait éviter le bradage et la liquidation des entreprises publiques». «Au moment où on demande aux travailleurs de se préparer à serrer la ceinture, on assiste à une offensive sans précédent des tenants du capital privé qui veulent s'approprier les richesses et les commandes du pays. En effet, ils nous annoncent, sans aucun démenti des pouvoirs publics, que tous les secteurs sont éligibles à la privatisation qu'ils ambitionnent de mettre en œuvre à leur guise», déplorent-ils. Et de rappeler les résultats des privatisations menées par le passé. Qui veut saboter la SNVI ? Il cite l'exemple de l'Entreprise nationale de gaz industriels (ENGI), vendue à un allemand alors qu'elle était en bonne santé financière. «A l'époque, l'ENGI exportait même à l'étranger, mais aujourd'hui notre pays importe de Tunisie l'oxygène qu'on utilise dans les hôpitaux. Voilà ce qu'a apporté la privatisation», a-t-il ajouté, avant de dénoncer les velléités de certaines parties (sans les citer) de saboter la Société nationale des véhicules industriels (SNVI). «Nous ne savons pas qui décide réellement dans ce pays. Trouvez-vous normal qu'une décision du CPE datée de novembre dernier demandant au directeur des Douanes l'exonération des pièces importées par la SNVI ne soit pas appliquée à ce jour ?», demande-t-il en exhibant les documents attestant ses dires. Intervenant dans ce sens, le secrétaire général de la section syndicale de la SNVI, M. Benmiloud, affirme que la vente d'autobus à l'Etusa a été suspendue depuis la nomination de Amar Ghoul à la tête du ministère des Transports.