Cette fiction de deux heures a obtenu également l'Oscar du meilleur réalisateur, meilleur scénario et meilleure photographie. Les cinéastes mexicains s'imposent donc dans la galaxie d'Hollywood, puisque l'année dernière la statuette dorée est revenue à Alfonso Cuaron pour son sublime Gravity. Magistralement interprété par Michael Keaton, Thomson Rigan, le personnage central de Birdman est un comédien qui veut retrouver les planches et la gloire après une carrière de super héros. L'homme-oiseau, consacré par le petit écran, poursuit Rigan dans sa loge d'un petit théâtre de Broadway, à New York. Il agit comme un surmoi, habite l'esprit du comédien, le fait détacher de la réalité et tente de lui dicter sa conduite. Mais Rigan veut remonter la pente après une période faste et réussir une pièce inspirée d'une nouvelle de Raymond Carver, What we talk about when we talk about love (On parle de quoi lorsqu'on parle d'amour). Une série de questionnements existentiels sur l'amour, la vie et la reconnaissance sociale. Birdman, qui relève de la comédie noire, est un film intense où il est question d'art, de création, de théâtre, d'urbanité froide, de famille, de YouTube, de Twitter, de célébrité, de vérité, de rêves, de liberté, d'égoïsme, de drogue, de réussite, de technologie, de jalousie… Bref, Birdman défonce toutes les portes derrière lesquelles se cachent ou tentent de se cacher les drames, les travers et les cassures du monde contemporain, monde civilisé. L'idée du film a quelque peu terrorisé le cinéaste. «Ce film m'a poussé à m'aventurer en territoire inconnu. Ce qui est loin d'être confortable. J'ai toujours pensé qu'après avoir atteint 40 ans, un projet qui ne vous effraie pas ne vaut pas la peine qu'on l'entreprenne», a déclaré Alejandro Inarritu à la presse. Birdman, qui sort cette semaine dans les salles en Europe, a été salué par la critique nord-américaine. Lors de l'allocution prononcée après l'obtention des Oscars, le cinéaste a rendu hommage aux Sud-Américains vivant aux Etats-Unis. «J'espère qu'ils seront traités avec le même respect que les immigrants qui sont venus dans ce pays au fil des siècles», a-t-il déclaré. Birdman est le cinquième long métrage d'Alejandro Inarritu, déjà consacré avec des films tels que Amours chiennes (2000) et Babel (2006). American Sniper, qui était en liste des Oscars, n'a obtenu que le prix du Meilleur montage son de l'Academy of Motion Picture Arts and Sciences. Le film de Clint Eastwood a été fortement critiqué par la communauté musulmane vivant aux Etats-Unis. Ce long métrage évoque la vie du tireur d'élite, Chris Kyle, qui a «servi» en Irak. Attendu également par la critique, l'étonnant film de Richard Linklater, Boyhood, est reparti bredouille de la cérémonie des Oscars. Il n'a décroché que le prix de la Meilleure actrice dans un second rôle, Patricia Arquette. Le réalisateur a filmé ses deux personnages, Mason et Samantha, pendant douze ans, montrant leur évolution physique et mentale. Ce qui est assez rare au cinéma. Le Britannique Eddy Redmayne, qui s'est distingué dans le rôle du physicien Stephen Hawking dans Une merveilleuse histoire du temps, de James Marsh, a décroché l'Oscar du Meilleur acteur. Le prix de la Meilleure actrice est revenu à Julianne Moore, pour son interprétation d'une femme atteinte de la maladie d'Alzheimer dans Still Alice, de Richard Glatzer et Wash Westmoreland. L'Oscar de la Meilleure chanson originale a été attribué au duo Common-John Legend pour Glory du film Selma, de la réalisatrice américaine Ava Duvernay sur le combat de Martin Luther King pour les droits civiques des Noirs aux Etats-Unis. «Cette lutte pour la justice est toujours d'actualité. Plus d'hommes noirs incarcérés aujourd'hui qu'il n'y en avait du temps de l'esclavage», a déclaré sur scène John Legend. L'Oscar de la Meilleure musique originale a été décroché par le Français Alexandre Desplat pour The Grand Budapest Hotel, de Wes Anderson, une comédie germano-britannique.