Certaines villes de l'Ouest algérien souffrent d'un phénomène de prohibition de l'alcool qui ne dit pas son nom. Il faut savoir qu'en s'éloignant d'à peine une trentaine de kilomètres d'Oran, la vente d'alcool devient quasi-problématique. Dans certaines communes recluses, acheter une bouteille de vin relève de l'impossible, sinon de l'exploit. Mais il faut savoir que ces fermetures massives de bars et dépositaires est encouragée, non pas seulement par les islamistes, mais surtout par les anciens barons de la drogue qui se sont convertis récemment à la vente d'alcool au noir. «Ces anciens barons de la drogue ont découvert que le marché de l'alcool pouvait leur apporter gros et à moindres risques», nous explique un opérateur. En effet, le revendeur de drogue, s'il se fait attraper, risque de grosses peines, de 10 ans de prison et plus, tandis qu'un revendeur d'alcool clandestin, au pire, ne risque que 3 à 6 mois, parfois avec sursis. De ce fait, argue cet opérateur, les anciens barons de la drogue ne supportent plus qu'il y ait des commerçants légaux d'alcool dans les petites communes. Car il suffit seulement d'un seul commerce exerçant légalement pour que, de facto, tous les points de vente au noir disparaissent. Aussi, ces revendeurs clandestins font tout pour procéder à leur fermeture, quitte à organiser du grabuge, des manifestations de rue, voir même, pour certains, aller jusqu'au meurtre». «Cela a pour effet, précise-t-il, d'induire en erreur l'administration et les services de sécurité qui pensent que c'est la population qui agit pour ces fermetures, ce qui est totalement faux!» Aujourd'hui, dans l'Ouest algérien, rares sont les wilayas qui disposent de bars et de débits de boissons alcoolisées. Elles ne se comptent d'ailleurs que sur les doigts d'une seule main : Oran, Mostaganem, Sidi Bel Abbès, Aïn Témouchent, et à moindre portée Tiaret et Relizane. Pour le reste, «circulez, il n'y a rien à boire !». Là où la situation est vraiment confuse, c'est bien à Mascara dont le wali actuel, M Ouled Salah Zitouni, a œuvré pour la fermeture de tous les bars. Même l'ONCV s'est vu confisquer son magasin de vente au détail qui date des années 70. Aujourd'hui à Mascara, il n'existe ni bars, ni dépositaire d'alcool, cela dit, «depuis que cette directive wilayale a été prise, la consommation de psychotropes a explosé», nous explique-t-on. Aujourd'hui à Mascara, on dénombre pas moins de 1000 «mahchacha» (point de vente d'alcool au noir), ce qui a pour effet de favoriser l'insécurité. A Tlemcen où on trouve des bars seulement dans 3 hôtels, «les agents commerciaux estiment que la quantité de bière et de vin vendue dans l'informel est de plus de 702 hectolitres, c'est-à-dire plus de 1.400.000 unités en canettes de 50cl mensuellement. Si on génère une TVA de 10 DA par unité, on dégagera un impôt de 14 millions de DA par mois uniquement en TVA», se désole un opérateur. Enfin, il faut noter, contrairement à ce que prétendent les partisans de la prohibition, que c'est bel et bien l'inexistence de bars dans certaines villes qui génère les accidents de la circulation. «Les consommateurs d'alcool ne cherchent pas seulement à se remplir la tête. S'ils cherchent à aller aux bars, c'est que ces établissements peuvent être des lieux de rencontre et de convivialité. Aussi, dès lors que leur wilaya ne leur offre pas ce genre d'endroits, ils n'hésitent pas à prendre la voiture et aller dans des grandes villes comme Oran, à la recherche d'un peu de chaleur humaine. Sur le chemin du retour, étant éméchés, un drame pourrait se produire. Cela ne se produirait pas s'ils pouvaient prendre leur verre tout près de chez eux»