Comme dans le jeu du chat et de la souris, Ahmed Ouyahia et Amar Saadani jouent, depuis plusieurs semaines, un match à distance. Entre concurrence aux éloges à faire au chef de l'Etat et débordements en terrains «amis», les deux hommes se sont distingués par des interventions publiques qui semblent opposer deux visions de gouvernance. Entre un Ouyahia qui sort du bois pour «affronter» l'opposition au nom du régime et le secrétaire général du FLN qui rappelle à qui veut l'entendre que «l'opposition doit avoir sa place», ce sont deux visions du pouvoir qui s'affrontent. Encore ces deux derniers jours, les deux hommes se sont livrés à des passes d'armes inédites. Lorsque Ouyahia avance, dans Echorouk, que «la révision de la Constitution n'est pas la priorité», Amar Saadani dit, le lendemain, le contraire. Quand l'ancien Premier ministre s'attaque à l'opposition qu'il invite à l'affronter sur des questions politiques et économiques, le secrétaire général du FLN estime que le «dialogue» doit se poursuivre avec une opposition dont le rôle «est important en démocratie». La divergence entre les deux hommes est encore plus apparente lorsqu'il s'agit d'évoquer la nécessité de refonder l'alliance présidentielle. Ahmed Ouyahia, qui laisse transparaître une ambition de revenir à la tête du gouvernement, défend toujours la nécessité de porter «politiquement» le «projet du chef de l'Etat». L'homme veut donc revenir à l'ancienne formule d'alliance des partisans de Bouteflika. L'homme veut également se donner la «vocation» de porte-parole de ce conglomérat politique. A cela, Saadani affiche une hostilité déconcertante. «Une alliance présidentielle signifie un affrontement avec l'opposition. C'est ce que nous voulons éviter», a-t-il dit dans les colonnes d'El Khabar. Ce duel à distance a commencé, en réalité, en juin dernier. Alors qu'Ahmed Ouyahia signe officiellement son retour à la tête du RND, par le biais d'une grande conférence de presse, Amar Saadani convoque les journalistes, dans la précipitation, pour faire, lui aussi, des déclarations. Comme première «amabilité» avec son «frère Ouyahia», le secrétaire général rejette, publiquement, l'appel à l'unité lancé par le secrétaire général par intérim du RND. Plus que cela, lorsqu'Ouyahia se met à défendre le frère du chef de l'Etat, Saïd Bouteflika, Saadani semble éviter d'entrer dans le jeu. Il en est de même pour leur perception du général Toufik. Le premier l'appelle «le frère» et le second l'avertit publiquement en cas où «un malheur arrive». La rivalité entre les deux hommes signifie-t-elle deux voix du système ?