Comment tuer le temps ? Ce n'est plus Chaâbane mais Sheila, sa femme, qui se pose maintenant la question, elle qui ne s'en est posée qu'une seule dans sa vie, pourquoi aller vivre en Algérie ? Après être rentrée difficilement dans la tradition locale en 2000, la guerre annoncée officiellement terminée, elle est difficilement rentrée en Algérie en quittant difficilement son Arkansas natal. Sheila compte maintenant le temps elle aussi, au 10e jour de Ramadhan. 10 chorbas, 10 djouaz et 50 boureks lui ont donné un sentiment de répétition lassant. Et si je faisais des boureks à l'américaine ou une chorba au ketchup ? a-t-elle demandé à son mari. Heureusement pour elle, Chaâbane dort encore, malgré l'heure avancée, autour de 15h GMT. Si Chaâbane n'est pas un traditionnaliste pur datte, il n'en reste pas moins allergique aux inventions. Pour lui, la seule invention valable serait de gagner (beaucoup) de l'argent tout en travaillant (vraiment) peu. Comme il l'a expliqué à son ami Laïd à qui il a rendu visite l'après-midi, il ne demande pas de travail à l'Etat mais demande seulement que l'Etat le laisse travailler. Il ne demande pas d'argent à l'Etat mais demande juste que l'Etat baisse ses prix. Il ne demande pas à l'Etat d'assurer sa sécurité mais demande simplement que l'Etat ne le tabasse pas. Il ne demande pas de logement à l'Etat mais aimerait bien que l'Etat vérifie qu'un milliard pour un F2 ne constitue pas une anomalie immobilière. Heureusement, le temps de ne pas demander tout ça à l'Etat et l'heure est arrivée, indépendamment cette fois du bon vouloir de l'Etat. Il est 18h30. Juste le temps de manger. Saha ftoro.