«Là, il est allé trop loin.» Dans les salons du sérail et dans les couloirs du siège du FLN à Hydra, sur les hauteurs d'Alger, on n'a de cesse de commenter le «franchissement» par Amar Saadani de la «ligne rouge». Le secrétaire général du FLN est «accusé de s'être dressé contre son mentor, le président Bouteflika». Amar Saadani semble assumer complètement ce crime de lèse-majesté en répétant à souhait que l'article 51 de l'amendement de la Loi fondamentale est «anticonstitutionnel». «A part s'assurer la sympathie de notre immigration en France quand il ira s'installer là-bas à sa fin de mission, je ne vois pas pourquoi il s'acharne ainsi à s'opposer à celui qui a fait de lui le patron du FLN», lâche, outré, un cadre de la direction du vieux parti. «En fait, Saadani tente de s'imposer alors qu'il n'est plus utile au cercle du Président, tranche un proche de Zéralda. Maintenant qu'il n'a plus de missions – comme lorsqu'on l'avait chargé d'attaquer le général Toufik – il est obligé d'exister à travers des acrobaties politiciennes. Il n'a plus que Ouyahia, qui lui a volé la vedette en tant que porte-parole de la Présidence, à se mettre sous la dent. C'est désolant.» «Saadani a senti le vent tourné dès l'installation du bureau de l'APN, quand ses affidés ont été empêchés de rafler la mise, cela s'est confirmé avec les récentes sénatoriales avec la mainmise du RND, note un cadre de l'ex-parti unique. Saadani a compris qu'il commence à ne plus être utile au Président. Alors il tente de justifier son existence, et son poste, en lançant des phrases assassines et en promettant de ‘s'occuper' de Ouyahia après le vote de la Constitution.» Saadani en fin de mission ? «Pire, car entouré des businessmans du parti, à leur tête Mohamed Djemai (à qui il promet toujours le poste de ministre du Commerce), Saadani se voit sur la short-list des présidentiables, relève une source de Zéralda. Chez nous, on n'aime pas que les hommes de troupes se voient soudain généraux. Chacun à sa place.» «C'est un syndrome incurable qui touche souvent les patrons du FLN à un moment ou à un autre : se voir candidat à la présidence de la République. De Benhamouda à Benflis, ce syndrome a fait des dégâts», commente un dirigeant du vieux parti. Sans ambages, un habitué de Zéralda, lance : «Le câble qui reliait Saadani au cercle présidentiel est définitivement coupé.»