Ces Marocains ne ratent aucune occasion pour se livrer à des manœuvres et à de la diversion, même celles qui exigent de s'élever au-dessus des contingences du moment. A l'occasion du 40e jour du décès de cette grande figure de la Révolution, Hocine Aït Ahmed, des personnalités marocaines, dont certaines ont connu le défunt, ont fait le déplacement à Alger pour rendre un dernier hommage au disparu. Un geste qui va droit au cœur, d'autant qu'il est conforme à cette condition maghrébine de solidarité et de fraternité. L'un des membres de la délégation, Bensaïd Aït Idder, qui avait longtemps vécu entre l'Algérie et la France avant de rentrer au Maroc au début des années 1980, a demandé à rencontrer le président Abdelaziz Bouteflika, qu'il aurait connu quand ce dernier était ministre des Affaires étrangères. Il n'était pas en mesure de le recevoir mais il a donné instruction au Premier ministre, Abdelmalek Sellal, et au ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, d'organiser un déjeuner en l'honneur de toutes les délégations, tous courants confondus. En allant des islamistes du PJD (Parti de la justice et du développement) en passant par Istiqlal et l'USFP (Union socialiste des forces populaires) représenté par El Yazghi. On aurait pu en rester là. Mais voilà que nos invités ont profité de l'occasion pour se livrer à une sorte de prosélytisme, comme l'a fait Aït Idder qui a déclaré à un quotidien algérien que «le Sahara occidental est retourné dans le giron de la mère patrie». Les Marocains poussent l'audace jusqu'à contacter des partis politiques algériens pour les inviter à participer à une rencontre algéro-marocaine au début du mois d'avril à Marrakech consacrée au Sahara occidental. Rien que ça ! Il faut dire que le palais royal a des raisons de revenir à la charge et pousser l'Algérie à violer la légalité internationale et ses engagements avec les peuples opprimés. C'est un aventurier du nom de Amar Saadani qui en est à l'origine. Alors qu'il était président de l'APN, il avait été invité pour une visite privée au Maroc par son homologue marocain. Il répond à l'invitation mais sans en informer les hauts responsables du pays. Que s'était-il passé à Rabat ? A-t-il obtenu des promesses sonnantes et trébuchantes. Toujours est-il que c'est un homme déchaîné qui retourne à Alger. Il se lance dans une horrible campagne de dénigrement contre le peuple palestinien et le peuple sahraoui. A propos du premier, il prétend qu'il a été abandonné par tous les pays arabes et que l'intérêt de l'Algérie est d'établir des relations avec Israël, un Etat fort avec lequel on a tant à gagner. Y a-t-il une relation entre ses propos provocateurs et son appartement à Neuilly ? Quant aux Sahraouis, Saadani prétend que l'Algérie n'a aucune raison de les soutenir et qu'il est impératif de rétablir des relations normales avec la monarchie marocaine. Joignant l'acte à la parole, il avait interdit à une délégation parlementaire d'aller assister à une conférence internationale de soutien qui s'était tenue à Séville. Se sentant très fort et bien protégé, comme tout mercenaire qui se respecte, il avait lancé récemment un véritable défi à toute l'Algérie en soutenant que s'il venait à exposer son véritable point de vue sur la cause sahraouie, il provoquerait des remous en Algérie. Des propos scandaleux qui ont contraint le président de la République à recevoir son homologue de la RASD, Mohamed Abdelaziz, en présence de Abdelmalek Sellal, de Ramtane Lamamra, de Abdelkader Messahel, d'Ahmed Ouyahia et du général-major Gaïd Salah ! Une véritable gifle au chef du FLN mais qui n'a pas du tout été impressionné par une telle humiliation. Il en a vu d'autres. Malheureusement, son inadmissible comportement a laissé croire au palais royal qu'il est mandaté pour tenir de tels propos. D'où cette proposition de rencontre algéro-marocaine à Marrakech. Si la délégation marocaine était soucieuse d'une véritable paix au Maghreb, elle aurait dû prendre d'abord langue avec le Front Polisario. Les Algériens ne peuvent nullement se substituer au peuple sahraoui, ni parler en son nom. Ils n'ont pas la culture de la trahison. Surtout que le problème du Sahara occidental relève du droit international et qu'il est pris en charge par les Nations unies. Les partis politiques algériens sont conscients de cette réalité et ne peuvent donc succombé au chant des sirènes marocaines. La proposition de tenir une rencontre en avril n'est pas fortuite. Le palais royal panique et perd son sang-froid à l'approche de ce mois. C'est en effet, en avril que se réunit régulièrement le Conseil de sécurité de l'ONU pour renouveler le mandat de la Minurso. A la veille de cette réunion, Christopher Ross, le représentant spécial du secrétaire général de l'Onu pour le Sahara occidental, doit effectuer une tournée dans la région. Les Marocains n'en veulent pas. Ban Ki-moon lui aussi doit le suivre et il a programmé, entre autres, une visite à Al Ayoun. Là aussi, Rabat dit niet. Un autre défi à la communauté internationale qui rappelle le comportement hostile d'Israël à l'égard de tout ce qui est ONU. En invitant à Marrakech des Algériens, les Marocains veulent faire accréditer la thèse que le conflit est entre l'Algérie et le Maroc. Preuve en est que des Algériens acceptent d'en discuter en l'absence du Front Polisario. Une autre manœuvre qui ne fera pas long feu même si une cinquième colonne comme Amar Saadani pense autrement.