Selon des sources proches de la place bancaire locale, la même pression que tente de mettre l'Etat sur les compagnies d'assurances pour éviter l'échec de son emprunt obligataire s'exercerait avec plus d'acuité encore sur les banques, alors que celles-ci font déjà face, pour la plupart, à de sérieux problèmes de liquidités. Lancé officiellement le 17 avril dernier, l'emprunt obligataire national pour la croissance économique (ENCE) semble déjà marquer le pas, l'Etat se voyant désormais obligé de mettre la pression sur les banques et les assureurs pour améliorer son placement. En effet, dans une correspondance adressée le 31 mai à l'Union des assureurs et réassureurs (UAR), le directeur général du Trésor souligne qu'après examen de la situation, les montants mobilisés au titre de la souscription à l'emprunt obligataire national «restent en deçà des attentes et des capacités du secteur des assurances». Aussi, lit-on dans le même message, «il y a lieu de demander aux sociétés d'assurances de fournir plus d'efforts pour la réussite de cette opération». Selon des sources proches de la place bancaire locale, cette même pression que tente de mettre l'Etat sur les compagnies d'assurances pour éviter l'échec de son emprunt obligataire s'exercerait encore avec plus d'acuité sur les banques, alors que celles-ci font déjà face, pour la plupart, à de sérieux problèmes de liquidités. Si les compagnies d'assurance, impliquées sur le tard dans l'emprunt national, restent financièrement plutôt solides, les banques, faut-il le rappeler, commencent à pâtir très sérieusement de la mauvaise conjoncture pétrolière qui sévit et de la forte baisse des dépôts du secteur des hydrocarbures qui s'en est suivi. Certaines d'entre elles seraient ainsi carrément en pleine crise de liquidité, d'où la récente décision de la Banque d'Algérie de réactiver le marché monétaire et le réescompte pour leur permettre d'y emprunter les ressources nécessaires à leur fonctionnement. Dans un tel contexte, l'emprunt obligataire de l'Etat, destiné à collecter l'épargne qui dort et les fonds de l'informel pour faire face à la crise budgétaire, semble encombrer encore plus les banques, elles-mêmes en manque cruel de ressources financières et en quête de nouvelles sources de dépôts. L'emprunt de l'Etat, nous confient d'ailleurs certains banquiers de la place locale, risque d'exercer un certain effet de dissuasion sur l'épargne classique en banque tant les niveaux de rémunération qu'il offre sont plus captivants que les taux d'intérêt bancaires en vigueur. Placements souverains assortis de la garantie de l'Etat, les titres émis dans le cadre de l'emprunt national pour la croissance donnent en effet droit à des taux d'intérêt annuel de 5% pour ceux à maturité de 3 ans et de 5,75% pour ceux à 5 ans. Les banques, elles, continuent à rémunérer leurs comptes épargne à hauteur de 2 à 2,5% à peine, soit des taux considérés comme nettement négatifs, car se situant bien en-deçà du taux d'inflation en vigueur, qui dépasse actuellement les 4%. Quoi qu'il en soit, près de deux mois après son lancement et alors qu'aucune évaluation exhaustive et officielle n'ait encore été rendue publique, l'opération de collecte de l'épargne par le biais de l'emprunt obligataire national semble bel et bien piétiner, si l'on s'en tient aux tergiversations qui entourent déjà sa mise en œuvre et aux pressions que les pouvoirs publics tentent de transférer sur les banques et les compagnies d'assurance pour éviter son échec. Emis sans plafond de ressources à collecter et pour une période de souscription fixée en principe à six mois tout en étant extensible, l'emprunt obligataire de l'Etat pour la croissance devra sans doute être étalé au-delà de cette échéance officielle afin d'éviter qu'il tourne complètement au fiasco.