Regard noir, visage tendu, Louisa Hanoune, secrétaire générale du Parti des travailleurs (PT), n'a pas décrispé la mâchoire tout au long de son discours. Pour marquer le 26e anniversaire de la naissance du PT, la seule femme arabe à présider un parti trotskiste, a dressé un sévère réquisitoire sur la situation qui prévaut en Algérie. Au milieu des militants du parti, elle n'a pas lésiné sur les accusations et les mises en garde contre un régime jugé «dangereux pour le pays». «Jamais nous n'avions imaginé voir l'Algérie vivre une telle situation, a déclaré la leader du PT. Nous assistons à un grave glissement qui peut nous être fatal.» Et de rappeler qu'en Algérie, «nous constatons une décadence dans tous les domaines, sans parler des lois liberticides et celles contraire à la Constitution, adoptée dernièrement». Au sujet des libertés individuelles et celles de la presse, Mme Hanoune estime que les dernières décisions prises par le régime cachent des «intentions totalitaires». Elle en veut pour preuve l'arrestation et l'emprisonnement de Mehdi Benaïssa, directeur de KBC et NessProd, et de Nedjaï Nora, directrice au ministère de la Culture en charge de délivrer les autorisations de tournage. «Fille de moudjahid, son seul tort est d'avoir agi selon sa conscience», s'est écriée celle qui fut candidate aux trois dernières présidentielles. Au plan économique, le constat de Louisa Hanoune est sans appel. Les dernières décisions gouvernementales poussent le pays vers le précipice. «Nous sommes face à un pays qui peut s'effondrer à tout moment, à l'image de la Somalie», avertit la secrétaire générale du Parti des travailleurs, estimant que la politique défendue par le gouvernement est au bénéfice d'une minorité qui s'est enrichie avec l'argent public. «Le gouvernement tourne le dos à la majorité du peuple, a condamné Mme Hanoune. Il s'en prend aux nécessiteux et épargne l'oligarchie.» Pour appuyer ses propos, la patronne du PT sort sa calculette pour démontrer l'inanité de la démarche gouvernementale. «Le gouvernement doit trouver en urgence 10 milliards de dollars, explique-t-elle. Il a décidé pour faire plaisir à un homme d'affaires de lancer un emprunt obligataire qui ne pourra rapporter dans le meilleur des cas que 4 milliards de dollars.» Louisa Hanoune qui n'a pas peur des chiffres a embrayé sur une équation à trois inconnues qui rapporterait plus de 160 milliards de dollars au gouvernement. Comment ? C'est simple : il faut aller chercher l'argent là où il se trouve. «Si on récupère les 100 milliards de dollars d'impôts impayés, et les 57 milliards de dollars de prêts accordés aux copains et on y ajoute les 5 milliards de dollars accordés au FMI, on aboutit à 162 milliards de dollars. Avec cet argent on peut tenir 3 ans, sans recourir au FMI.» CQFD. Pour marquer les esprits, Louisa Hanoune a esquissé un parallèle entre la situation traversée par le Brésil et l'Algérie. Pour elle, les deux pays font face aux périls de l'oligarchie. «Dilma Roussef a été victime d'un putsch orchestré par des députés qui sont liés à des affaires de corruption et de détournement», a-t-elle affirmé. Une manière de rappeler que le scénario brésilien peut se produire en Algérie.