L'ONU a rappelé, hier, une évidence au sujet du conflit syrien. Il n'y a pas de guerre propre. Les humains en ont toujours été les victimes principales. Mais cette fois c'est pour décrire la situation imposée aux civils syriens qui subissent les bombardements à Alep qu'ils sont confrontés «à un niveau de sauvagerie qu'aucun humain ne devrait avoir à supporter». C'est ce qu'a déclaré hier le coordonnateur de l'OCHA (les secours d'urgence) de l'ONU, Stephen O'Brien. Et avant lui, l'organisation Médecins sans frontières (MSF) qui avait appelé Damas et Moscou à mettre un terme «au bain de sang». Autant d'appels urgents pour que cessent les bombardements de la deuxième ville de Syrie toujours divisée en deux secteurs. Elle l'est depuis le début du soulèvement devenu rébellion puis conflit armé, avec l'apparition au début d'une opposition armée, puis de groupes armés extrémistes. C'est bien cela le conflit syrien avec ses guerres et une population prise en otage. Comme celle d'Alep qui ne sera plus ce qu'elle était avant que ce conflit n'éclate. Il n'y a plus de chiffres officiels, tout juste des estimations elles-mêmes démenties par le flot de partants pour l'exode intérieur ou plus simplement l'exil. Dans le secteur en question, des sources l'évaluent à 250 000 personnes, et tout juste un dixième, selon d'autres. Ce qui n'atténue en rien la gravité de ce conflit, avec des populations soumises à des bombardements aériens intenses, et un blocus en règle qui ne laisse d'autre choix à ces populations que d'en sortir par des voies contrôlées par les forces gouvernementales. Mais qui doivent le faire au péril de leur vie, vu que les différents groupes armés qui contrôlent ce secteur tentent de les empêcher, car elles perdraient ce que certains considèrent comme un bouclier humain. Des otages. De ceux qui occupent cette partie de la ville, et du conflit d'une manière plus générale. Ce que M. O'Brien a qualifié d'«enfer sur Terre» auquel il faut mettre fin à travers «une action urgente» alors que tous les efforts diplomatiques ont échoué. «Le système de santé dans l'est d'Alep a été presque réduit à néant», a déploré M. O'Brien, après que le plus grand hôpital des quartiers rebelles d'Alep ait été bombardé samedi, pour la deuxième fois cette semaine. «Les structures de soins sont touchées l'une après l'autre», a-t-il ajouté. M. O'Brien a appelé les belligérants à permettre au moins l'évacuation des centaines de civils nécessitant des soins urgents. Les réserves d'eau et de nourriture sont très basses dans l'est d'Alep, selon l'ONU, et l'aide humanitaire pour la ville a été bloquée par les combats. L'ONU n'a pas manqué de s'en alarmer en parlant de «plus grave catastrophe humanitaire jamais vue en Syrie». Rien n'indiquait hier que cette situation allait prendre fin, ou que si cela venait à se terminer, ce ne sera qu'après la reprise de ce secteur par l'armée de Bachar Al Assad. Même au prix humain le plus élevé. Dix jours après le lancement par le régime de l'opération pour reprendre totalement Alep, les combats se concentrent sur plusieurs quartiers périphériques de l'est de la ville contrôlée par les rebelles depuis 2012. Toutefois, Washington et Moscou n'ont pas coupé les ponts en dépit de leurs profondes divergences. Le ministère russe des Affaires étrangères a indiqué hier que MM. Lavrov et Kerry avaient eu samedi soir «une nouvelle» conversation téléphonique. Au cours d'un précédent échange, M. Lavrov avait de nouveau souligné «le caractère inacceptable des tentatives des opposants, pilotées par l'Occident, de traiter avec indulgence Al Nosra et leur blocage des négociations sur un règlement politique de la crise», en allusion au Front Fateh Al Cham, ex-Front Al Nosra qui a renoncé à son rattachement à Al Qaîda. La situation paraît toujours complexe, mais rien ne devrait justifier les massacres dénoncés par l'ONU qui abordera encore une fois aujourd'hui ce conflit. Qu'en sortira-t-il ?