Le départ de Amar Saadani ne peut passer inaperçu. Officiellement, il ne s'agit pas d'un limogeage, mais d'une démission pour raison de santé, selon la formule consacrée qui ne signifie rien de moins que la fin d'une mission à la tête du Front de libération nationale pour un sulfureux personnage qui aura été, sous les mandats de Bouteflika, successivement troisième personnalité de l'Etat, en tant que président de l'Assemblée populaire nationale ; puis n°1 du FLN, en assumant les fonctions de secrétaire général. Ce qui s'est passé à l'occasion de la réunion du Comité central du FLN, à l'hôtel El Aurassi sur les hauteurs d'Alger, est à la fois révélateur des tractations et du jeu politique du sérail qui font depuis longtemps partie des pratiques obscures d'un système et de sa nature autoritaire et clientéliste. Le successeur à Saadani, Djamel Ould Abbès, est connu pour être lui aussi un homme du pouvoir. En fait, tout s'est joué ailleurs qu'à El Aurassi, à El Mouradia sans doute, siège de la présidence de la République. Toujours est-il que Saadani a bel et bien été poussé vers la sortie. Contrairement à son prédécesseur Abdelaziz Belkhadem qui, après avoir connu la disgrâce de son protecteur, a été la victime d'un retrait de confiance de ses pairs du comité central du FLN, au prétexte d'un bilan catastrophique, notamment après les élections législatives. Quant à Saadani, il s'était fait un devoir, en parfait homme au service du clan présidentiel, d'aller au secours de Chakib Khelil dont le nom revenait souvent dans les scandales de corruption liés à l'affaire Sonatrach, n'hésitant pas à demander au ministre de la Justice de faire taire la moindre allusion à l'ancien ministre de l'Energie au cours de toute instruction judiciaire. Et d'extirper comme un «cheveu de la pâte» le nom de l'honorable ministre. L'on retiendra que le sulfureux secrétaire général qui alterne ses résidences entre Neuilly, l'Ile Saint-Louis et Hydra, quartiers tout aussi huppés les uns que les autres, n'en était pas à une saillie près. Il a multiplié les extravagantes sorties, s'attaquant au patron du défunt service de sécurité, le DRS, au nom du rétablissement d'un Etat civil, tour à tour accusé de tous les maux, d'avoir failli en matière de sécurité entre autres, jusqu'à être l'instigateur des mouvements de protestation de la population du sud du pays. Aujourd'hui, cette démission «suggérée» du patron du FLN cache mal les enjeux autour du prochain mandat présidentiel. Notamment depuis la rentrée et les deux sorties médiatiques de Abdelaziz Bouteflika. Appelées sans doute à être à l'avenir plus fréquentes depuis 2013, année au cours de laquelle il a été victime d'un accident vasculaire cérébral. Et si tout cela n'est en fait qu'un début de campagne ? Maintenant que les obstacles ont été écartés, le clan présidentiel entend peser de tout son poids sur le prochain mandat.