A l'approche des grandes pluies, les occupants des bâtisses datant de l'époque coloniale entrent dans une interminable expectative. La plupart des immeubles dans la capitale datent de l'époque coloniale, la majorité d'entres eux ont plus d'un siècle. Il y a donc péril en la demeure, car les risques d'effondrement sont imminents, particulièrement durant la saison hivernale, où la menace est sensiblement accrue. A l'approche des grandes pluies, les occupants de ces bâtisses entrent dans une interminable expectative. Le drame risque de frapper à tout moment et la peur s'installe. Il va pleuvoir cette nuit, toute la nuit même. Des pluies torrentielles sont attendues sur la capitale. Jusque-là, rien d'anormal. Sauf que les locataires passeront une fois de plus la nuit à guetter le moindre stratus actif, la peur au ventre, à l'affût du moindre craquement. Ils ont parfaitement raison, car le surlendemain, les médias feront, comme à l'accoutumée, état de dégâts et de victimes. La nature est-elle destructrice à ce point ? Non, c'est la négligence de l'hommes qui cause ce genre de désastres. Alger avec ses immeubles vétustes, qui n'ont pas été entretenus depuis des lustres, est exposée aux effondrements. Il ne se passe pas un hiver sans qu'un immeuble ou une partie cède sous l'effet des eaux pluviales. La menace est suspendue telle une épée de Damoclès au-dessus de la tête des habitants. L'inquiétude est plus que justifiée, étant donné que le parc de logements vétustes comprend entre 2 et 3 millions d'unités, dont la plupart sont dans un état de dégradation très avancée, constituant de surcroît un danger avéré pour leurs occupants. A Belouizdad, 85% du tissu urbain est à démolir. Des quartiers entiers sont dans un état de délabrement tel que l'on se demande par quel miracle ils tiennent debout. Nombre de bâtisses ont été classées au lendemain du séisme de 2003 dans la catégorie orange. Le recensement du CTC fait état de 81 immeubles menaçant ruine (IMR), d'une vingtaine d'autres classés dans la catégorie rouge. Les opérations de relogement menées jusqu'ici par la wilaya d'Alger ont permis de recaser nombre de ces habitants. Cependant, il reste beaucoup à faire, notamment en matière de réhabilitation pour les immeubles qui sont récupérables. La célérité est donc de mise, car l'expérience des années précédentes fait état d'effondrements qui peuvent survenir à n'importe quel moment. En octobre 2010, un immeuble de plusieurs étages s'est affaissé au boulevard Nécira Nounou. Il a coûté la vie à une vieille dame et mis à la rue huit familles. Les habitants des bâtisses n° 31 et 43 de la rue Cheikhi Kamel se sont réveillés, un certain décembre 2006 à 4h du matin, sous l'effet d'un écroulement partiel d'une bâtisse qui leur fait face. Le souvenir reste gravé dans la mémoire des habitants qui, jusqu'à aujourd'hui, se rappellent de l'effroyable bruit qui a déchiré le silence de la nuit et ébranlé toute leur existence. Les pluies diluviennes, qui se sont abattues sur la capitale les deux jours qui ont précédé l'effondrement, ont eu raison de la bâtisse. En 2014, un bâtiment de quatre étages, qui fait l'angle en face du ministère de la Jeunesse et des Sports, s'est brutalement écroulé. L'incident a fait un mort et plusieurs blessés. A Bab El Oued, où des dizaines d'immeubles sont appelés à être rasés, ils continuent de servir de logements pour des milliers de familles. Les bâtisses de style haussman- nien s'effritent au gré du temps et de ses aléas. En 2008, un immeuble de cinq étages s'écroule au petit matin, faisant nombre de victimes. Les habitants de Bab El Oued entretiennent un rapport presque maléfique avec les eaux du ciel. A la moindre averse, aussi fugace soit-elle, cette dernière rappelle les inondations de 2002. K. Saci