Qui se rappelle ce 14 mai 1972 ? Houari Boumediène et Fidel Castro descendaient la rue Didouche Mourad à bord d'une limousine décapotable. A un moment, la voiture s'arrête, elle ne pouvait plus avancer. La foule était si dense, si enthousiaste, au point que les deux hommes d'Etat ont été obligés de poursuivre à pied, en violation de toutes les règles de sécurité. Jamais le peuple d'Alger ne s'est autant mobilisé pour accueillir un hôte étranger et un tel accueil ne s'est pas reproduit jusqu'à ce jour. La preuve était faite de façon éclatante qu'entre l'Algérie et Cuba, l'amitié était plus que profonde et elle ne s'est jamais altérée. Une amitié née dans un combat commun pour la liberté, lorsque les Cubains se battaient dans la Sierra Maestra contre la dictature de Batista et que les Algériens ébranlaient les fondements du colonialisme français. Depuis, la solidité des relations ne s'est jamais démentie. L'on se souvient de Ahmed Ben Bella reçu à la Maison-Blanche par John Kennedy, au lendemain de l'indépendance, ce même Kennedy qui, en tant que sénateur, a milité pour l'indépendance de l'Algérie. Que fait le président algérien ? De Washington, il s'en va directement à La Havane d'où il se livre à une attaque en règle contre l'impérialisme américain et exprime le soutien total de notre pays à la Révolution cubaine. Le Leader Maximo n'a pas oublié ce geste. Lorsque le Maroc agresse l'Algérie en 1969, Cuba était là avec un appui militaire conséquent aux Algériens. Castro avait une grande vision des relations internationales. Interrogé par les journalistes sur l'assassinat de Kennedy, «son pire ennemi», il a répondu : «Devant la mort, on ne peut que s'incliner et se taire.» L'homme avait vu défiler onze présidents américains. Malgré le blocus, il a réussi à établir un système de santé exemplaire, un enseignement qui a permis l'éradication de l'analphabétisme et mis sur pied la seconde armée la plus puissante des Amériques après celle des Etats-Unis, et avec une telle armée, il a démontré que l'internationalisme prolétarien n'est pas une vaine expression. Il l'a prouvé en envoyant en Angola 2500 hommes combattre aux côtés des forces du MPLA, victimes d'une agression des troupes sud-africaines, secondées par l'Unita. D'autres forces cubaines présentes au Mozambique ont permis au gouvernement de la jeune République de mettre fin à une horrible rébellion tribale. Castro est mort. Il laisse le souvenir d'un homme d'Etat très attaché aux peuples du Tiers-Monde, un grand symbole pour les peuples latino-américains qui voient en lui un véritable résistant à l'Amérique impérialiste et à ses entreprises capitalistes qui pillaient les richesses de l'Amérique du Sud. Tous les peuples africains qui ont lutté contre le colonialisme lui sont redevables de quelque chose. Il restera à jamais El Comandante.