Par ses palettes esthétiques et la gymnastique émotionnelle qu'elle entraîne, la musique influe sur les processus physiologiques de l'homme. Sédative ou stimulante, elle dissèque nos souvenirs. La musique donne corps à toute impression évanescente. Langage de communication ; Proust écrivit à ce propos : «La musique est peut-être l'exemple unique de ce qu'aurait pu être –s'il n'y avait pas l'invention du langage, la formation des mots, l'analyse des idées – la communication des âmes.» Ce langage est intéressant pour le patient alzeihmerien ou pour l'autiste, il améliore à bien des égards la cognition de ces patients. L'écoute musicale, voire la pratique d'un instrument de musique, est fort intéressant dans les mécanismes cognitifs, à savoir la mémoire et l'attention. Malgré un stade avancé de la maladie, il semble y persister des capacités résiduelles d'apprentissage. Il n'est pas rare de voir le patient alzeihmerien réagir à l'écoute répétée d'une mélodie ou d'une chanson : le visage figé mortuaire change subitement d'aspect et l'éclat du regard se dessine sur le visage. Avec le vieillissement de la population, la maladie d'Alzeihmer touchera près d'une personne sur dix après 65 ans et après l'âge de 85 ans, plus de 25% de la population de cette tranche d'âge en seraient concernés. L'atteinte de la mémoire intéresse l'acquisition, le stockage et le rappel de nouvelles informations. Les souvenirs anciens peuvent être également oubliés mais de façon moindre. L'activité hippocampique nécessaire à l'apprentissage est sévèrement diminuée. La stimulation auditive musicale à répétition aussi bien tonale, rythmique qu'harmonique avec des thèmes exutoires, peut exalter et ébranler des colosses figés. La plasticité cérébrale sera mise en branle par l'extraordinaire modification des capacités fonctionnelles des synapses nerveuses de l'hippocampe. Erik Kandel en apporte la preuve dans les années soixante-dix en observant ces modifications fonctionnelles synaptiques chez un mollusque marin appelé aplysie. Insolite Un phénomène insolite est aussi observé chez le canari. En effet, quand cet oiseau apprend un nouveau chant, de nouveaux neurones apparaissent dans son cerveau, ils remplaceraient ou s'ajouteraient aux anciens. La musique débloque les neurones où étaient «emprisonnés» les souvenirs, elle démonte et remodèle la plasticité cérébrale, elle agirait comme un anti-agrégeant plaquettaire ou un fluent de la mémoire… La musique aurait donc un effet bénéfique, voire protecteur vis-à-vis de la maladie d'Alzeihmer, comme l'affirme si bien Hervé Platel, ceci en soutenant la réserve cognitive de la mémoire, ce n'est pas Olivier Sacks, le neurologue «musicophile», qui contre-indiquera ces propos… Les émotions et la sensibilité demeurent toujours présentes, mais leur expression fait défaut, en d'autres termes «le cœur n'a pas pris de rides», c'est à travers l'harmonie musicale que leur émotion prendra corps. Faire écouter à ces patients des mélodies, dont la tonalité, le rythme ou le contour mélodique, suggérant un vécu affectif, cela suscitera certainement des réactions participatives de leur part… Une bonne reconnaissance mélodique va décortiquer la bonne «couleur» musicale, en effet, on peut schématiquement entrevoir plusieurs aspects d'une suite mélodique : la tonalité définit la gamme par l'agencement des différents intervalles qui la composent. Elle donne en quelque sorte une identité musicale à la chanson, exemple le maqam, la nouba, le raga indien, la musique modale occidentale (l'éolien, le phrygien…). Ces tonalités sont souvent apprises de façon passive par l'écoute environnementale et sont emmagasinées dans notre mémoire. Les intervalles qui définissent la distance entre deux sonorités adjacentes peuvent aussi renvoyer à une identification stylistique, exemple : les intervalles serrés au un quart de temps dans les maqam ou encore la gamme pentatonique du blues, etc., le contour mélodique est souvent utilisé dans la prosodie. L'autre aspect important de la musique représente son organisation temporelle, c'est-à-dire son rythme ; temps fort et faible, syncope, etc. Ernest Martin définit le vrai tempo comme étant : «La goutte de l'élixir susceptible de ranimer ces mornes succession de longues et de brèves, et de restituer leur chaleur.» C'est le système limbique qui interviendra dans le traitement et la gestion de l'émotion musicale, c'est un ensemble de noyaux interconnectés par un réseau neuronal. Ce système est le chef d'orchestre des fonctions vitales, c'est un système tampon qui nous fait adapter aux événements de la vie. Dans le cadre de la réactivité musicale, la tonalité affective sera effective en fonction du stock mnésique, des expériences acquises et des considérations sociales. L'art, d'une façon générale, favorise l'imagination, éveille les sensibilités, aiguise l'esprit critique. La motivation et l'auto discipline des cours de musique sont connues pour limiter l'échec scolaire. Apprendre un instrument de musique dès son jeune âge ne fera que développer les sens artistique et esthétique de l'enfant. Enfant La pratique régulière d'un instrument de musique chez le tout petit développera sa dextérité et améliorera sa coordination fine. Quant aux percussions, instruments préférés des moins jeunes, ils y trouvent probablement une expression médiatisée de l'agressivité ! Il est plus aisé d'exprimer son sentiment de désapprobation ou de colère par un coup de baguette intense, fort et continu, qu'un discours de mots, le message percussif arrive plus vite que les mots… Le chant est aussi important, le souffle est la base de la respiration diaphragmatique. Savoir respirer, c'est aussi savoir se relaxer. En effet, il est connu qu'une respiration plus lente et plus profonde favorise la stimulation du système para sympathique qui est le tampon relaxant de notre organisme et cela, par la baisse entre autres, des fréquences cardiaques et de la tension artérielle… Enfin, l'enfant doit être initié dès le jeune âge à l'écoute multitonale et multistylistique, parce qu'une oreille bien entraînée est une oreille bien éduquée. A méditer…