On savait que la guerre en Irak allait dominer le débat électoral aux Etats-Unis, mais pas au point de produire le pire cafouillage de ces derniers mois. C'est l'impression que renvoie l'Administration américaine dénotant une absence totale d'assurance et de coordination. Quand le président George Bush se veut rassurant et affiche un optimisme débordant, il se trouve toujours quelqu'un de son entourage pour lui apporter la contradiction. Son secrétaire à la Défense vient de le faire avec fracas. Et quand le même Bush revient sur ce que lui considère comme la menace irakienne, son secrétaire d'Etat regrette d'avoir utilisé des informations erronées. « La seule chose que nous ayons faite de façon incorrecte concerne les ADM » (armes de destruction massive), a dit Colin Powell. « Nous n'avions pas de bonnes informations à ce sujet et nous aurions dû écarter certains de ces mauvais renseignements », a-t-il reconnu. « Je suis non seulement déçu, mais je regrette que ces informations n'aient pas été fondées », a-t-il insisté, mais cela ne rendra pas l'Irak aux Irakiens. M. Powell avait affirmé que l'Irak possédait des ADM lors de son intervention à l'ONU le 5 février 2003, peu avant le déclenchement de la guerre. Mais, a ajouté plus tard vendredi le chef de la diplomatie américaine, M. Bush a eu raison d'envahir l'Irak. Lors du premier face-à-face télévisé, jeudi soir, entre les deux candidats à la Maison-Blanche, le démocrate John Kerry a accusé le président républicain d'avoir commis « une colossale erreur de jugement » en envahissant l'Irak au détriment, selon le démocrate, de la chasse au chef d'Al Qaîda, Oussama Ben Laden, l'homme responsable des attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis. En ce qui concerne la guerre elle-même, les mêmes contradictions apparaissent. Elles sont étalées par M. Rumsfeld qui estime quant à lui que les attentats et assassinats qui se multiplient en Irak ont convaincu une partie des Irakiens que les efforts déployés par les Etats-Unis pour restaurer les libertés démocratiques « ne vont pas marcher ». L'augmentation de la violence en Irak a créé une brèche dans la confiance du public envers les Etats-Unis, ce qui permet de faire grossir les rangs des résistants ou de leurs supporters, a déclaré M. Rumsfeld. Les commentaires de M. Rumsfeld font suite à de récentes déclarations de hauts responsables de l'Administration Bush et de responsables militaires reconnaissant une aggravation de la violence provoquée par les rebelles, malgré le message optimiste répété par le président républicain Bush, en campagne pour sa réélection à la Maison-Blanche. Reste alors la solution militaire, et l'armée américaine y recourt sans retenue comme elle vient de le faire dans la localité de Samarra non loin de la capitale où les différents services hospitaliers ont dénombré des dizaines de tués, et depuis la nuit dernière, la ville de Falloujah où un bombardement américain a fait hier 7 morts et 13 blessés. Un médecin de l'hôpital local, le Dr Ahmed Taher, a affirmé que son établissement avait reçu les corps de 7 personnes, dont des femmes et des enfants, et admis 13 blessés. Dans la nuit, des habitants avaient fait état du raid, indiquant que des explosions s'étaient produites au passage d'avions de combat et que deux maisons avaient été touchées dans un quartier du nord de la ville, situé à 50 km à l'ouest de Baghdad. Dans un communiqué, la Force multinationale conduite par les Etats-Unis a bien entendu déclaré avoir visé un repaire du groupe de Zarqaoui, l'homme le plus recherché d'Irak, que l'armée américaine tient responsable de la majorité des attentats sanglants dans le pays. Cette attaque s'ajoute à une longue liste de raids menés par l'aviation américaine sur des repaires présumés de l'extrémiste jordanien dans la ville. Un calme précaire, entrecoupé de tirs sporadiques d'armes légères, régnait dans la ville de Samarra au lendemain d'une attaque de l'armée américaine et des forces irakiennes qui a fait 110 morts, dont un soldat américain, et 180 blessés. Vendredi, quelque 3000 soldats américains et 2000 éléments de l'armée et de la Garde nationale irakiennes ont envahi Samarra, à 125 km au nord de Baghdad, après l'échec il y a une semaine des négociations pour une entrée pacifique dans la ville qui compte de nombreux groupes armés, selon les Américains. Puisque les Américains eux-mêmes finissent par le reconnaître, ce calme demeure relatif, et rien n'indique qu'il ne sera pas rompu. Ce sont leurs propres statistiques qui attestent de l'étendue des zones de résistance et de son intensité. Comme ils évaluent avec une certaine précision la combativité des nouvelles forces irakiennes. Celles-ci ne semblent pas en mesure de se substituer à l'armée américaine.