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Saison hivernale : La galère...
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Neige et froid dans plusieurs régions du pays cette semaine. A partir du week-end prochain, encore du froid et de la pluie. La pression sur le gaz butane se ressent dans des localités qui ne sont pas raccordées au gaz de ville.
«C'est une réserve qui doit nous permettre de nous chauffer. L'hiver est là, et il est des plus rudes», explique Mohamed de Siouane, un village de Ouled Attia, perché à plus de 1000 m d'altitude, en plein massif du Collo, à l'extrême ouest de Skikda. Il est le guide de fortune. Ici, toutes les familles se chauffent avec le bois et certaines vont jusqu'à l'utiliser pour préparer leurs repas. Il suffit juste de regarder les cheminées de ce village pour remarquer la densité des fumées qui s'en dégagent. «Nous n'avons pas le choix», s'accordent à dire plusieurs vieux rencontrés sur la place du village.
Tahar, un septuagénaire et artisan de son état, se fait porte-parole pour plaider la cause des habitants. «On ne sait plus quoi faire. D'un côté, on ne nous alimente pas en gaz butane, et de l'autre on nous interdit d'aller ramasser du bois pour nous chauffer. On ne va tout de même pas laisser les nôtres mourir de froid», s'insurge-t-il.
Tahar raconte que plusieurs habitants de Siouane ont déjà été verbalisés par les gardes forestiers. Certains ont même été poursuivis en justice et écopé de 20 millions de centimes d'amende. Les habitants trouvent que l'Etat ne les comprend toujours pas. «Pas plus tard qu'hier, le camion qui approvisionne le village en gaz butane est venu dans notre village avec 20 bonbonnes seulement.
Les gens en sont pratiquement venus aux mains pour avoir une bouteille de gaz. A ce rythme, on va finir par nous entre-tuer», témoignent d'autres vieux. En ouvrant le débat sur le gaz butane, il fallait s'attendre à un déluge de colère. «Ce que les responsables de cette wilaya n'arrivent pas à comprendre, c'est qu'à chaque hiver notre village se retrouve isolé durant plusieurs semaines. La neige bloque tous les accès. Sans bouteilles de gaz suffisantes, que devrions-nous faire ?
Croyez-nous, en hiver si on arrive à trouver une bonbonne de gaz à 1000 DA on l'achète, malheureusement, on ne la trouve pas.» Selon leurs dires, Siouane, l'un des villages les plus pauvres de la wilaya, reste aussi l'un des moins servis en gaz butane. Un seul camion pour tous les habitants et il arrive souvent qu'il vende ses bouteilles en cours de route avant même de parvenir à leur localité. Les habitants attestent également qu'ils sont victimes du marché noir en se retrouvant souvent obligés d'acheter ces bonbonnes auprès de particuliers en payant le double du prix réglementaire.
Ils évoquent aussi un fait très étrange : «Nous avons constaté que les bonbonnes de gaz d'un centre enfûteur privé ne contenaient pas le même volume de gaz que celles de Sonatrach.» «A Siouane, et par expérience, on a fini par nous rendre compte que les bonbonnes de gaz de Sonatrach tiennent une semaine, alors que celles que nous achetons auprès du privé ne tiennent que trois jours», dénoncent-ils.
Les dangers du système D
Cette pénurie, les habitants la vivent comme une fatalité. Ils essayent juste de faire avec et parfois de la contourner. Le manque de gaz butane, propre d'ailleurs à tous les villages du grand massif de Collo, les a poussés à recourir à des palliatifs, pas toujours sans risques pour leur propre vie. En recourant au déboisage que leur impose une réalité glaciale, les habitants ont également fait dans l'ingéniosité pour bricoler les réchauds qui vont avec.
Pour brûler leur bois et se chauffer, ils sont parvenus à fabriquer leurs propres poêles. S'inspirant des anciens poêles à charbon, des jeunes du village se sont spécialisés dans la fabrication d'un nouveau modèle. «On utilise les bouteilles de gaz GPL usagées des véhicules pour façonner nos poêles et les vendre», explique le jeune Fethi. Les prix de ces poêles varient selon leur importance. Les petits sont cédés à 5000 DA et les plus grand à 9000 DA. Les habitants de Siouane disent préférer ces poêles et accepter tous les dangers qui en découlent.
Leur a-t-on vraiment laissé le choix ? Même inquiétude dans certains villages de Tizi Ouzou, même si l'acquisition d'engins de déneigement dans plusieurs communes de la wilaya de Tizi Ouzou a pu amoindrir les contraintes sur les villageois de la région. C'est le cas, d'ailleurs, de la commune d'Ath Yenni, à 40 kilomètres au sud-est de Tizi Ouzou, où les services de l'APC sont mobilisés pour faire face à toute éventualité. Smaïl Deghoul, maire de cette municipalité, nous a expliqué que ces dernières années, l'APC s'est dotée de plusieurs engins de déneigement pour éviter à la commune de sombrer dans l'isolement en cas de fortes chutes de neige.
«Nous avons pris toutes nos dispositions pour faire face aux intempéries. D'ailleurs, nous avons installé le plan Orsec depuis plusieurs semaines. Nous avons deux tracteurs 4x4 chasse-neiges, des chargeurs et rétro-chargeurs que nous avons mobilisés pour la saison hivernale», a souligné M. Deghoul. Selon le même responsable d'APC, il y a eu des retards dans le raccordement de trois villages au réseau d'alimentation en gaz naturel.
Il s'agit de Tamsaout, Taourirt Ikhelef et Tigzirt. «Les entreprises en charge de la réalisation de ce projet ont repris les travaux et nous souhaitons qu'elles terminent rapidement pour permettre aux habitants de ces villages de mettre fin à l'achat des bouteilles de gaz butane, dont l'approvisionnement est vraiment difficile durant les périodes de neige», ajoute M. Deghoul. Le problème du gaz se pose vraiment avec beaucoup d'acuité dans plusieurs localités de la wilaya de Tizi Ouzou, où les travaux de réalisation de projets de raccordement sont à l'arrêt depuis plusieurs mois.
Les entreprises réclament le payement de leurs situations pour pouvoir reprendre les travaux. Et pourtant, lors de sa visite, en octobre dernier à Tizi Ouzou, le ministre de l'Energie, Mustapha Guitouni, avait déclaré que «l'Etat a débloqué 27 milliards de dinars, qu'il a scindés en deux tranches, pour payer les entreprises qui ont travaillé dans le cadre des programmes du raccordement au réseau du gaz de ville. Reste une somme de 15 milliards que l'Etat débloquera avant la fin de l'année.»
Par ailleurs, notons que les citoyens se sont, comme chaque année, ravitaillés en denrées alimentaires pour ne pas vivre le calvaire des années précédentes, où ils étaient «confinés dans leurs villages durant plus d'une semaine», a confié un habitant d'Iferhounene, une commune nichée au pied de la montagne du Djurdjura. Là aussi, les services de la mairie sont sur le pied de guerre pour intervenir en cas de fortes chutes de neige. Non loin de là, à Aït Zekki, la population affiche, elle aussi, ses inquiétudes. Les responsables de la municipalité ont remis en l'état le matériel de déneigement pour justement ne pas être pris au dépourvu par la neige.
Inquiétude
Une inquiétude est palpable aussi à Chlef, même si le taux de raccordement en gaz de ville est passé en quelques années de 32 à 56%. On enregistre tout de même un manque en gaz butane. Des villageois à Chlef quant à eux réclament justement la mise en place de points de vente de proximité qui seront approvisionnés directement par l'entreprise Naftal. A noter qu'un producteur privé de cette matière assure par ses propres moyens de transport, la livraison des bouteilles de gaz butane au profit des habitants de certaines localités isolées.
A Jijel, en dépit de ces efforts, la partie ouest de la wilaya, relevant de la commune de Ziama Mansouriah, demeure privée des projets de raccordement. Des citoyens de la wilaya limitrophe de Béjaïa s'opposent toujours au passage des conduites de gaz sur des terrains dont ils revendiquent la propriété, privant plusieurs autres localités de cette même wilaya de cette source d'énergie. Des difficultés de financement ont également retardé la mise en service de certains autres projets de gaz réalisés à Jijel.
Du côté de Béjaïa d'ailleurs et afin d'alimenter les villageois en gaz butane, Naftal a augmenté sa production et multiplié les rotations vers ses stations-service qu'elle gère en gestion directe et celles gérées par le privé pour les approvisionner en carburant et en gaz. Seulement, la bonne volonté des responsables de Naftal qui ont mis en place un dispositif spécial pour la circonstance s'est heurtée aux fermetures des voies de communication.
Car le déplacement des camions ravitailleurs est rendu impossible face à l'incapacité des APC et de la direction des travaux publics à ouvrir les voies avec le peu de moyens dont ils disposent. En effet, la wilaya ne dispose que de trois chasse-neige mobilisés en hauteur dans les régions d'Adekar, Barbacha et Akbou (Chellata). Ce qui contraint ces institutions à recourir à la location d'engins chez les particuliers A noter que le taux de pénétration du gaz naturel dans la wilaya de Béjaïa est le plus bas au niveau national.
42% seulement des foyers sont alimentés avec cette énergie qui est appelée à passer à 87% à la fin de l'année 2018, après la levée des oppositions sur les projets de transport de gaz, à croire le wali de Béjaïa, Mohammed Hattab. A Souk Ahras, malgré la couverture de ses 26 chefs-lieux des communes en gaz de ville, le gaz butane est encore un produit prisé dans les zones enclavées, où le raccordement au réseau est en phase d'achèvement.
A Ouled Driss, les habitants d'une agglomération de plus de 400 familles, appelée communément Thaoura Ziraeya, doivent effectuer des déplacements vers les points de vente de la commune mère, sinon le chef-lieu de la wilaya, pour s'offrir une bonbonne qui n'est jamais cédée au prix officiel. «Faute de gaz butane, nous avons eu recours, hier, à un feu de bois pour tous nos besoins domestiques et pour chauffer les lieux», a déclaré l'un des habitants, qui a dénoncé la spéculation dont ils sont victimes.
«Pour les personnes véhiculées, le déplacement vers les autres régions n'est pas aussi contraignant que pour ceux qui doivent marcher ou acheminer à dos d'animaux le produit jusqu'aux hameaux lointains de la mechta Yagoub ou celle de Aâch Agueb», a-t-il étayé pour expliquer que les spéculateurs, qui placent au-dessus de la barre de 400 à 500 DA/l'unité, savent pertinemment que leur clientèle fait partie de cette couche défavorisée.
Cette même situation est vécue par d'autres hameaux épars des communes de Aïn Zana, Ouled Moumen, Lakhdara, Terreguelt, Aïn Soltane et Sidi Fredj, entre autres. Pour cette dernière contrée, ce sont les mechtas de Fidh Ezder, Koudiat Elassa qui en pâtissent à cause de l'éloignement des grands centres urbains et de la prolifération des spéculateurs parmi les contrebandiers notoires qui en font un marché juteux.
A Mechroha, commune placée naguère parmi les plus affectées par ce problème, les habitants de ses 35 mechtas estiment, dans leur majorité, que l'abondance du produit et la multiplication des points de vente ont diminué certes de la forte pression qui pesait sur le marché, sans pour autant faire baisser les prix prohibitifs qui montent au gré des intempéries pour atteindre parfois les 500 DA/l'unité.
Pauvreté
A Tipasa, officiellement, 25 communes sur les 28 existantes bénéficient du gaz naturel. Il n'en demeure pas moins que de très nombreux quartiers des villes n'ont pas cette chance. La wilaya affirme la disponibilité d'un mini-centre enfûteur à Hadjout qui produit quotidiennement 7000 bouteilles de gaz butane, alors que la distribution est assurée par un réseau de 81 points de vente. La commune rurale, déshéritée et démunie de Sidi Sémiane, avait enregistré l'arrivée du gaz de ville. Les familles sont dans l'incapacité de participer au montage financier pour faire rentrer le gaz dans leurs domiciles.
Les douars épars compliquent encore la situation. Les autorités de la wilaya proposent des possibilités de financement à travers un échéancier aux familles à très faible revenu. Il y a également des citoyens qui se plaignent de l'indisponibilité du gaz, notamment quand la neige s'installe dans les montagnes et empêche le mouvement des véhicules. Les aviculteurs continuent à s'alimenter en bouteilles de gaz butane.
Des centaines de milliards de centimes avaient été investis dans l'alimentation en gaz. Dans l'attente du dégel, il y a des dizaines de sites qui attendent l'arrivée de cette énergie. Les réseaux ne sont pas mis en place. Les administrés de l'importante agglomération rurale Sahel, qui relève de la commune de Bourkika, se contentent de contempler l'installation du réseau de gaz à proximité de leur «village».
Certes, la wilaya avait atteint un niveau de raccordement en gaz appréciable, mais elle reste encore très loin des attentes des populations. Moins de la moitié des 43 047 foyers qui devaient être raccordés au gaz patientent dans «le froid» et les aléas de l'indisponibilité du gaz. Des problèmes financiers et des entraves techniques sont à l'origine de ces retards.


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