Comme chaque année, à l'approche de l'Aïd El Adha, une effervescence s'empare de la ville d'Alger, au même titre que les autres villes du pays, d'ailleurs. Une aubaine pour les maquignons qui écoulent leur produit au milieu des quartiers populeux. Il va sans dire que ceux-là mêmes espèrent et c'est légitime tirer le maximum de dividendes, après avoir engraissé, une année durant, l'espèce ovine. Une espèce dont ils vantent le label et l'origine. Certains locaux de particuliers se transforment en la circonstance en point de vente de moutons qui côtoient la botte de foin et autres produits alimentaires. Peu importe si la bourse de la ménagère est mise à rude contribution. Il n'est pas malvenu aussi de dire que si pour bon nombre de pères de familles, l'occasion vaut la chandelle, pour d'autres, on ne lésine pas sur les moyens pour délier sa gibecière et répondre aux joyeux drilles. Les enfants ici trouvent matière à se donner à cœur joie en gambadant dans les cimetières et rues avec le mammifère ruminant, laissant dans leur sillon les crottes fumantes que les agents de Netcom auront peine à ramasser à la pelle. L'ambiance se veut coutumière et tout le monde se met de la partie. Il y va de même pour les rémouleurs de circonstance qui font leur apparition pour proposer leurs services avant le sacrifice de la bête, rituel millénaire de Sidna Brahim El Khalil. Tôt le matin, chacun de ses aiguiseurs de couteaux s'adjuge un empan de rue et s'affaire à affûter les instruments tranchants. Toute la panoplie à lames est passée à la meule. Sur la voie publique ou au milieu du brouhaha qui emplit le souk et ses abords, l'aiguiseur de couteaux se donne du cœur à l'ouvrage. Vieux et jeunes se mettent en procession pour solliciter sa meule. On n'hésite pas, parfois, contre le bon sens, à charger les gosses de cette tâche auprès du rémouleur. Ces instruments tranchants que les enfants manipulent non sans gaucherie.