E'too, Pelé, Flicha, Tyson, l'Annabi... L'intention n'est pas de discourir sur les étoiles du noble art ou du sport roi. A Béjaïa, des éleveurs d'un type particulier ont affublé du nom de leurs idoles des béliers. Des béliers de combat. Les joutes ont pour arènes des terrains vagues de la Carrière, de Sidi M'hand d'Amokrane, des Oliviers et du stade Benallouache. Oui, au stade. Ce qui doit instinctivement rappeler un récent coup… franc magistralement exécuté de… la tête en terre germanique. Mais laissons notre fier ego de côté et revenons à nos moutons. Un ou deux combats la journée, pas plus, c'est la tradition depuis longtemps. Aucune mise, c'est le code, laisse-t-on dire. Le vainqueur aura tout simplement sa botte de foin payée. Pour déclarer le vainqueur, la règle varie. Mais en général, on se fixe sur le nombre de coups de tête à asséner en un temps arrêté. Une disqualification peut intervenir pour renoncement, hésitation, fuite et, rarement, syncope. Ces « corniades » ont leurs incidences sur la valeur marchande. La bourse cotera à 8 ou 9 millions de centimes les bons béliers. Les champions jusqu'à 15 briques. Et tombe en disgrâce le perdant. Les combats s'étalent sur toute l'année avec toutefois une plus grande fréquence à l'approche de l'Aïd. L'annonce des joutes se fait de bouche à oreille. A Annaba ou à El Harrach, dit-on, c'est carrément un championnat qui est organisé. Les propriétaires « bougiotes » y pensent mais hésitent encore de crainte que les tournois n'ameutent les amateurs des mises en espèces sonnantes et trébuchantes. Des liens (ventes, échanges) sont instaurés entre les éleveurs des quatre coins du pays. On raconte que des Blidéens sont venus récemment négocier une superbe bête mais ont dû repartir bredouilles. A cause de l'attachement. Eh oui ! C'est que les bêtes, quand on les malmène en combat, on les a tout en soin pendant leur existence. Nourries à l'orge, suivies régulièrement par un vétérinaire, certaines pèseront le quintal dépassé. Béjaïa est, paraît-il, la pépinière d'El Harrach. Plus que nourris, les béliers sont choyés. Peignés en véritables mérinos, coiffure soignée…L'apparat est fini de rubans aux couleurs du club fétiche. N'est pas bélier de combat n'importe quelle bête. Le physique compte. Front serré, cornes spiralées et rapprochées à la base, collier haut et volumineux, épaules tracées. Suit l'entraînement. Si vous apercevez, un de ces quatre, courir, côte à côte l'éleveur et son compagnon, n'en riez pas. C'est une séance de préparation physique. Ruée et force de frappe sont au menu. * Olé mouton !