Faisant front à un vaste terrain classé patrimoine culturel (ruines romaines), à côté d'une mosquée et face à la mer, la clinique chirurgicale Ibn Sina de Tamentfoust (ex-Lapérouse), à l'est d'Alger, un grand bâtiment de couleur ocre entourné d'un liseré bleu et rouge, surplombe la route menant au port de plaisance de Lapérouse. De la réception au 3e étage en passant par les trois blocs opératoires équipés de plateaux techniques ultramodernes (deux pour la chirurgie cardiaque et un pour la chirurgie orthopédique), la salle de cathétérisme, la réanimation, les chambres des malades, celles notamment réservées aux mères et enfants, rien n'est fait au hasard. Les normes internationales sont appliquées à la lettre. L'oxygénation, l'air comprimé, le traitement d'eau qui serviront les services de la structure sont assurés au niveau des installations spéciales implantées dans la cour de l'établissement. L'alimentation électrique est soutenue par un groupe électrogène dans le cas de coupures. Aucun grain de poussière ne filtre dans cette clinique. Tous les moyens sont là pour faire barrage aux particules qui peuvent souvent avoir des conséquences néfastes sur les malades opérés et hospitalisés. Il est permis de dire qu'il n'y a rien finalement à envier aux établissements hospitaliers étrangers. La structure privée d'une haute technologie accueillera dès cette semaine ses premiers malades. Une vingtaine d'enfants souffrant de cardiopathies congénitales sont programmés pour subir des interventions chirurgicales. Ils font partie de cette liste d'attente de 4000 enfants nécessitant une prise en charge, répertoriée par la clinique médico-chirurgicale infantile de Bou Ismaïl et répartis à travers le territoire national dont les capacités sont limitées. La clinique Ibn Sina high-tech spécialisée en cardiologie et orthopédie a ouvert ses portes à la mi-décembre dernier. « Notre établissement s'inscrit, entre autres, dans le cadre du programme de la stratégie adoptée par le secteur du travail et de la sécurité sociale. Ce qui permettra la résorption de la liste d'attente des malades relative aux cardiopathies congénitales et la réduction des coûts de cette pathologie et la maîtrise des dépenses y afférentes. Des soins pour adultes sont aussi prévus (chirurgie cardiaque et orthopédique) », nous expliquent le professeur Hanifi et le docteur Kheireddine, respectivement spécialistes en chirurgie cardiaque et en orthopédie. Pour le docteur Kheireddine, directeur médical, la clinique Ibn Sina est signataire de deux conventions, la première a été établie justement dans le cadre de la résorption de la liste d'attente avec la clinique de Bou Ismaïl et la deuxième les lie directement à la CNAS pour la prise en charge de l'enfant et de l'adulte. L'établissement en question s'engage ainsi à prendre en charge cette catégorie d'enfants de la région Centre qui s'étend jusqu'à la wilaya de Tamanrasset. Rappelons que la stratégie de prise en charge de ces maladies, dont l'incidence est de près de 1500 nouveaux malades par an, dont 800 nécessitant l'acte chirurgical, est mise en œuvre selon une géographie sectorielle. La région Centre revient à l'établissement de Bou Ismaïl, aux cliniques privées telles El Azhar et, aujourd'hui, Ibn Sina. Les régions Est et Ouest seront prises en charge par les cliniques Abou Merwane de Annaba et Kara Mostefa d'Oran, laquelle n'effectue pas encore la chirurgie cardiaque chez l'enfant. Les établissements hospitaliers spécialisés sont également concernés par ce programme qui s'étale de 2006 à 2009, lequel s'interesse principalement au traitement des malades atteints des pathologies portées sur la liste d'attente dans les plus brefs délais. Il a été ainsi élaboré par le secteur du travail et de la sécurité sociale le listing et la classification des malades par âge, lieu de résidence, pathologie et actes, la validation des structures privées nationales et la signature des conventions et de partenariat avec les cliniques privées en l'occurrence et les établissements belges. L'équipe de la clinique Ibn Sina, constituée de deux chirurgiens, un cardiologue, le professeur Amalou, deux médecins anesthésistes réanimateurs et un personnel paramédical, entend contribuer sérieusement à la réduction de ce nombre effarant de malades, surtout ceux qui sont en attente. Selon le professeur Hanifi, l'établissement dont l'équipe est permanente sera en mesure de programmer deux à trois interventions chirurgicales par jour, soit deux à cœur ouvert et une à cœur fermé. « Entre la cathétérisme interventionnel et la chirurgie, nous pouvons régler le problème à raison de 500 à 550 malades par an. Ce qui est significatif », fait-il remarquer. « A ce jour, nous avons déjà une vingtaine de dossiers dont les autorisations d'ouverture de droit sont validées par le centre de la CNAS de Boumerdès. Les interventions débuteront alors au courant de la première semaine de janvier. Tout est prêt, que ce soient les moyens techniques ou humains, pour effectuer ces interventions. Il est important pour nous de dire que les médecins sont Algériens et sont présents au niveau de la structure H24 », dira-t-il. Le professeur Hanifi a tenu à signaler que plutôt le malade est opéré, mieux il se porte. « Malheureusement, la plupart des enfants malades arrivent en phase de complication, duedans certains cas au retard dans le diagnostic », a-t-il ajouté d'où son insistance sur la formation. Les cardiopathies congénitales sont au nombre de dix, sans compter les pathologies complexes. Dans ce cas, souligne le professeur Hanifi, la clinique Ibn Sina a pour vocation de développer ce côté scientifique. Il affirme que des contacts avec des équipes belges et suisses ont été engagés pour à la fois former les jeunes diplômés et prendre en charge certaines pathologies complexes chez les enfants de petits poids (moins de 6 kg). Elles nécessitent, explique-t-il, une maîtrise des techniques et une spécialisation très pointue de toute l'équipe. « Ces équipes seront sollicitées selon un calendrier pour opérer ces cas difficiles et organiser une rencontre avec des cardiologues pour une formation », souligne-t-il. D'une capacité de 60 lits, la clinique chirurgicale Ibn Sina doit répondre au besoin de toute une région. Dans le cadre de la prise en charge des cardiopathies congénitales, les responsables de cette clinique ont pensé résoudre un problème crucial rencontré par les parents : le lieu de résidence lors de l'hospitalisation de leurs enfants. Une villa pas loin de l'établissement est spécialement mise à la disposition de ces parents qui viennent souvent des villes de l'intérieur. Ils seront logés dans cette résidence tout au long du séjour d'hospitalisation de leurs enfants qui dure généralement une quinzaine de jours. Contrairement à la clinique de Bou Ismaïl qui interdit la garde malade, qui est souvent la mère, la clinique Ibn Sina a prévu un espace spécial mère-enfant. Des chambres sont conçues de façon à accueillir la mère et l'enfant dans son berceau. Interrogés sur les coûts de prise en charge médicale, le directeur médical, le docteur Kheireddine, a tenu à signaler que le malade n'a à rien à payer s'il est assuré social ou enfant d'un assuré. Il n'a qu'à remplir une fiche de renseignements portant toutes les indications relatives à son assurance qui sera soumise au centre payeur qui est à Boumerdès qui, lui, nous fournit une autorisation d'ouverture de droit. Interrogé sur les coûts d'une intervention chirurgicale, le professeur Hanifi a précisé que le prix est calculé sur la base des actes et de la nature de l'acte chirurgical. Le coût diffère entre une intervention chirurgicale à cœur ouvert et celle à cœur fermé. Elle est estimée, selon lui, entre cinq cent mille à un million de dinars.