L'hommage rendu au Théâtre national algérien (TNA), avant hier, à ce ténor de la chanson chaâbi qu'est le cheikh Dahmane El Harrachi, a mis du baume au cœur de sa famille en dépit de quelques imperfections dans l'organisation. La soirée, qui a démarré avec plus d'une heure de retard, a été rehaussée par la présence du ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, Yazid Zerhouni, qui a pris place aux côtés de Khalida Toumi, ministre de la Culture. La soirée a débuté sur les chapeaux de roue avec le passage de la troupe Zorna El Afrah sur une scène grimée aux couleurs d'Alger, capitale de la culture arabe. Suivra tout de suite après une projection d'un documentaire intitulé Saha ya Dahmane, réalisé par Salim Benkadi. Cette projection fera voir un aspect insoupçonnable de la vie de cet homme, qui a longtemps vécu en exil. Un exil qui le mènera à Lille puis à Marseille et enfin Paris où il ne manquera pas de se frotter à une diaspora qui n'a que les cafés pour s'exprimer. Il y chantera d'ailleurs l'indigence des siens « avec des mots simples accompagnés d'une mélodie qui sied au goût des mélomanes ». La silhouette toujours délicate, ce natif de Fontaine fraîche à El Biar ne se fait pas violence lorsqu'il apostrophe ses copains dans cet arabe algérois succulent qu'on n'entend plus dans nos quartiers. Placé sous la houlette de Zerrouk Mokdad, l'orchestre national du chaâbi, qui a interprété au tout début une touchia Jambar Sika, saura bien accompagner les artistes qui se sont succédé sur scène. Lesquels artistes ont essayé tout compte fait de rendre plus vive la mémoire de Abderrahmane Amrani. C'est ainsi que Salah Dziri fera sien le legs de cet homme originaire de Khenchela en interprétant des chansons comme Yalhedjla. La voix et le geste y étaient à coup sûr. La mise bien soignée, Hassiba Abderraouf interprétera quelques chansons du patrimoine hawzi. Le public visiblement au fait de la chose n'a pas manqué d'ovationner l'interprète et des youyous ont fusé, à l'occasion, de partout. Cheikh Noureddine, l'un de ceux qui ont accompagné El Harrachi dans son exil hexagonal dans les années 1950, gratifiera le public de chansons puisées expressément du patrimoine ancestral chaâbi. Toujours présent dans pareille manifestation, Yassine Ouabed récitera des textes de son cru qui ont ravi au plus haut point les présents. Suivant au pas le paternel, Kamel El Harrachi clôturera la fête en interprétant avec cette voix éraillée quelques chansons fétiches de l'idole restée toujours la même dans le cœur de ceux qui l'apprécient. Il annoncera à la fin de l'hommage que des textes inédits écrits par son père seront repris dans une production qu'il fera sortir dans les prochains jours. Le fils prodige fera un clin d'œil à l'artiste Hamidou qui a su convaincre les services du ministère de la Culture pour faire coïncider l'hommage avec l'entame des festivités d'Alger, capitale de la culture arabe. Par ailleurs, il est à noter le fait que la ministre de la Culture ne semble pas trop apprécier la presse écrite puisqu'elle refusera de se soumettre aux questions des journalistes. Toutefois, elle le fera avec son impétuosité habituelle avec l'ENTV. Comme pour se donner bonne conscience, elle se contentera de dire qu'« elle a pris rendez-vous avec la télévision ». La frilosité ayant marqué les débuts de la manifestation dédiée à la culture arabe y est, soutiennent des observateurs, pour beaucoup. D'ailleurs, Mme Toumi ne se lassera pas de dire que les hôtes de l'Algérie — 15 au plus — ont fait leur choix pour cet événement qui est toujours tâtonnant.