Aouameur Mohamed Saïd était directeur de la finance et de la comptabilité (DFC) d'une filiale de construction de Sonatrach, GCB, lorsque la question du transfert des fonds de cette entreprise, soit 1,5 milliard de dinars étaient sur le point d'être transférés de la BEA vers El Khalifa Bank en novembre 2001. Le placement n'a pas eu lieu. Pourtant, le responsable et le PDG sont portés sur la liste des 39 clients privilégiés de l'agence El Khalifa Bank d'El Harrach, ayant bénéficié d'une carte gratuite des soins au centre de thalasso de Sidi Fredj. Convoqué en tant que témoin, Aouameur Mohamed Saïd explique que Signi, adjoint du directeur de l'agence El Khalifa Bank d'El Harrach, lui a fait des offres de service de sa banque, parmi lesquelles un taux d'intérêt de 10% pour les placements à terme. Ce sont les seuls avantages qu'ils nous ont offerts », note-t-il. La juge : « Vous êtes sûr que c'est le seul avantage ? » « Ils sont venus me remettre une carte du club des hommes d'affaires du thalasso (...). M. Signi m'a dit que c'est une carte pour les clients d'El Khalifa Bank qui veulent se reposer », répond-il. Le magistrat interroge le témoin sur les raisons qui ont fait que le placement des fonds de la GCB n'ont pas été transférés vers El Khalifa Bank. « Nous avons décidé de garder notre argent à la BEA, avec laquelle nous avions de bonnes relations », explique le témoin. « C'est plutôt M. Mostefaoui, le directeur financier de Sonatrach, qui vous a fait changer d'avis en vous disant que la banque n'était pas solvable », réplique la juge. « Nous ne lui avons jamais demandé son avis », répond le témoin. Le PDG Tazart Akli, témoin, raconte qu'en novembre 2001 une délégation de Khalifa s'est déplacée au siège de la société à Boudouaou pour faire part des offres de service de la banque et des avantages liés au transport aérien pour les employés du Sud. « Ils nous ont parlé d'un taux d'intérêt pour le placement pouvant atteindre 14% et des réductions pour les billets d'avion dans le cas où nous leur confions les 1,5 milliard de dinars que nous avions à la BEA. En février 2002, ils ont fait part au directeur général de la création d'un club d'hommes d'affaires au centre de thalasso. Ils nous ont même organisé une visite sur site, à l'occasion de son inauguration. Il y avait beaucoup de monde, notamment des patrons de sociétés (...) Après, ils nous ont remis les formulaires et les cartes dans des enveloppes. La mienne, je ne l'ai jamais utilisée », affirme Tazart. La juge demande à l'ancien PDG de GCB : qui a eu l'idée de ne pas placer les fonds de l'entreprise à El Khalifa Bank. Le témoin : « L'offre de Khalifa était intéressante, mais j'ai appelé M. Mai de Sonatrach qui était en même temps administrateur à notre entreprise, pour lui parler des intérêts d'El Khalifa Bank. Il m'a demandé d'être prudent parce qu'à Sonatrach la décision de placement n'a pas été prise. » La société de transport de céréales, appartenant à la SNTF et l'OAIC, disposait d'une somme de 150 millions de dinars, déposée à la Badr avec un taux d'intérêt de 5%. El Khalifa Bank d'El Harrach lui offre 10% d'intérêt et elle décide de déplacer 40 millions de dinars. Témoin, le PDG de cette entreprise, Aboukacem Chawki, raconte que le transfert s'est effectué en deux étapes en novembre 2002. « Nous avons entendu parler des offres d'El Khalifa Bank relatives aux placements à terme. Nous nous sommes présentés à l'agence d'El Harrach pour lui proposer l'argent. Ils nous ont offert un taux de 10% et nous avons accepté », déclare le témoin. La juge : « Quels sont les autres avantages ? » Le témoin : « Rien d'autre. » La juge : « Qui a pris la décision de placer l'argent ? » Le témoin : « Moi-même. » La magistrate : « N'avez-vous pas pris l'avis du conseil d'administration ? » Aboukacem Chawki : « Non. » « A quoi sert alors ce conseil si vous ne l'impliquez pas dans la gestion des fonds des travailleurs ? » Le témoin : « Placer l'excédent de la trésorerie est une décision de gestion qui relève de mes prérogatives. » A propos de la circulaire transmise par le ministre des Finances et sa reconduction dans la loi de finances de 2000, le témoin affirme ne l'avoir jamais reçue. La juge appelle Aouadi Mohamed, PDG de l'Entreprise nationale des puits (ENTP), dont le siège est à Hassi Messaoud. Il affirme que le premier placement de 100 millions de dinars a été effectué en juillet 2002, avant son arrivée à la tête de la société. En janvier 2003, des responsables d'El Khalifa Bank d'El Harrach se sont présentés au bureau du DFC, M. Adjaout, pour lui faire des offres de reconduction du placement. « Pour une somme de 204 millions de dinars, quatre millions de dinars d'intérêt ont été proposés. Adjaout avait une délégation de pouvoir, délivrée par mon prédécesseur », explique-t-il. La magistrate : « Mais vous ne lui avez pas laissé cette délégation ? » Le témoin : « Non. » Il révèle que la reconduction a été faite par souci de rentabilité économique à la suite des intérêts attractifs qu'offrait Khalifa, mais aussi du fait que de nombreuses filiales de Sonatrach avaient déjà procédé à des placements. La magistrate précise au PDG qu'une loi existe et interdit le transfert des fonds des entreprises publiques du Trésor pour les mettre dans d'autres banques. « Je ne savais pas », répond le témoin. « L'argent a été transféré » Hocine Soualmi, directeur de l'agence des Abattoirs, exerçant en même temps à la représentation du groupe de Paris avant sa fermeture en 2002, donne l'impression de connaître le labyrinthe des procédures bancaires. La présidente lui fait savoir que la veille il avait déclaré avoir remis de l'argent en contrepartie de « bouts de papiers griffonnés, sans signature parfois, et ne comportant que la somme souvent en abrégé ». L'accusé affirme qu'il s'agit d'opérations de transferts de fonds légales, faites sur instruction du PDG de Khalifa. « Lorsque j'ai refusé de remettre les fonds sans documents, j'ai été rappelé à l'ordre par mon patron », dit -il. La magistrate : « Les gens qui ont pris l'argent n'étaient pas des convoyeurs. Karim Boukadoum, qui n'avait rien à voir avec la banque, a pris à plusieurs reprises des montants dépassant les 10 millions de dinars ? » L'accusé : « Les convoyeurs me ramènent des enveloppes dans lesquelles se trouvent des papiers avec le montant. Le PDG nous oblige à ne pas garder en caisse une somme dépassant les 1,5 million de dinars. Comme il a la situation du jour de toutes les agences, sur modem, il nous demande de transférer les excédents. » La présidente appelle Abdelhafid Chaâchouâ, le patron de KGPS (Khalifa groupe protection et sécurité), et lui demande si les convoyeurs sont au courant des montants transportés. « Non. Ils partent et prennent les sacs pour les transférer vers la caisse principale. Ils portent des badges et, souvent, les directeurs des agences connaissent le chef du groupe avec lesquels ils travaillent », dit-il. La présidente se retourne vers Soualmi et l'interroge sur le fait qu'il a remis de l'argent à Boukadoum Karim. « C'était sur ordre du PDG », se défend-il. La juge revient sur le point lié à l'ancien directeur de l'école de police de Aïn Bénian, Adda Foudad, et demande d'expliquer comment cet officier de police a déposé des montants en devises à la représentation du groupe de Paris, alors que la banque n'était pas installée en France. « Les 909 000 euros étaient déjà placés avant mon arrivée. La convention était signée entre Foudad et le PDG à Paris et le renouvellement s'est fait à Alger entre les deux », déclare-t-il. La présidente : « Est-ce logique ? », L'accusé : « Foudad ne pouvait se déplacer à Paris une seconde fois et a signé à Alger. » La magistrate : « Mais il n'y avait pas de banque Khalifa à Paris ! » L'accusé : « Il y avait le bureau de représentation. » La présidente : « Il faut un agrément pour recevoir des fonds. » L'accusé : « La procédure administrative ne me concerne pas. Il existe une convention de dépôt entre le PDG et Foudad. » La magistrate : « Le PDG accepte des fonds sans que sa banque soit ouverte à Paris. Il accepte un acte de nantissement de caisse dans un compte d'El Khalifa Bank, domicilié à Sao Paulo. Expliquez-nous cela. » L'accusé affirme que la convention entre Moumen et Foudad est légale. La juge l'interroge sur le transfert de la France vers l'Algérie de la somme des 909 000 euros. « Ce n'est pas la représentation de Paris qui a procédé au transfert. C'est la direction générale des mouvements de capitaux d'El Khalifa Bank à Alger qui l'a fait en novembre 2002. La confirmation de ce transfert m'est parvenue à cette époque. » La juge : « Vous dites que Foudad avait 2 millions de dinars en dépôt à terme et 609 000 euros. Est-ce que le compte de Foudad a changé après le transfert ? » L'accusé : « Non, parce que l'opération comptable a été faite avant. Le compte ne change pas. » La magistrate : « Mais son argent était à Paris, il a été transféré sur Alger. Logiquement, son solde change. » L'accusé : « L'argent ne bouge pas. Le changement se fait par les pièces comptables. » La juge revient à la charge : « Vous avez l'opération, mais l'argent est resté à sa place dans le compte de Khalifa à Sao Paulo. » L'accusé : « Les fonds ont été transférés. » La juge passe à une autre question de la garantie de la dette de 52 millions de dinars de la société algéro-espagnole. « Vous avez procédé à la mainlevée sur l'usine. Expliquez. » L'accusé : « C'était en février 2003. Foudad avait 20 millions de dinars en dépôt à terme et les 609 000 euros. Il cherchait à fructifier ses fonds. Je lui ai conseillé de s'entendre avec les deux patrons de la société, Bouhadi et Bourayou, clients de la banque, pour garantir la dette qu'il leur restait. Les négociations ont abouti. » La magistrate lui rappelle qu'il y a eu l'affaire des 2 millions d'euros, saisis sur les trois cadres de Khalifa à l'aéroport d'Alger. L'accusé déclare que la mise en contact entre Foudad et la société algéro-espagnole répondait au souci de voir la banque récupérer ses 52 millions de dinars et Foudad fructifier ses fonds. « La proposition que je lui ai faite est intervenue avant le gel du commerce extérieur par la Banque d'Algérie », révèle-t-il. La présidente rappelle à Soualmi ses propos devant le juge d'instruction. « Vous avez déclaré, en présence de vos avocats, que vous n'aviez rien reçu de Khalifa qui prouve que le transfert des 609 000 euros a eu lieu et que ce dernier a eu lieu sur ordre du PDG. » L'accusé : « J'étais en prison et je n'avais pas les documents sur moi. Ils étaient en France. Ce n'est qu'après que j'ai pu retrouver la confirmation du transfert par la direction des mouvements de capitaux. » La juge revient sur les déclarations de l'accusé devant le juge : « Vous aviez déclaré que lorsque vous aviez signé la mainlevée sur l'hypothèque, le transfert n'avait pas encore eu lieu. » L'accusé : « Pour moi ,les montants de Foudad étaient à Khalifa, que ce soit à Paris ou à Alger, c'est la même chose. » La présidente : « Etiez-vous capable de lui donner, à cette époque, une attestation qui prouvait que son argent était rentré dans un compte à Alger ? » L'accusé : « Il ne me l'a jamais demandée. » La juge : « Ce transfert fictif, le client ne pouvait le savoir ! » « L' argent a été transféré », dit-il exhibant le document de la direction générale d'El Khalifa Bank confirmant l'opération. A propos de la convention entre Foudad et les patrons de la société algéro-espagnole, il explique qu'il n'était pas présent. La magistrate : « Est-ce que à Sao Paulo, il existe un compte de Foudad Adda ? » Soualmi : « Non, mais l'argent de Foudad est dans le compte de Khalifa domicilié à cette banque. » La juge : « Est-ce que ce montant passe par la Banque d'Algérie ? » L'accusé : « Normalement oui, parce que la direction générale d'El Khalifa Bank m'a confirmé leur transfert. » La présidente : « Jamais, pourtant c'est le seul canal par où les transferts entre et vers l'Algérie doivent se faire. » La présidente revient à l'hypothèque de l'usine de la société algéro-espagnole, faite à Alger selon l'accusé, et demande à ce dernier si les montants de Foudad à ce moment- là couvraient. « Les 609 000 euros étaient déjà transférés. Ils couvrent totalement la dette de 52 millions de dinars. » La présidente : « Il n'y a aucune preuve. » L'accusé : « Les écritures comptables de la direction générale d'El Khalifa Bank existent. » La présidente revient sur la représentation de Paris. « Vous étiez le directeur de cette représentation. » L'accusé : « J'étais en détachement. Je n'étais qu'un agent technique. » La juge : « Mais dans l'attestation de solde que vous avez signée à Foudad, vous vous présentez com-me directeur. » L'accusé : « Le fonds est bancaire. » La magistrate tire un registre et déclare : « Dans ce registre de recueil de garanties, il n'y a pas eu recueil de la garantie que vous avez signée à Foudad. » L'accusé : « C'est un registre qui ne comporte ni date, ni enregistrement, ni cachet, au point où le juge m'a déclaré qu'il n'avait aucune valeur juridique. » La magistrate : « Pourquoi l'hypothèque n'est-elle pas enregistrée ? » L'accusé : « Ce recueil est établi par la direction juridique. » La juge : « Si Foudad vous avait demandé le retrait de son argent, est-ce que vous l'auriez fait à Alger ? » L'accusé : « J'aurais fait la commande et remis le montant sans aucun problème. » Le procureur général veut savoir si le père de l'accusé était celui qui lui a présenté Foudad, son ancien collègue. Soualmi dément. Il dit avoir connu l'ancien directeur de l'école de police de Aïn Bénian à El Khalifa Bank. Il fait savoir à l'accusé qu'il avait déclaré avoir trouvé 10 placements de fonds à la représentation de Paris, quand il a été installé. « J'ai dit qu'il y avait trois ou quatre parmi lesquels celui de Foudad. » Le magistrat n'arrive pas à avoir de réponse sur le mode de transfert de ces dépôts, notamment ceux des émigrés, qui selon lui se sont plaints du fait que, pour les retraits, il y avait toujours des problèmes. Soualmi déclare avoir rencontré Foudad pas plus de quatre fois, dont une à son bureau à Aïn Bénian, dans le cadre du nantissement de la dette de la société algéro-espagnole. Il reconnaît avoir acheté un logement, un studio, en France. Le procureur général revient à l'attestation de solde délivrée par l'accusé à Foudad. « Est-ce un document comptable ou administratif ? », demande-t-il L'accusé : « Comptable. » Le magistrat : « Et pour le transfert ? » L'accusé : « Elle existe. Début novembre, la direction générale m'a transmis la confirmation du transfert. » Le procureur général : « Où sont les pièces comptables qui prouvent que l'argent est arrivé dans un compte de Foudad à Alger ? » L'accusé : « L'opération a été faite au mois de juin 2002, bien avant le gel du commerce extérieur. » Le magistrat : « Pourquoi ne pas l'avoir envoyé tout de suite ? » Soualmi : « C'est au PDG de le faire. » Le procureur général : « Le 22 mai 2002, Foudad vous a demandé, en tant que directeur de la représentation de Paris, de transférer son argent vers l'agence des Abattoirs. Vous lui avez remis une attestation de transfert en novembre 2002 et signé une attestation de solde certifiant que son argent était toujours à Paris. » L'accusé : « Je l'ai fait sur ordre du PDG. » Le magistrat demande à Soualmi si Foudad avait un compte spécial, il répond par la négative et le magistrat lui montre le contraire en exhibant un document. « En avril 2002, la représentation de Paris a été dissoute et vous signez en tant que directeur une attestation de solde le 8 décembre 2002 à Paris », demande le procureur. L'accusé : « J'ai dit que les activités de la représentation ont été gelées en avril 2002, mais nous continuions à gérer les affaires courantes des clients. » Le procureur général interroge l'accusé sur la procédure de virement des intérêts à Foudad, lui qui n'avait pas de compte à Paris. « Les intérêts sont accordés par virement, par le biais d'autres banques. » Le magistrat s'étonne : « Comment, vous faites du trabendo par le biais des banques ? Foudad n'avait pas de compte courant, comment recevait-il ses intérêts ? » L'accusé : « Il existe des conventions légales avec des banques où les clients ont leurs comptes. Ils sont donc libres de les transférer ou de les laisser. » Le magistrat insiste. « Foudad n'avait rien à son nom. » L'accusé : « Normal. » Le procureur général : « A Sao Paulo, les intérêts pour les placements ne dépassent pas les 3% et vous accordez jusqu'à 14% à Foudad. Comment expliquez-vous cela ? » Soualmi : « Ce n'est pas Soualmi qui accorde les intérêts. » Le magistrat réplique : « Les autres 11% , vous en faites du trabendo ? ». Eclat de rire dans la salle. La compensation a été autorisée par la liquidation La parole est donnée à la défense. Me Meziane, avocat d'El Khalifa Bank liquidation (partie civile), interroge l'accusé sur l'instruction du 9 novembre 1999, signée par Moumen. Soualmi réaffirme ignorer cette note. L'avocat exhibe les cinq feuilles de l'instruction qui oblige les expéditeurs de fonds de recevoir un cinquième feuillet des écritures entre sièges comme accusé de réception. L'avocat revient à la charge et demande à l'accusé si les liasses des EES récupérées des Abattoirs étaient différentes de celles des autres agences. L'accusé : « Cela dépend du programme du transfert des fonds décidé par la DG. » Me Meziane interroge Soualmi s'il signait des EES lorsqu'il remettait les fonds à Karim Boukadoum. « Je mettais les EES dans le sac fermé avec un cadenas », dit-il. Il révèle qu'en conseillant à Foudad de garantir la dette de la société espagnole avec le montant des 609 000 euros, c'était dans l'intérêt de la banque et de ses deux clients. « Comment se fait-il qu'au moment où Khalifa avait des problèmes, vous avez proposez un nantissement sur une valeur immobilière ? N'est-ce pas une manière de permettre au client de retirer son argent ? » L'accusé : « Au mois de janvier 2003, il y avait des problèmes avec le commerce extérieur, pas autre chose. La banque continuait à fonctionner normalement. » Me Meziane : « Est-ce que la loi permet une compensation entre des personnes ? » L'accusé : « C'est le représentant du liquidateur qui l'a autorisée. Mais si la banque fonctionnait normalement, la loi le permet, mais sa responsabilité s'est arrêtée avec la liquidation. » Me Aït Larbi, avocat de Soualmi, commence son interrogatoire par une remarque. « J'espère que je vais poser des questions à Soualmi, pas à Abdelmoumen Khalifa, parce que l'interrogatoire du procureur général, de la présidente et de l'avocat de la partie civile m'a donné l'impression d'être en face de Moumen. » La présidente : « En aucun cas l'accusé ne peut être assimilé à un autre accusé. Les faits qui lui sont reprochés sont clairs et les questions concernent uniquement les faits. » L'avocat interroge son mandant sur la véracité ou pas du contenu de l'attestation de solde remise à Foudad. L'accusé est affirmatif et ajoute qu'elle a été faite sur ordre du PDG. Il persiste à affirmer que les fonds de Foudad ont été transférés. A la question des accusés de réception relatifs au transfert de fonds, Soualmi renvoie la balle au caissier principal qui, selon lui, doit s'inquiéter de l'arrivée des fonds. « Si le montant n'arrive pas au-delà d'un mois, il ne peut laisser l'écriture en suspens. A la DG, ils le savent le jour même, à travers les états informatiques », explique Soualmi. Il déclare à Me Berghel qu'il n'a jamais reçu une quelconque inspection qui aurait pu relever des anomalies dans la gestion de l'agence des Abattoirs. Me Fetnasi revient sur le cas du transfert de fonds par Karim Boukadoum. « C'est un transfert légal », réplique l'accusé. L'avocat précise qu'il s'agit de la somme de 3 millions de dinars qu'il a prise dans un cartable. « C'était un remboursement de ses bons de caisse anonymes. Il a été envoyé par le PDG qui lui a remis un bout de papier dans une enveloppe », déclare l'accusé, avant de noter qu'il n'a su que c'était des bons de caisse qu'une fois devant le juge d'instruction. Il note qu'entre avril 2003 et juillet 2003, il a remboursé de nombreux clients en débitant l'agence. « Je les logeais dans les comptes d'attente parce qu'il y avait des suspens. » Il affirme ne pas être au courant que Boukadoum avait un compte commercial à Chéraga. « Est-ce qu'au sens comptable, la remise des 15 millions de dinars à Boukadoum en plusieurs fois est une opération douteuse ? », demande Me Fetnasi. L'accusé : « Ce sont des opérations comptabilisées. » Me Bourayou revient sur la circulaire de Moumen datée de 1999. L'accusé est formel. Il n'a pas été mis au courant et donc ne l'a jamais appliquée. Bourayou inverse l'opération. « Est si c'est vous qui recevez de l'argent de la caisse, est-ce que vous exigez un accusé de réception ? » L'accusé : « Non, il n'y a pas d'écriture de réception. » Au sujet de ses 249 voyages en France en l'espace de trois ans, l'accusé explique que c'était personnel et qu'il a de tout temps voyagé, avant même son arrivée à Khalifa. Sur le placement de Foudad, il signale que ce dernier voulait fructifier son argent et en même temps ne pas perdre ses intérêts. Le procureur général revient à la charge, mais finit par affirmer que l'ancien commissaire a tout perdu. « N'est-ce pas lui qui vous a présenté les cadres de la sûreté nationale pour les encourager à placer les 25,7 millions de dinars de la mutuelle des policiers ? » L'accusé conteste. Mais le magistrat lui rappelle ses propos devant le juge d'instruction. L'accusé se ressaisit et déclare : « C'est possible. » Le magistrat insiste pour avoir la pièce comptable qui prouve que les fonds de Foudad ont été transférés, mais l'accusé note que celles-ci ne lui parvenaient pas. Il faut les ramener de la direction générale, dit-il. Sur ses multiples voyages à Paris, le magistrat tente de faire une opération de calcul pour avoir le montant des frais. « Vous touchez 50 000 DA et vous achetez au moins 12 billets par mois, à raison de 30 000 DA l'un, comment pouvez-vous vous permettre 80 voyages en une année ? Avez-vous bénéficié de cartes de gratuité ? » L'accusé : « Je voyage gratuitement, uniquement quand je pars en mission. » Le procureur général : « Comment expliquer les 241 voyages, alors que pour rembourser un prêt vous étiez obligé de demander un deuxième prêt ? » L'accusé : « J'ai toujours voyagé. A la BDL, j'avais une moyenne de 5 voyages par mois, alors que je touchais 30 000 DA seulement. Je suis issu d'une famille aisée. » La présidente tire un registre et demande à l'accusé pourquoi le code de l'agence des Abattoirs n'est pas mentionné dans la case des hypothèques, alors que Foudad était concerné par un acte de nantissement au profit de la société algéro-espagnole. « Au DG de le faire. J'ai envoyé le bordereau de garantie », dit-il. L'adjoint administratif qui se transforme en caissier La juge appelle Mohamed Rouali qui était pendant 10 ans à la BDL de Hussein Dey, avant de rejoindre El Khalifa Bank. Il précise qu'il était adjoint administratif et il lui arrivait de remplacer Soualmi. Il explique qu'en 1999, les transferts de fonds étaient assurés par la société Amnal, avec laquelle Khalifa avait une convention, mais dès la création de KGPS, ce sont les convoyeurs de cette entreprise qui assuraient le déplacement des fonds. Il est affirmatif concernant l'envoi des EES avec les fonds, qui selon lui étaient au nombre de 4 feuillets. Si le destinataire ne conteste pas, cela voudrait dire, selon lui, que les fonds sont arrivés. Il déclare n'avoir jamais remis de fonds, mais la présidente lui rappelle ses propos devant le juge, selon lesquels il aurait remis 3 millions de dinars à Karim Boukadoum, sur instruction de Soualmi. « Soualmi a bougé et m'a laissé la consigne de remettre les 3 millions de dinars à Boukadoum, laissés dans le coffre. Quand ce dernier est venu, j'ai demandé sa carte d'identité pour vérifier son nom et je lui ai remis la somme contre une décharge », affirme-t-il, précisant que c'est la seule et unique fois où il a eu à remettre de l'argent. La présidente lui demande à quel titre, lui qui était administratif, pouvait-il se charger des fonds, alors qu'il y a un adjoint chargé des fonds et un caissier à l'agence. « C'était une instruction de mon directeur », répond-il. La magistrate lui rappelle qu'il a affirmé avoir remis une autre somme de 1 million de dinars à Boukadoum sur instruction de Soualmi. « Non, ce n'est pas vrai. J'ai dit que je ne me rappelle pas si c'est un million de dinars ou trois millions de dinars », déclare Rouali. Ce dernier reconnaît que les instructions de Soualmi étaient verbales, pas écrites. Il déclare ne pas connaître Boukadoum et ce n'est qu'après qu'il a su qu'il était à Khalifa Airways. Le procureur général rappelle à Rouali qu'il avait déclaré avoir remarqué des personnes étrangères qui venaient au bureau de Soualmi pour prendre les fonds. Affirmation qu'il conteste. Il reconnaît avoir pris un prêt de 1,3 million de dinars d'El Khalifa Bank, qu'il n'a toujours pas terminé de rembourser. Une partie, 300 000 DA, lui a été accordée en 1999 et une autre de 1 million de dinars en 2000. Il avoue qu'il était à l'agence BDL de Hussein Dey, lorsque Soualmi était directeur. « Mais se retrouver à la même situation à El Khalifa Bank est une coïncidence », note-t-il. Me Brahimi revient sur la compensation de l'acte de nantissement de Foudad et l'accusé révèle que c'est l'adjoint du liquidateur, Tidjani, qui l'a autorisé. Me Fetnasi veut savoir si l'accusé était au courant que le montant de 3 millions de dinars remis à Boukadoum était le remboursement des bons de caisse anonymes. L'accusé : « Je ne l'ai su qu'après. » Le procès reprend aujourd'hui avec l'audition de Adda Foudad, ancien directeur de l'école de police de Aïn Bénian (Alger).