La seconde séance plénière des assises nationales de l'industrie a été marquée par les interventions du patronat et de celle de l'UGTA. Si l'ensemble des communicants a salué l'initiative des pouvoirs publics, il n'en demeure pas moins que plusieurs interrogations ont été soulevées. Issaâd Rebrab, patron du Groupe industriel Cevital a été le premier à prendre la parole. Dans une consistante communication sous le thème « Cap 2015 : une approche pragmatique et volontariste des défis de politique industrielle », Rebrab a voulu sensibiliser, en partant de son expérience personnelle, les autorités publiques sur l'importance de la jonction des intérêts et de l'unification des efforts entre l'Etat et la sphère privée. « Seuls, nous n'y arriverons pas ; seuls, vous n'y arriverez pas », a-t-il tenu à dire au ministre des Participations et de la Promotion des investissements (MPPI). Le succès de la future stratégie industrielle passerait, de l'avis de cet industriel, par « un volontarisme au plus haut niveau de l'Etat ; une association très forte entre l'Etat et les acteurs privés de sensibilité nationale ; la nécessité d'une politique intégrée incluant formation, logistique et aménagement, et enfin une exécution décisive et rapide ». M. Rebrab juge, en effet, que « le temps joue contre nous, ce qui rend nécessaire un engagement rapide ». Pour aller justement vite, le PDG de Cevital s'est présenté à ces assises avec un projet industriel intégré. Il s'agit de la création d'un hub portuaire majeur à cap Djinet rejoignant un complexe logistique, industriel et énergétique intégré autour de 5 à 7 pôles d'activités. Le projet d'un coût avoisinant les 20 milliards de dollars US est ouvert à l'ensemble des partenaires (public, privé, national et étranger) et Abdelhamid Temmar, a été dépositaire d'une première copie. M. Ezzeraïmi, PDG du groupe agroalimentaire Sim, intervenant au nom du Club des entrepreneurs et industriels de la Mitidja (CEIMI) qu'il préside, a apprécié l'avant-projet dévoilé lors de la rencontre du 1er février en le qualifiant de « solidement charpenté ». Plusieurs points sont « positifs », selon le CEIMI. L'orientation vers la recherche d'un positionnement international ainsi que la spécialisation flexible font dire à M. Ezzeraïmi que le projet soumis au débat est un « plaidoyer pour un changement profond ». Le président du CEIMI se montre moins complaisant lorsqu'il s'agit d'aborder la question des investissements directs étrangers (IDE) et des avantages qui en découlent. « Nous proposons des mesures de portée équivalente aux bénéfices des entreprises nationales », soutient Ezzeraïmi. Il proposera, par ailleurs, « la mise en place d'un puissant dispositif de mise en œuvre de la stratégie, la garantie d'une large diffusion de la stratégie sur le double plan national et international, le lancement d'une réflexion sur les filières industrielles à promouvoir, l'implication rapide de toutes les wilayas dans l'identification des zones ainsi que l'intégration de l'agriculture, de la pêche et des ressources halieutiques en tant que fournisseurs en amont de la chaîne industrielle de l'agroalimentaire ». Si Boualem M'rakach, président de la Confédération algérienne du patronat (CAP), a eu une exclamation interrogative sur l'absence de l'industrie du tourisme des préoccupations des rédacteurs de la stratégie, Réda Hamiani, fraîchement intronisé à la tête du Forum des chefs d'entreprise (FCE), s'est distingué par un vif échange avec le ministre, modérateur de la séance. M. Hamiani, tout en se disant en convergence avec plusieurs points de l'avant-projet, plaide pour un minimum de « protection » de l'opérateur national. Le président du FCE qualifie l'attitude algérienne de « naïve » en voulant être plus libérale que les libéraux. En citant les exemples de réactions des USA et de la France lorsque des intérêts économiques nationaux sont menacés, il interpellera M. Temmar sur la nécessité d'introduire des mesures de protection dans le code des investissements, à l'instar de ce qui se passe en Tunisie. Des applaudissements spontanés fusent de la salle des congrès du Palais des nations lorsque Hamiani dira, allusion directe à la privatisation en marche d'Algérie Télécom : « On ne met pas entre les mains des étrangers des entreprises stratégiques dans les télécoms et la sécurité informatique. C'est la sécurité de la nation qui en sera menacée. » Le FCE souhaiterait, également, l'élimination des barrières pour les PME/PMI. Les travaux se poursuivront aujourd'hui en ateliers.