La campagne officielle du second tour de l'élection présidentielle qui a débuté hier sera marquée par l'unique débat contradictoire entre les deux finalistes, la socialiste Ségolène Royal et le candidat de droite Nicolas Sarkozy, le 2 mai, organisé par France 2 et TF1. Ségolène Royal a longuement expliqué, mercredi soir sur France 2, comment elle allait, si elle était élue, « réformer sans brutaliser » et « remettre de l'ordre » en France « dans la sérénité ». « Je ne suis pas pour dire qu'il y a des gens qui veulent se lever tôt et d'autres qui aiment se coucher tard, je ne suis pas pour dresser les Français les uns contre les autres », a-t-elle dit, accusant son adversaire de « draguer les voix populistes ». Interrogée sur la régularisation des « sans-papiers », elle a répondu qu'elle se ferait « au cas par cas », même si elle comprend les difficultés de certaines familles. « Si j'étais dans un pays où il n'y a rien, je prendrais mes enfants sous le bras et je les emmènerais dans un pays où ils pourraient manger et aller à l'école », a-t-elle dit. Sur le drame du Darfour, elle a souligné le rôle de la Chine en Afrique. Quant à la situation des otages français en Afghanistan, la candidate a refusé de l'évoquer afin d'éviter de leur nuire. Répondre aux médias sur ce thème « donnerait raison aux talibans qui ont posé cet ultimatum », a-t-elle dit. « Je demande que cette affaire-là ne soit pas utilisée (...) dans cette campagne, et je demande que M. Sarkozy ne l'utilise pas non plus. » Face à Nicolas Sarkozy, Ségolène Royal s'est présentée comme la candidate du « respect » et du « rassemblement ». « Je veux rassembler tous les républicains de progrès. » « Je ne crois pas demain à l'homme providentiel », a-t-elle conclu, « le vrai changement c'est moi ». « Femme libre et sincère », la candidate PS appelle, dans sa profession de foi validée jeudi par le Conseil constitutionnel « au rassemblement de toutes celles et tous ceux qui veulent réformer la France sans brutalité, sans mépris et refusent la fracture républicaine ». La candidate socialiste refuse « une France du chacun pour soi, dominée par la loi du plus fort et par la concentration des pouvoirs entre quelques mains, toujours les mêmes ». « Démocratie irréprochable » Le document intitulé « La France présidente » de la candidate socialiste comporte également un calendrier de la mise en place des premières mesures du « pacte présidentiel » de Ségolène Royal. Nicolas Sarkozy propose aux électeurs « une démocratie irréprochable » et conclut : « Si je suis élu, je ne serai le président d'aucun clan, d'aucun parti, d'aucune idéologie (...). » « A ceux qui peuvent plus, je demanderai plus. Plus de travail, plus d'efforts, plus de créativité, plus d'innovation, plus d'investissement, plus de risque, plus d'audace », ajoute le candidat. « Mais ils auront les fruits de leurs efforts. Et à ceux qui ont moins, je donnerai les moyens d'avoir plus. » « Je vous le dis avec franchise : la France ne peut pas continuer à en faire toujours plus pour ceux qui fraudent, abusent, ne veulent pas travailler, et toujours moins pour ceux qui travaillent, font des efforts, respectent les principes essentiels d'une vie en société. » Le candidat UMP a exposé, jeudi lors de l'émission « A vous de juger », sur France 2, pendant soixante-quatorze minutes – le même temps que sa rivale socialiste Ségolène Royal la veille – les principaux axes de son projet présidentiel. S'il devient président, il rendra des comptes aux Français « très régulièrement ». « Je veux une pratique irréprochable de la République », a-t-il dit. M. Sarkozy a également dit qu'il n'y aurait « pas un seul licenciement économique » sans que celui qui est licencié ne puisse recevoir « 90% de son salaire et une formation ». Sur l'immigration, le candidat de l'UMP se dit « résolument opposé à toute forme de communautarisme », car selon lui, « quand on dénonce la Nation, chacun se retranche sur sa communauté ». « Je porte l'idée nationale française », affirme-t-il. Nicolas Sarkozy souhaite engager un plan Marshall à l'attention des jeunes de banlieue. « La République sera généreuse à leur endroit » en promettant de trouver un emploi à chacun de ces jeunes, pour leur « éviter le piège de l'oisiveté » et faire en sorte qu'ils ne soient pas « tentés par le trafic de drogue ». Sur les questions internationales, Nicolas Sarkozy souhaite renoncer à tout élargissement de l'UE en attendant d'avoir créé des institutions fortes. Le candidat de l'UMP s'oppose à l'entrée de la Turquie dans l'Europe : « La Turquie c'est l'Asie Mineure », tranche-t-il. Nicolas Sarkozy se veut « libre » par rapport aux Etats-Unis, précisant son rejet de l'intervention en Irak et sur l'importance qu'il accorde au processus de Kyoto, rejeté par les Américains. « J'aurais fait la même chose que Jacques Chirac. » « Les Américains devront se retirer », a-t-il ajouté. Sur l' Afghanistan, il considère que « la présence à long terme des troupes françaises n'est pas décisive ». Sur l'Iran, Nicolas Sarkozy soutient qu'« il n'y a pas d'autre solution que les sanctions de plus en plus fermes », et il estime « inimaginable » une intervention américaine dans ce pays. Sur le Darfour, Nicolas Sarkozy souhaite l'établissement de « corridors humanitaires ».