Le fort taux d'abstention enregistré lors des législatives de jeudi dernier n'obéit qu'à une seule lecture. Selon le Front des forces socialistes (FFS), un parti ayant appelé au boycott de cette échéance électorale, le peuple a adressé un message fort : « La confiance populaire ne se gagne pas par le mensonge, la propagande et l'argent. » Le premier secrétaire du parti, Karim Tabbou, estime, en effet, que le choix de l'abstention est « l'aboutissement de six ans de fraude, de violence et de mensonge ». Ce comportement citoyen est, ajoute-t-il, « un référendum contre le régime, ses élections, l'arrêt du processus électoral de 1991 et toutes les politiques successives du pouvoir ». Affirmant que le taux réel de participation ne dépasse pas les 12%, l'orateur affirme que les autorités avaient du mal, en dépit du fait d'avoir avancé un taux de 35%, à tricher sur les chiffres. « Il est révélateur des difficultés qu'a le pouvoir de masquer l'étendue du désastre aux yeux d'une population et d'observateurs politiques avertis », lance-t-il lors d'une conférence de presse animée hier à Alger. Les décideurs, souligne-t-il, n'ont récolté que les fruits de leur semence. Le FFS refuse, dans la foulée, l'analyse consistant à dire que la crise de confiance s'est désormais installée entre la population et les partis politiques. Il y a plutôt manque de confiance entre le peuple et le pouvoir. « L'extinction de toute vie publique depuis plusieurs années s'est retournée contre ses instigateurs. Le pouvoir n'a à s'en prendre qu'à lui-même », indique-t-il. En sus de l'abstention, ces législatives ont, enchaîne-t-il sur un ton de dérision, eu le mérite de faire émerger « un deuxième parti majoritaire, le parti des bulletins blancs ». Les nombreux électeurs qui ont glissé des bulletins nuls l'ont fait uniquement afin d'éviter des problèmes administratifs à l'avenir. Dénonçant tous les partis politiques qui ont pris part à cette élection, le deuxième homme du FFS se dit heureux d'avoir adopté le choix de la majorité des Algériens. « Le FFS ne prétend pas s'arroger ces résultats, même s'il y a largement contribué. Pour nous, les enjeux principaux demeurent l'ouverture vers la société, la présence dans la société, son devenir et son avenir démocratique », explique Karim Tabbou. Le parti, soutient-il, a choisi de se mettre du côté de la société qui est « sa première direction ». De ce fait, le FFS, précise-t-il, fera de l'ouverture à toutes les franges de la société son cheval de bataille. La formation de Hocine Aït Ahmed compte, indique-t-il, faire de son 4e congrès, prévu pour les 4, 5 et 6 septembre prochain, un rendez-vous renforçant son rapprochement avec la société. Evoquant la fameuse lettre envoyée par Saïd Bouchaïr, président de la CNPSEL, au président Bouteflika dans laquelle il a dénoncé des cas massifs de fraude, le responsable du FFS se montre méfiant. Pour lui, cette opération « est montée de toute pièce pour donner un crédit à ces élections ». La fraude électorale dénoncée dans la lettre de Bouchaïr, souligne-t-il, n'est pas un fait nouveau. « La fraude existe en amont et en aval du système électoral algérien. Nous n'avons aucun mécanisme permettant l'organisation des joutes électorales crédibles », martèle-t-il.