Mis à mal par la rupture du cessez-le-feu de l'ETA qui enterre définitivement ses espoirs de paix au Pays Basque, le chef de gouvernement espagnol a tenté hier de récupérer un minimum de consensus politique, en appelant la droite à « l'union » sur la question basque. Le retour à la lutte armée par le groupe indépendantiste basque, effectif depuis ce mercredi, signe un échec politique personnel pour José Luis Rodriguez Zapatero qui avait fait de la paix au Pays Basque la priorité de son mandat. La rupture de la trêve de mars 2006 et la perspective d'une reprise des attentats – qui pourraient être sinon meurtriers, tout au moins spectaculaires – tombe au pire moment pour les socialistes au pouvoir, quelques jours après une courte défaite aux élections municipales et à moins de dix mois des législatives. Dans son communiqué de mardi, l'ETA justifie sa rupture en accusant le gouvernement « d'avoir répondu au cessez-le-feu par la poursuite des détentions, des tortures et des persécutions ». Le communiqué dénie toute « légitimité » aux élections municipales « antidémocratiques » du 27 mai au Pays Basque, dont ont été écartés des candidats proches de son bras politique interdit, Batasuna. Il attaque aussi durement M. Zapatero, tout comme les responsables du Parti nationaliste basque (PNV) au pouvoir au Pays Basque. Le leader de Batasuna, pour sa part, Arnaldo Otegi, a pareillement accusé le gouvernement espagnol et le PNV d'être responsables de « l'échec » et de « l'effondrement » du processus de paix. Difficile consensus Faisant le deuil d'un « processus de paix » qu'il avait lui-même initié en 2006 à la suite d'un historique « cessez-le-feu permanent » de l'ETA, M. Zapatero tente de retrouver « l'union » politique qui lui avait fait cruellement défaut, l'an passé, lors de sa tentative d'issue négociée à 40 ans de violence au Pays Basque. « L'union des forces démocratiques est une valeur essentielle » en matière de lutte antiterroriste, a souligné mercredi M. Zapatero devant le Sénat. « Je vais employer la même fermeté et détermination à combattre les menaces de l'ETA que j'ai employée pour rechercher la paix (...) c'est une tâche difficile qui nécessite cet appui politique », a déclaré le chef de gouvernement socialiste, avant d'appeler à un « consensus maximum ». Le leader de l'opposition de droite, Mariano Rajoy, a jusqu'à présent fait du dossier basque son principal et pratiquement unique cheval de bataille contre le gouvernement socialiste. M. Rajoy rejette depuis l'origine toute possibilité de négociations avec le groupe basque armé, responsable de 819 morts en près de 40 ans de lutte pour l'indépendance du Pays Basque, s'opposant radicalement à la démarche de « dialogue » engagée en juin 2006 par M. Zapatero. Quelques heures après l'annonce de la rupture du cessez-le-feu, M. Rajoy a réitéré son opposition à toute négociation avec l'ETA, appelant le gouvernement à ne réaliser « aucune concession, aucune négociation avec l'organisation terroriste ». « L'ETA doit perdre tout espoir de négociation et doit savoir que son unique destin est la déroute par les instruments propres à un Etat de droit comme le nôtre », a-t-il déclaré. Le chef de file de l'opposition qui compte capitaliser sur l'échec de M. Zapatero sur le dossier basque en vue des prochaines législatives, a prié le gouvernement socialiste de « rectifier », de « clarifier » et d'ôter « tout type d'ambiguité » sur son attitude face à l'ETA. Dans sa démarche de conciliation avec la droite, M. Zapatero prévoit de rencontrer M. Rajoy lundi prochain, pour apparemment tenter de raviver le « pacte antiterroriste » signé en 2000 entre le PP et le PSOE qui avait alors permis un relatif consensus politique sur la question basque. Des voix à droite ont commencé à réclamer des élections législatives anticipées avant l'échéance naturelle de mars 2008. Le journal conservateur ABC jugeait même mercredi que « la dissolution de l'Assemblée et la convocation immédiate d'élections générales est le seul geste de dignité que peut réaliser le chef de gouvernement ». Le gouvernement a, sans ménagement, repoussé une telle éventualité : « S'il y a bien une raison pour ne pas convoquer des élections générales, c'est précisément la rupture de trêve », a rétorqué le bras droit de M. Zapatero, le ministre de l'Intérieur, Alfredo Perez Rubalcaba.