Durant sa courte visite en Algérie, le président français Nicolas Sarkozy a manifestement voulu dissiper les zones d'ombre qui planent sur les relations entre deux pays que rapprochent l'histoire et la géographie. En parlant de sa volonté de participer à l'entente entre deux peuples souverains dont le regard est résolument tourné vers l'avenir, il tient un discours de rupture par rapport aux pesanteurs du passé. Les observateurs auront ainsi relevé que Nicolas Sarkozy a défini le cadre dans lequel il entendait désormais inscrire les relations de la France avec l'Algérie au niveau d'un partenariat beaucoup plus conséquent qu'il ne l'est pour le moment. Les secteurs stratégiques de l'énergie, du gaz et du nucléaire civil, ainsi que la sphère de l'agroalimentaire, sont les points nodaux d'une politique nouvelle qui porterait la France à accompagner le développement de l'Algérie. Au-delà des effets d'annonce, c'est la sérénité évidente du ton de Nicolas Sarkozy qui porte à croire que pour lui l'étape algérienne de son voyage au Maghreb est déterminante. Pas seulement parce qu'Alger est la première capitale qu'il visite hors d'Europe en tant que président de la France, mais parce que c'est cette ville qu'il a choisie pour en dire un peu plus sur le projet d'union méditerranéenne qui lui tient tant à cœur et pour laquelle il entend organiser un sommet des chefs d'Etat de la rive sud en 2008. C'est-à-dire à une date si rapprochée que cela suppose que pour voir ses efforts couronnés de succès, le président français devra avoir aplani un certain nombre de contentieux restés pendants avec les pays qui ont quelque poids dans la région et sans lesquels le projet d'union méditerranéenne serait une coquille vide. Nicolas Sarkozy n'ignore pas qu'il aura besoin de soutiens fiables dans cette entreprise qu'il entend concrétiser pour offrir de nouvelles perspectives à son pays dont il veut faire la locomotive de l'Europe. C'est bien évidemment une initiative politique que celle du projet d'union méditerranéenne qui préfigure un ensemble susceptible, en toute hypothèse, de rogner sur l'hégémonisme américain et l'ouverture de nouveaux espaces pour la France et l'Europe. Nicolas Sarkozy a alors entamé à Alger ce parcours de bâtisseur du nouvel ensemble, cette union méditerranéenne qu'il définit comme un lac de paix, indiquant implicitement qu'il intègre dans sa projection les sujets qui fâchent. Quid par exemple de la présence ou non d'Israël dans cette union méditerranéenne. Il est peut-être trop tôt, même pour le président Sarkozy, pour s'avancer sur un terrain aussi mouvant. Pour autant, le chef d'Etat se met ici dans la posture de l'homme des défis, et s'il peut le plus, il peut le moins à l'égard d'un réchauffement entre deux pays aussi voués à avancer que le sont l'Algérie et la France. Nicolas Sarkozy sait pertinemment que la France peut être, en Algérie, mise en concurrence, probablement défavorable, avec des candidats aussi déterminés que les Etats-Unis, la Chine, l'Inde, mais aussi des pays comme l'Allemagne, l'Italie, qui peuvent s'avérer être des rivaux lorsque l'intérêt de chacun primera sur celui de l'Europe. On peut comprendre que Nicolas Sarkozy, en soulignant que les peuples algérien et français étaient résolument tournés vers l'avenir, c'est que ni l'un ni l'autre ne pouvait trouver, y compris dans le passé, des raisons de l'insulter.